Mangas : dans notre sélection de juin, de l'intelligence artificielle, de la SF, du folklore japonais, des démons et de la dark fantasy
Notre sélection de juin vous propose deux récits de science-fiction qui interrogent, notamment, sur l'intelligence artificielle et la place que l'on veut lui donner dans notre vie intime et professionnelle. Jusqu'où est-on prêt à aller ? Anzu vous entraînera dans un récit sur fond de folklore japonais où l'acceptation de soi et le deuil sont abordés. Viennent ensuite une chasse au démon à travers le temps façon Highlander et un manga inspiré du jeu vidéo Dark Souls où le mystère et le danger se côtoient.
"Pino, l’IA émotionnelle", de Takashi Murakami, chez Pika
Un récit SF intimiste et touchant qui s’intéresse à la question des sentiments chez les robots. Pourraient-ils agir selon leurs émotions plutôt qu’en fonction du programme qui leur a été implanté ? Quel serait leur rôle dans les soins à la personne ?
Pino, la première intelligence artificielle au monde à atteindre la singularité technologique, est le nom générique du robot humanoïde produit en masse et équipé de l’I.A. "pino". Pino est donc le pionnier des robots réellement pensants, autonomes et dotés d’une intelligence qui dépasse très largement le niveau des êtres humains. Hana travaille dans une entreprise pharmaceutique et collabore à distance avec un Pino qui œuvre dans un laboratoire situé à des centaines de kilomètres. Le petit robot est en charge du bon traitement des animaux utilisés pour tester les nouveaux médicaments de la firme. Seulement, le jour où il apprend que son laboratoire doit être fermé, un changement drastique va s'opérer chez Pino...
Le récit est simple mais très efficace et nous entraîne dans un univers inspiré de la SF tout en restant réaliste. L’auteur joue habilement avec nos émotions, notamment en donnant une allure de petit garçon à Pino. Selon les versions, le robot est démineur dans un pays pauvre, le professeur particulier d’un enfant, jardinier, et prend aussi la place d’un enfant décédé dont la mère a perdu la tête et pense qu’il est toujours vivant. Ces différentes facettes donne lieu à autant d’histoires et avec le Pino, garde malade, on découvre que ces robots peuvent muter, nous surprendre, et ne pas faire totalement ce que l’on attend d’eux
Un très beau manga, touchant, qui nous fait réfléchir sur la part d’humanité qu’on pourrait transmettre aux robots, nos rapports à l’autre et ce que l’on souhaite déléguer ou pas que ce soit au niveau professionnel ou personnel.
"Live Memorium", de Miki Makasu (scénario) et Benoît Bourget (dessin), chez Glénat
Ce thriller cyberpunk questionne notre rapport aux nouvelles technologies, mais aussi à la solitude, à la détresse affective et la frontière entre le rêve et la réalité. Quand le rêve numérique vire au cauchemar…
Célibataire mal dans sa peau, Tomasu est comptable dans une entreprise qui fabrique des poupées sexuelles. Manipulé par son patron véreux, méprisé par ses collègues, il cumule les déboires au cœur d’une gigantesque mégalopole où la solitude lui pèse. Le jour où sa mère décède, sa vie bascule. Bouleversé par ce drame et poussé par son ami Usaji, il se décide de tester le "Live Memorium", une technologie illégale qui offre à ses utilisateurs la possibilité de replonger dans leurs souvenirs d’enfance et d’agir dessus. Cette machine va permettre à Tomasu de revoir sa mère, et de modifier le cours de certains événements à l’origine de traumatismes profonds. De live en live, Tomasu va s’affirmer et renouer avec Aika, son amour de jeunesse, mais également perdre pied avec la réalité. C’est le début d’une spirale autodestructrice, où monde virtuel et monde réel ne font plus qu’un…
Avec ce titre, dans la lignée des grands seinens de SF, à mi-chemin entre Domû, rêves d’enfants et Black Mirror, Miki Makasu ne nous laisse pas indifférent. Très noir, violent, limite malsain par moment, il est parfois troublant de réalisme, notamment grâce aux dessins. À l’heure où l’intelligence artificielle prend de plus en plus de place dans notre société, ce récit interroge sur la déshumanisation, la recherche de réconfort à n’importe quel prix, et la place qu’on l’on veut donner aux technologies. Un manga d’anticipation qui pousse à la réflexion et fait froid dans le dos.
"Anzu et le royaume des ténèbres", de Mai Nguyen, chez Kinaye
Recherche d’identité, confiance en soi, deuil, harcèlement scolaire, amitié, respect des traditions, tous ces thèmes sont abordés dans ce récit sur fond de folklore japonais et qui n’est pas sans rappeler certains univers de Ghibli.
