L'or des Incas scintille au coeur d'une grande exposition en Allemagne
Reportage : C. Gomond / S. Rock / T. Maginot
Située tout près de la France, à une quinzaine de kilomètres de Forbach, en Moselle, la Völklinger Hütte est une ancienne aciérie allemande classée au patrimoine mondial de l'Unesco et reconvertie en Centre européen d'art et de culture industrielle. En 2004, elle avait déjà accueilli une exposition sur la civilisation Inca.
220 objets d'exception
Elle récidive cette année en présentant 220 objets d'exception issus principalement du musée Larco de Lima, au Pérou, qui abrite la plus grande collection privée d'art précolombien au monde. Certaines pièces viennent également de musées français : le Musée des Jacobins d'Auch, dans le Gers, qui détient une très importante collection d'art précolombien et le Musée de l'Armée, à Paris, qui a prêté des armes espagnoles et des pièces de sellerie du temps des conquistadors.
La sueur du Soleil
Considéré comme "la sueur du Soleil" par les Incas, l'or était étroitement associé au rituel religieux. Fruit de l'astre solaire, divinité suprême de leur panthéon, il avait une véritable valeur sacrée. Au coeur du rite religieux, le métal jaune était utilisé pour recouvrir des statues, de la vaisselle et une foule d'autres objets dédiés à la vénération du dieu Soleil.
Incarnation humaine du dieu Soleil, le roi Inca était couvert d'or de la tête aux pieds. Chez les classes aisées et parmi les hauts dignitaires, l'or était partout et sous toutes les formes : colliers, couronne, boucles d'oreilles, diadèmes... Il était symbole de pouvoir, du temps de leur vivant mais aussi de leur mort car les défunts étaient enterrés avec tous leurs objets. L'argent, lui, était associé à la divinité lunaire.
Héritier de 3000 ans de civilisation, l'empire Inca s'étendait à son apogée de la Colombie jusqu'à l'Argentine et au Chili, par-delà l'Equateur, le Pérou et la Bolivie. Le dernier empereur Inca, Atahualpa, régnait sur un territoire de 4 millions de km2 et de 15 millions de sujets. Cette brillante civilisation s'est éteinte à l'arrivée des conquistadors espagnols au Pérou menés par Francisco Pizzarro. Ces derniers ont pillé tout l'or des Incas et fondu les objets d'art pour les rapporter en Espagne.
Pour eux, l'or était synonyme de richesse et avait une valeur marchande. Pour avoir la vie sauve, Atahualpa versa à Pizzarro une fabuleuse rançon en or et en argent. Entre 1532 et 1540, au moins 180 tonnes d'or et 16 800 tonnes d'argent ont traversé l'Atlantique en direction de l'Europe. Ces innombrables richesses incas firent la fortune de l'Espagne au XVIe siècle.
Deux conceptions opposées de l'or
Le point de départ de l'exposition est le conflit entre ces deux conceptions totalement différentes de l'or. "Pour les Espagnols, l'or signifiait la richesse et posséder plus d'argent" explique Meinrad Maria Grewenig, le directeur de la Völklinger Hütte. "Pour les Incas et dans la période qui a précédé, l'or était l'expression des dieux et le métal en argent l'expression de la lune. Un principe de dualité régnait : homme et femme, jour et nuit, soleil et lune. Et dans ce contexte, l'or, l'argent et le cuivre avaient une signification différente dans le monde".
Aujourd'hui encore, l'or des Incas exerce toujours la même fascination. En 1536, l'empereur Manco Capac II, mis en place par les Espagnols pour remplacer son frère Atahualpa, décida de se rebeller. Il collecta tout ce que les conquistadors n'avaient pas encore volé et fonda une cité-refuge, quelque part en Amazonie. Un Eldorado qui n'a à ce jour jamais été retrouvé mais qui alimente depuis des siècles les espoirs des aventuriers. En 1911, l'archéologue américain Hiram Bingham se rendit à Cuzco et tenta de reconstituer le chemin parcouru par Manco Capac II dans sa fuite. Il n'a jamais découvert le fameux trésor des Incas mais il a exhumé une autre merveille : le Macchu Picchu.
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