Cet article date de plus de sept ans.

François Ier aimait aussi les artistes des Pays-Bas : exposition au Louvre

On connaissait le goût pour l'art italien de François Ier, qui avait confié la décoration du château de Fontainebleau à des peintres transalpins. Une grande exposition au Louvre montre que les artistes venus du nord restaient très présents en France pendant son règne, réalisant de nombreux portraits et aussi des vitraux, des tapisseries et des tableaux religieux (du 18 octobre au 15 janvier).
Article rédigé par Valérie Oddos
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
A gauche, Jean Clouet, "Portrait équestre de François Ier", musée du Louvre - A droite Grégoire Guérard, "Saint-Quentin, la Déploration du Christ", Lille, DRAC, Hauts-de-France
 (A gauche © RMN-Grand Palais (musée du Louvre)_Michel Urtado - A droite © Musée du Louvre / Antoine Mongodin)

Cela fait peu de temps qu'on s'intéresse à la place de l'art venu du nord en France au XVIe siècle, une époque qu'on sait marquée par les artistes italiens. Et pourtant, "les artistes venus du nord ont été très importants pour le développement de l'art français", souligne Cécile Scailliérez, la commissaire de l'exposition du Louvre, qui a voulu rendre compte de cinquante ans de recherches sur la question. L'art du nord, c'est celui qui vient des régions de l'actuelle Belgique et des actuels Pays-Bas, mais aussi du nord de la France. Il n'y avait pas vraiment de frontières historiques et les artistes circulaient beaucoup entre ces régions et la France.

Jean Clouet, "François Ier, roi de France", département des peintures, musée du Louvre
 (RMN - Grand Palais  (Musée du Louvre)_Michel Urtado)

Tous les panneaux de Jean Clouet rassemblés au Louvre

Il y a les portraitistes comme Jean Clouet, qu'on aurait tendance à croire français : même s'il a fait sa carrière à Tours et à Paris, et s'il a été le portraitiste officiel du roi, il est sans doute né à Valenciennes dans la province du Hainaut, qui fait à l'époque partie de l'empire des Habsbourg, et il n'a jamais eu la nationalité française. L'exposition rassemble la totalité des tableaux connus de sa main, soit une dizaine : les portraits de François Ier, bien sûr, celui où il est sur son cheval, un portrait d'apparat et un saint Jean-Baptiste à qui il a donné les traits du souverain. Un très beau portrait du jeune dauphin François (conservé à Anvers) rend merveilleusement la douceur de sa peau et la texture du velours rouge de son vêtement et de la fourrure de son chapeau.
 
On a les somptueux portraits royaux de Joos van Cleve, peintre flamand qui a vécu à Anvers et qui a travaillé un temps à la cour de François Ier où il a peint le roi et son épouse Eléonore de Habsbourg.
Corneille de Lyon, à gauche portrait de Pierre Aymeric, à droite portrait de Béatrice Pacheco, comtesse d'Entremont
 (A gauche © RMN-Grand Palais (musée du Louvre)_Stéphane Maréchalle - A droite © RMN-Grand Palais (Château de Versailles)_Philippe Bernard)


Les puissants portraits de Corneille de Lyon

Une des merveilles de l'exposition est une série d'une vingtaine de portraits de Corneille de Lyon, artiste établi dans la cité rhodanienne, né au début du siècle à La Haye, peintre de la reine puis peintre du roi et dont le style a fait école.
 
Le portrait de Pierre Aymeric, marchand de Saint-Flour et consul de Lyon (musée du Louvre), est présenté au centre d'une salle entièrement consacrée à Corneille. Car c'est le seul dont on sait assurément qu'il est de sa main, grâce à une inscription au revers. Il a servi à identifier les autres portraits qu'on lui attribue : de sobres petites peintures sur bois au fond uni, vert, bleu, brun. Les visages sont remarquables de présence, de vivacité, d'intensité.
 
François Ier faisait acheter aussi avec enthousiasme des tapisseries et pièces d'orfèvrerie venues du nord : on a une idée de l'ampleur de sa collection grâce à des documents, mais l'essentiel en a été détruit au moment de la Révolution. Quelques vestiges subsistent comme une tapisserie, conservée à Madrid, d'après Jérôme Bosch.
Entourage de Pierre Bellemare, "Déposition de croix", Anvers, Chouzet-sur-Loire, Mairie
 (François Lauginie/DRAC Centre-Val de Loire)


Le maniérisme du maître d'Amiens et de Noël Bellemare

Des influences viennent d'Anvers, dont le maniérisme (style caractérisé par l'allongement des corps, les couleurs acides, les gestes théâtraux) est à la mode : une des figures marquantes est Noël Bellemare, dont l'œuvre a été complètement redécouverte depuis trente ans : on ne connaissait son nom que par une archive de 1532 le désignant comme le cartonnier du vitrail de la Pentecôte de l'église parisienne Saint-Germain-l'Auxerrois. Ces dernières années, on a pu lui attribuer des vitraux, des enluminures et quelques peintures dont le magnifique "Retable de la Passion" de l'église Saint-Gervais-Saint-Protais en neuf scènes.
 
Autre figure du maniérisme nordique, le dit maître d'Amiens a peint des tableaux religieux extraordinaires de densité, saturés de personnages aux poses élégantes comme sa peinture pour la cathédrale d'Amiens ("Au juste poids véritable balance").
 
Un autre courant s'épanouit en Bourgogne et en Champagne, avec des peintres venus de plus loin au nord (Amsterdam, Haarlem, Utrecht…) mais marqués par des voyages en Italie : Grégoire Guérard qui peint lui aussi de magnifiques vitraux, ou le maître de Dinteville, identifié comme Bartholomeus Pons, qui a réalisé cet étonnant tableau de "Trois hommes descendant des tonneaux dans une cave".
 
Tout un pan de la Renaissance française est à découvrir ou voir sous un angle nouveau au Louvre dans cette exposition qui passionnera les spécialistes et ravira aussi, par la beauté des œuvres, un public moins averti.
Maitre de Dinteville (Bartholomeus Pons), "Trois hommes descendant des tonneaux dans une cave"
 (Städel Museum - U. Edelmann - ARTOTHEK)

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.