Anzu vient d’emménager dans une nouvelle ville pendant Obon, une période lors de laquelle les familles célèbrent leurs ancêtres et chérissent leurs souvenirs. Mais, depuis la mort de sa grand-mère, Obon a perdu de sa magie et Anzu n’a plus envie de la célébrer.
Tout en évitant les festivités familiales, elle fait la rencontre d’un chien égaré dans la rue. En se lançant à sa poursuite, Anzu glisse et tombe en bas d’une colline où elle perd conscience. Lorsqu’elle se réveille, elle se trouve dans le monde des enfers connu sous le nom de Yomi, un endroit dont elle a entendu parler dans les histoires de sa grand-mère...
Le chien errant, qui s’avère être le gardien de la porte de Yomi, l’avertit alors qu’elle doit rejoindre le monde des humains avant le lever du soleil, sous peine d’être prisonnière de Yomi pour toujours…
Une aventure très rythmée, prenante et qui propose plusieurs niveaux de lecture. Elle peut ainsi autant plaire à un enfant qu’à un adulte ou à un adolescent. Aux côtés d’Anzu, on découvre des esprits et des traditions grâce auxquels on plonge dans une partie de la culture japonaise. Un lexique est proposé afin de ne pas être perdu avec les termes utilisés.
"Merci, Anzu. Tu m’as aidé à me rappeler qui je suis."
À travers son récit, l’autrice met en avant l’importance des origines et des différences culturelles qu’il ne faut pas renier mais cultiver. Elle montre aussi que le fait de s’aimer soi-même et d’avoir confiance en soi permet de lutter contre beaucoup de choses et d’être plus fort. Enfin, elle aborde la mort et comment le deuil nous permet de l’accepter.
"Sword of the Demon Hunter", de Yû Satomi (scénario) et Motoo Nakanishi (dessin), chez Panini
De la chasse au démon à travers le temps façon Highlander ! Motoo Nakanishi a imaginé en 2011 le light novel qui est à l’origine de ce manga. Un roman est toujours en cours de parution (onze tomes au Japon)
Il y a près de deux siècles, vers la fin de l’ère Edo, un petit village isolé dans les montagnes est la cible régulière d’attaques de démons. Les habitants confient à Jinta, un jeune sabreur vagabond accompagné d’une étrange petite sœur, le soin de défendre la prêtresse de leur sanctuaire. Un jour, Jinta part en forêt pour chasser un démon. Il se retrouve alors face à un adversaire qui lui parle d’un lointain futur… Pour le chasseur de démons en quête de réponses, cette rencontre marque le début d’une errance à travers les âges, guidée par le fil de son épée.
Un manga captivant au trait vif.Un scénario sans temps mort qui nous réserve de nombreuses surprises dans ces deux premiers tomes, et qui promet beaucoup de rebondissements pour la suite. Le trait de Yu Satomi évolue au fur et à mesure de l’histoire et colle parfaitement au récit.
La sortie des deux premiers tomes donne un avant-goût de son adaptation en anime qui arrive cet été sur ADN.
"Dark Souls Redemption", de Julien Blondel (scénario) et Shonen (dessin), chez Mana Books
Bienvenue dans un univers de dark fantasy où le mystère et le danger se côtoient. Ce manga est inspiré du jeu vidéo Dark Souls, mais il n’est pas nécessaire de connaître la licence pour l’apprécier.
Les cendres mourantes d'un feu de camp éclairent un monde dévasté. Une femme, ramenée à la vie par une mystérieuse marque, émerge d'un profond sommeil sans aucun souvenir de son passé.
Dans cet univers méconnaissable, elle est poursuivie sans relâche par la redoutable Guilde des gardiens d'écailles. Cependant, elle se voit offrir un salut inattendu par un individu imposant qui garde farouchement le secret de son propre passé…
Le manga prend le temps de mettre l’histoire en place, mais ce n’est pas pour cela qu’on s’ennuie. Au contraire, les mystères et les moments d’action nous tiennent en haleine et nous poussent à nous interroger sur ce qui a pu se passer. Côté graphique, les dessins de Shonen sont toujours aussi beaux et nous font penser à Kentaro Miura, l’auteur de Berserk.
Comme il s’agit d’une histoire originale, les fans ne retrouveront pas ce qu’il y avait dans le jeu vidéo, même s’il y a quelques détails. Mais Julien Blondel et Shonen nous plongent dans un univers aux possibilités scénaristiques multiples et arrivent à créer leur propre aventure ayant sa propre.
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