"Napoléon" d'Abel Gance : les inédits du tournage d'un mythe à Ajaccio
Avril 1925. Le réalisateur Abel Gance s'installe à Ajaccio durant deux mois pour le tournage de son "Napoléon". Un film d'anthologie, le seul à évoquer l'enfance et la jeunesse du futur Empereur, réalisé avec de nombreux figurants locaux.
Le musée national de la Maison Bonaparte revient sur cette aventure cinématographique a vec l'exposition "Napoléon vu par Abel Gance - La séquence Corse".
Reportage : Marie Christiani, Marion Fiamma et André Girardin
Le film qui panse les plaies de la Corse
Un tournage sur le petit caporal dans les rues d’Ajaccio pendant deux mois en 1925, l’évènement est vécu comme une aubaine par les Corses. Sept ans après la Première Guerre mondiale qui a vu beaucoup d’hommes partir au combat, l’épopée est d'une telle ampleur qu'elle marque la mémoire collective ajaccienne.Lorsqu’il arrive sur l’île, la Corse est exsangue. La Guerre de 14-18 lui a fait perdre beaucoup d’hommes et là il y a ce tournage énorme sur le sujet "Napoléon". Il fallait la passion et la fascination de la population ajaccienne, les rues sont constamment pleines, c'est un événement pour la population ajaccienne
Jean-Marc Olivesi -Conservateur Musée National - Maison BonaparteDes moyens de production pharaoniques
Au travers de l’exposition de la maison Bonaparte, les documents et photos dévoilent également des moyens techniques, humains et financiers dont disposait Abel Gance. Pour tourner ces scènes corses, le réalisateur embauche des figurants sur place, qu'il payait 25 francs la journée. Un salaire tout à fait convenable pour l'époque.Il faut imaginer ce genre de tournage à l'époque. C'est Spielberg ou Coppola venant touner à Ajaccio avec des moyens énomes, 15 millions de Francs de l'époque !
Le cinéaste français était subjugué par l’image iconique de Napoléon. Avec son film, il voulait rendre hommage à la grandeur de l’Empereur. Il avait d’ailleurs, dans un premier temps, envisagé de réaliser six films sur son règne. Mais faute de moyens, Gance abandonne ce projet pharaonique. Un seul film sortira en 1927, tourné en 1925 et 1926. Il réalisera une sorte de suite des années plus tard, intitulée "Austerlitz", sortie en 1960.
A la rencontre des bandits corses
Bien que doublés dans les scènes périlleuses, les acteurs Albert Dieudonné et Acho Chakatouny furent victimes d’accidents et durent prendre du repos. Ce fut l’occasion pour Pierre Bonardi d’entraîner Dieudonné et Gance dans le maquis afin de leur présenter son ami d’enfance, le bandit Romanetti.
Chef-d’œuvre du cinéma, acclamé lors de sa création, oublié vingt ans après, on ne dénombre pas moins de 22 versions du "Napoléon" et cinq restaurations argentiques qui se sont étalées de 1953 à 2000, situation unique dans l’histoire du cinéma.
En attendant la restauration
Après six années de travaux préparatoires, La Cinémathèque française est en mesure d’entreprendre la première restauration numérique de ce film légendaire. Les travaux seront réalisés sous la direction du réalisateur et chercheur Georges Mourier, avec le soutien du CNC, au Laboratoire Éclair.
Francis Ford Coppola (American Zoetrope) et Robert A. Harris (The Film Preserve Ltd.), détenteurs des droits monde du film d’Abel Gance, se sont associés à ce projet de restauration avec la Cinémathèque française qui, elle, détient les droits pour la France et pour certains pays francophones.
Le réalisateur d'"Apocalypse Now" évoque sa passion "hors normes" pour l'œuvre majeure d'Abel Gance, son père Carmine Ford Coppola ayant signé une partition musicale originale qui accompagne le film.
Quand j’ai vu Napoléon pour la première fois, j’ai ressenti un choc comparable à celui que j’ai eu en voyant "Octobre" de Sergueï Eisenstein, j’ai eu le sentiment qu’ils inventaient littéralement un art, qu’ils en étaient les pionniers.
Francis Ford Coppola
Le film restauré pourrait être présenté à Ajaccio par le cinéaste en 2017.
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