Cet article date de plus d'onze ans.
Banksy à New York : "Le succès commercial d'un graffeur est une marque d'échec"
Depuis le 1er octobre, le plus connu des street artists dévoile chaque jour une nouvelle oeuvre dans les rues de New York dans le cadre d'un projet surprise audacieux baptisé "Better Out Than In" (Mieux vaut dehors que dedans). "Je voulais faire de l'art sans qu'y soit attachée aucune étiquette de prix", explique le mystérieux Banksy au "Village Voice", dans un de ses très rares entretiens.
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Temps de lecture : 5min
Un entretien par e-mails
L'artiste anglais, dont personne ne connait la véritable identité, cultive le mystère et se livre très rarement. Cette fois, l'artiste anglais connu pour son engagement et son humour, a choisi de s'expliquer dans le "Village Voice".
Le journal new yorkais raconte avoir reçu mi-septembre un e-mail de la part d'une personne se présentant comme un représentant de Banksy. Sans révéler les détails du projet à venir, cet agent lui promettait une interview exclusive. Cependant, afin de préserver à tout prix son anonymat, lui que ses admirateurs traquent à tous les tournants (ici de supposées photos volées de lui cette semaine), les questions n'ont pas été posées par téléphone et encore moins par skype, uniquement via des e-mails. Questions auxquelles Banksy a répondu ou pas...
A la question de savoir comment le projet "Better Out Than In" a été conçu, il répond "Il n'y a absolument aucune raison de le faire. Je sais que le street art est de plus en plus perçu comme la branche marketing d'une carrière dans l'art, alors j'ai voulu faire de l'art sans qu'y soit attachée aucune étiquette de prix. Il n'y a pas d'exposition, de livre ou de film (sous entendu à vendre). C'est sans objet. Ce qui je l'espère signifie quelque chose". "New York nous aimante comme un vieux phare"
Il raconte en revanche avoir fait des repérages à New York "il y a quelques mois" pour trouver de bons spots pour cette chasse au trésor géante, spots en or qui ont été souvent investis entre-temps. Et il admet vivre actuellement à New York où il peut "réagir aux choses".
Mais pourquoi New York ? Parce que cette ville aimante les graffeurs "comme un vieux phare sale. Nous voulons tous faire nos preuves ici", répond-il. "Je l'ai choisie pour son intense trafic piétonnier et pour ses nombreux endroits où se cacher. Je devrais peut-être être dans un lieu plus pertinent, comme Pékin ou Moscou, mais la pizza n'y est pas aussi bonne".
Certaines oeuvres du projet "sont très élaborées, d'autres seront juste un simple gribouillage sur un mur de toilettes", precise-t-il. En fait de gribouillages, les new-yorkais ont eu droit samedi dernier à un camion dans lequel avait été installé un mini-paradis avec arc-en-ciel (ci-dessus). Et dimanche (relâche ?) Banksy n'a fait que poster un habile vidéo-montage très commenté de rebelles afghans surexcités, touchant avec leurs roquettes... l'adorable éléphant Dumbo de Disney. "Les autres graffeurs me détestent"
Comment savoir à la vue d'une oeuvre s'il en est bien l'auteur ? En allant sur son site, où il poste une photo de chacune, et en cherchant le numéro noté à proximité, qui accompagne toutes ses pièces. Ce numéro correspond à un "audio guide" malicieux à écouter par téléphone et à retrouver également sur son site. "L'audio guide a démarré comme une grosse blague (...) mais je commence à y voir plus de potentiel à présent", explique l'artiste originaire de Bristol. "J'aime la façon dont cela contrôle le temps passé à regarder une image".
Alors que certaines de ses pièces ont été rapidement recouvertes de peinture, à commencer par le tout premier pochoir de la série réalisé à Chelsea, certains (dont nous sommes) l'ont soupçonné d'avoir fait lui-même disparaître ses oeuvres afin de rappeler la nature éphémère et gratuite du street art.
Interrogé à ce sujet, Banksy se défend : "Je ne dégrade pas mes propres images, non. Je pensais que les autres graffeurs me détestaient parce que j’utilisais des pochoirs, mais ils me détestent tout court." "Le succès commercial est une marque d'échec"
Dans cet échange par e-mails, cet adepte de la guérilla artistique exprime ses difficultés à concilier intégrité artistique et succès commercial (ses oeuvres valent des millions de dollars sur le marché et certaines de ses pièces sont arrachées des murs sans son autorisation pour être vendues aux enchères pour des sommes folles).
"J'ai commencé à peindre dans les rues parce que c'était le seul endroit qui voulait bien m'accueillir", dit-il. "Maintenant, je dois continuer à peindre dans les rues pour me prouver à moi-même qu'il ne s'agissait pas d'un plan cynique. En plus ça économise l'argent des toiles".
