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L'Orient et ses jardins à l'Institut du monde arabe

Orangers, roses, oliviers ou jasmin, le parvis de l’Institut du monde arabe minéral est couvert de plantes pour quelques mois, à l’occasion d’une exposition qui nous raconte l’histoire des jardins orientaux et nous y fait voyager, des oasis aux derniers parcs modernes (jusqu’au 25 septembre 2016).
Article rédigé par Valérie Oddos
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un jardin pousse sur le parvis de l'Institut du monde arabe jusqu'à fin septembre
 (photo Valérie Oddos / Culturebox / France Télévisions)

Jardins clos de l’Andalus, jardins persans, riyadhs marocains, les jardins orientaux sont évoqués à l’Institut du monde arabe (IMA) à travers 300 pièces : photos anciennes et contemporaines, miniatures persanes, maquettes, tapis ou fontaines, œuvres d’art contemporain.
 
Au départ est l’oasis, îlot de verdure bordée de palmiers dans l’aridité de la Mésopotamie. Une belle tapisserie contemporaine égyptienne d’Ali Selim, inspirée des tapisseries populaires, en raconte le foisonnement d’animaux et de gens. Dès la fin des années 1850, dans une photo fantastique, Gustave de Beaucorps resitue l’oasis lointaine prise au ras du sol dans les cailloux du désert.
 
Plus près de nous, dans une photo de l’artiste émiratie Lateefa Bint Maktoum ("Observers of Change I", 2011), des palmiers étêtés et desséchés au milieu des sables évoquent les récentes transformations du paysage dans la région du Golfe.

Lateefa Bint Maktoum, "Observers of Change I" 2011, Artwork Courtesy of Barjeel Art Foundation, Sharjah
 (Image courtesy of Barjeel Art Foundation, Sharjah)


De l’eau coule dans un jardin clos

Rare dans un environnement aride, l’eau est essentielle dans les jardins orientaux, qu’ils soient d’agrément ou destinés à l’agriculture. Des photos des norias (grandes roues qui pompent dans le fleuve) de Hama en Syrie, d’un peigne répartiteur entre des canaux en Algérie ou un petit film de 1904 sur une enfant montée sur la bascule d’un chadouf qui permet de puiser l’eau, un traité hydraulique syrien du 14e siècle… tous ces documents racontent l’inventivité des procédés millénaires imaginés pour la recueillir ou l’acheminer.

Reportage B.Lopez, A. Nataliz, N. Ngoc
 
Dans la ville, le jardin est clos, caché des regards. En partie hérité des Romains, il s’est développé à Damas et, avec la conquête arabe il s’est installé à l’Est comme à l’Ouest, donnant naissance au riyadh marocain ou au patio andalou. Le jardin oriental puise aussi ses influences dans le jardin persan classique né au VI et VIIe siècle avant J-C. Un jardin tout en lignes droites où des canaux mènent à des bassins ornés de fontaines. Un magnifique tapis persan du XVIIIe représente un de ces jardins, découpé en carrés avec un bassin au milieu et des arbres tout autour.
"Radha et Krishna sur un bateau", Rajasthan, vers 1860, Nasser D. Khalili Collection of Islamic Art
 (Nour Foundation. Courtesy of the Khalili Family Trust)

Une allée des fontaines

Dans l’exposition, sur une "allée des fontaines" simulant un bassin tout en longueur, ont été posées une séries de ces fontaines fabuleuses, en forme de lion (Espagne, XIVe siècle) ou de plaque géométrique (Inde moghole, XIXe).
 
Le modèle a essaimé jusqu’à Kaboul, où Bâbur, le premier empereur moghol, a imaginé au XVIe siècle un parc fabuleux, récemment restauré : une photo en plongée de Simon Norfolk (2013) nous montre une grande tache de verdure au milieu des montagnes austères.
Le jardin oriental est un paradis qui doit flatter tous les sens : le mot vient de l’ancien persan "paridaeza" qui désignait un enclos de chasse plein d’arbres et de fleurs. Ilot de calme, d’ombre et de fraîcheur dans le tumulte de la ville, on peut y entendre le murmure de l’eau et le chant des oiseaux, y sentir le parfum de la rose de Damas ou de la fleur d’oranger.
 
Oiseaux empaillés, gazouillis, livres de pharmacopée, instruments de musique nous évoquent ces paradis qui sont aussi des lieux de pouvoir pour des princes qui y organisent des réceptions afin d’impressionner leurs invités.
Gabriel Veyre, "Autoportrait à Casablanca en 1908", autochrome, Fondation Gabriel Veyre
 (Fondation Gabriel Veyre)


Miniatures persanes et "maxiature" contemporaine

En clin d’œil aux miniatures persanes qui décrivent cet univers, l’artiste contemporaine iranienne Soody Sharifi a imaginé des "maxiatures" ("Lovers picknicking", 2011) qui en reprennent les codes mais introduisent un jardin suspendu où des couples se cachent, au-dessus d’un paysage moderne d’autoroutes.
 
L’exposition aborde aussi la fascination qu’a exercée sur l’Occident le jardin : diffusion des plantes en Europe, jardins coloniaux et montre, à travers des films, différents projets de parcs contemporains, au Caire ou à Mascate (Oman).
Soody Sharifi "Lovers Picknicking", 2011
 (Courtesy of the artist Soddy Sharifi and Leila Heller Gallery Family Trust)


Un jardin sur le parvis

L’été sera doux sur le parvis de l’IMA. Le jardin éphémère que Michel Péna y a est librement inspiré de ces jardins orientaux, pour le régal des yeux. Planté de cyprès, d’oliviers, de figuiers ou de palmiers, il est orné de roses ou d’œillets, sans oublier les herbes : laurier, menthe, thym. Il respecte un dessin géométrique, une cascade et un bassin le traversent.  Au total, 10.000 plantes de 120 variétés, dont 1500 rosiers, couvrent 2000 m2 et devraient aussi ravir l’odorat de leur parfum.
 
Depuis une passerelle qui longe le parvis, on voit des plateaux couverts de plantes qui par un phénomène d’anamorphose prennent la forme d’une étoile géométrique créée par François Abélanet. Et au milieu une buvette pour se rafraîchir.
1500 rosiers installés sur le parvis de l'Institut du monde arabe
 (photo Valérie Oddos / Culturebox / France Télévisions)
    

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