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Comment sont définis les prix des œuvres d’art vendues aux enchères ?

Des chefs-d’œuvre de la peinture, des planches de BD, des voitures Ferrari… Mis aux enchères, ces objets peuvent être vendus à des dizaines de millions, voire des centaines de millions d’euros. Un commissaire-priseur nous explique comment il est possible d’atteindre ces sommes.
Article rédigé par franceinfo - Aurore Richard
Radio France
Publié
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Une vente aux enchères d'œuvres appartenant à Alain Delon, organisée à Paris chez Bonhams Cornette de Saint-Cyr le 22 juin 2023. (LP/OLIVIER LEJEUNE / MAXPPP)

Femme à la montre de Picasso a été vendu aux enchères, jeudi 9 novembre, à plus de 139 millions de dollars. Le lendemain, le chef d’œuvre de Claude Monet, Le bassin aux nymphéas, a lui été adjugé à 74 millions de dollars. Aux enchères, les prix d’objets d’art sont parfois faramineux. Comment expliquer cela ? Quels sont les critères ? Décryptage avec Jean-Pierre Osenat, commissaire-priseur et président de la maison de ventes aux enchères Osenat, notamment installée à Versailles, dans les Yvelines. Il est aussi président du Syndicat national des maisons de ventes volontaires (SYMEV).

Un prix de départ établi à partir de la cote de l’artiste

"La cote d’un tableau, par exemple, dépend du ou des prix obtenus par des tableaux du même artiste dans différentes ventes publiques", explique Jean-Pierre Osenat. Les ventes publiques sont transparentes, ce qui veut dire que les prix obtenus, en France comme à l’étranger, sont publiés et connus de tous. "Quand un tableau arrive, on a donc déjà des éléments d’estimation. On ne part pas de rien pour ensuite, nous, l’estimer", poursuit-il.

Il faut aussi prendre en compte que la cote d’un artiste, et donc que le prix de ses tableaux sont liés à "la période de création". "Les vrais artistes sont des personnes qui sont reliées directement par le doigt, comme le tableau de Michel-Ange, avec l'universel, avec le ciel, estime le commissaire-priseur. À un moment donné, ils ressentent une inspiration universelle qui leur fait faire des chefs-d'œuvre et souvent, cette inspiration ne va pas durer toute leur vie".

"Ils vont créer des chefs-d'œuvre et puis, dix ans après, cette lumière sera éteinte."

Jean-Pierre Osenat, commissaire-priseur

à franceinfo

Jean-Pierre Osenat cite pour exemple Derain et Vlaminck dont les peintures réalisées pendant la période fauve peuvent valoir des millions d’euros alors que les œuvres qu’ils ont créées dix ans après ne sont estimées qu’à des dizaines ou des centaines de milliers d’euros.

Ces critères peuvent s’appliquer, d’une certaine façon, aux autres objets mis aux enchères. "Les artistes ont des cotes, les meubles ont des cotes, les objets d’art, tout", souligne le président de la maison Osenat. Cela vaut par exemple pour la bouteille de whisky mise aux enchères par Sotheby’s à Londres, samedi 18 novembre, et considérée comme "la plus chère du monde". C’est une bouteille de Macallan vieille de 97 ans dont le prix est estimé aux environs d’1,5 million d’euros. Le même modèle avait été vendu en 2019 à près d’1,7 million d’euros, ce qui constitue donc un élément d’estimation pour cette nouvelle vente. Ce prix peut s’expliquer par l’ancienneté et la rareté de ce millésime de Macallan, dont il n’existe que 40 bouteilles. Même chose pour cette Ferrari adjugée le 13 novembre à 51,7 millions de dollars. La même voiture, une Ferrari de 250 GTO de 1962, était partie en 2018 à 48,4 millions de dollars, sachant que seulement un peu plus de 36 000 GTO ont été produites.

Mais le prix de vente réel peut être très différent de l’estimation de départ

Les prix peuvent s’envoler et c’est la loi de l’offre et de la demande, selon Jean-Pierre Osenat. "Si le tableau de Picasso Femme à la montre est parti à 139 millions de dollars, c’est parce qu'il y avait déjà eu des offres à 138 millions", assure-t-il. Le commissaire-priseur reconnaît que l’on peut se demander s’il n’y a pas aussi "un peu de spéculation dans tout cela".

Pour lui, si les prix de vente peuvent monter aussi haut, c’est avant tout parce que les acheteurs recherchent "le meilleur". "Quand vous avez déjà tout, peut-être que vous voulez, dans quelque domaine que ce soit, avoir ce qu’il y a de mieux, la crème de la crème", note-t-il. Le commissaire-priseur va par exemple diriger des enchères dimanche 19 novembre où un chapeau de Napoléon sera mis en vente. "Combien va-t-il faire ?, s’interroge Jean-Pierre Osenat. Qu'est-ce que ça veut dire la valeur d'un chapeau de Napoléon ? Car c’est un bout de feutre noir, mais qui représente l’histoire de France, l'épopée de Napoléon. Et quand on est collectionneur de souvenirs historiques, notamment napoléoniens, qu’est-ce-qu’on peut avoir de mieux ?" Il est estimé entre 600 000 et 800 000 euros, sachant qu’un autre bicorne de Napoléon a déjà été acheté 1,8 million d’euros en 2014.

"Les personnes qui achètent ce type de produit sont des personnes qui ont des fortunes considérables. Et je trouve formidable que ces gens-là consacrent une partie de leur fortune à défendre le marché de l’art. C’est une chance", analyse le président du SYMEV. Il rappelle dans le même temps que les commissaires-priseurs font des milliers de ventes par jour et le prix moyen d’un objet vendu aux enchères s’établit entre 20 et 30 euros.

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