"Mais il n'y a pas à tortiller : le succès commercial est une marque d'échec pour un graffeur", tranche-t-il. "Quand le graffiti n'est pas illégal, il perd une grande part de son innocence".
L'artiste anglais, dont personne ne connait la véritable identité, cultive le mystère et se livre très rarement. Cette fois, l'artiste anglais connu pour son engagement et son humour, a choisi de s'expliquer dans le "Village Voice".
Le journal new yorkais raconte avoir reçu mi-septembre un e-mail de la part d'une personne se présentant comme un représentant de Banksy. Sans révéler les détails du projet à venir, cet agent lui promettait une interview exclusive. Cependant, afin de préserver à tout prix son anonymat, lui que ses admirateurs traquent à tous les tournants (ici de supposées photos volées de lui cette semaine), les questions n'ont pas été posées par téléphone et encore moins par skype, uniquement via des e-mails. Questions auxquelles Banksy a répondu ou pas...
A la question de savoir comment le projet "Better Out Than In" a été conçu, il répond "Il n'y a absolument aucune raison de le faire. Je sais que le street art est de plus en plus perçu comme la branche marketing d'une carrière dans l'art, alors j'ai voulu faire de l'art sans qu'y soit attachée aucune étiquette de prix. Il n'y a pas d'exposition, de livre ou de film (sous entendu à vendre). C'est sans objet. Ce qui je l'espère signifie quelque chose". "New York nous aimante comme un vieux phare"
Il raconte en revanche avoir fait des repérages à New York "il y a quelques mois" pour trouver de bons spots pour cette chasse au trésor géante, spots en or qui ont été souvent investis entre-temps. Et il admet vivre actuellement à New York où il peut "réagir aux choses".
Mais pourquoi New York ? Parce que cette ville aimante les graffeurs "comme un vieux phare sale. Nous voulons tous faire nos preuves ici", répond-il. "Je l'ai choisie pour son intense trafic piétonnier et pour ses nombreux endroits où se cacher. Je devrais peut-être être dans un lieu plus pertinent, comme Pékin ou Moscou, mais la pizza n'y est pas aussi bonne".
Certaines oeuvres du projet "sont très élaborées, d'autres seront juste un simple gribouillage sur un mur de toilettes", precise-t-il. En fait de gribouillages, les new-yorkais ont eu droit samedi dernier à un camion dans lequel avait été installé un mini-paradis avec arc-en-ciel (ci-dessus). Et dimanche (relâche ?) Banksy n'a fait que poster un habile vidéo-montage très commenté de rebelles afghans surexcités, touchant avec leurs roquettes... l'adorable éléphant Dumbo de Disney. "Les autres graffeurs me détestent"
Comment savoir à la vue d'une oeuvre s'il en est bien l'auteur ? En allant sur son site, où il poste une photo de chacune, et en cherchant le numéro noté à proximité, qui accompagne toutes ses pièces. Ce numéro correspond à un "audio guide" malicieux à écouter par téléphone et à retrouver également sur son site. "L'audio guide a démarré comme une grosse blague (...) mais je commence à y voir plus de potentiel à présent", explique l'artiste originaire de Bristol. "J'aime la façon dont cela contrôle le temps passé à regarder une image".
Alors que certaines de ses pièces ont été rapidement recouvertes de peinture, à commencer par le tout premier pochoir de la série réalisé à Chelsea, certains (dont nous sommes) l'ont soupçonné d'avoir fait lui-même disparaître ses oeuvres afin de rappeler la nature éphémère et gratuite du street art.
Interrogé à ce sujet, Banksy se défend : "Je ne dégrade pas mes propres images, non. Je pensais que les autres graffeurs me détestaient parce que j’utilisais des pochoirs, mais ils me détestent tout court." "Le succès commercial est une marque d'échec"
Dans cet échange par e-mails, cet adepte de la guérilla artistique exprime ses difficultés à concilier intégrité artistique et succès commercial (ses oeuvres valent des millions de dollars sur le marché et certaines de ses pièces sont arrachées des murs sans son autorisation pour être vendues aux enchères pour des sommes folles).
"J'ai commencé à peindre dans les rues parce que c'était le seul endroit qui voulait bien m'accueillir", dit-il. "Maintenant, je dois continuer à peindre dans les rues pour me prouver à moi-même qu'il ne s'agissait pas d'un plan cynique. En plus ça économise l'argent des toiles".
"Mais il n'y a pas à tortiller : le succès commercial est une marque d'échec pour un graffeur", tranche-t-il. "Quand le graffiti n'est pas illégal, il perd une grande part de son innocence".
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