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Biennale de Lyon : ouvrir ses yeux, ses oreilles et faire 30 kilomètres

Quand une ville se transforme en une gigantesque et formidable galerie d'art... C'est à Lyon que ça se passe : la 13e Biennale d'art contemporain. 60 artistes à découvrir dans quatre lieux d'exposition. Des artistes qui s'interrogent sur "la vie moderne", le thème choisi cette année.
Article rédigé par Anne Lamotte
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Les oeuvres d'Anish Kapoor sont exposées au couvent de la Tourette, à Eveux © MaxPPP)

La vie moderne selon la Biennale de Lyon... Sur place, le reportage d'Anne Lamotte. Avec Jules Lavie
La vie moderne, ou comment évoquer le moment présent et le souvenir d'un autre âge. En tout cas les artistes "nous invitent à repenser notre rapport au temps",  explique Thierry Raspail, le directeur artistique de la Biennale de Lyon. Et ça peut, pourquoi pas, se faire avec des noyaux de cerise. A la Sucrière, une ancienne usine de sucre, où se tient la principale exposition, impossible pour le visiteur de ne pas remarquer l'installation de Céleste Boursier-Mougenot : une batterie et des noyaux de cerise qui tombent régulièrement sur les peaux et les cymbales de l'instrument. "Il y a là un détecteur de champ magnétique", explique l'artiste ; "les noyaux sont lâchés du plafond en fonction de l'activité des téléphones portables dans le lieu de l'exposition" . Ainsi la batterie se met à jouer de manière aléatoire. Comme une horloge qui tinte quand elle veut et qui nous rappelle sans cesse que le temps passe. Et qu'on a peut-être reçu aussi un tas de SMS.

Une installation qui pourrait facilement déconcentrer. Les noyaux et leur boucan pouvant gêner l'attention du visiteur. Mais on finit par s'y faire et on continue la balade vers un tas de carton et de polystyrène. A priori nous avons là une cabane de sans-abri. "Please touch" nous invite l'artiste grec Andreas Lolis. Alors on touche. C'est dur, c'est froid. Ca a l’air lourd. C'est du marbre. Sa volonté: construire un "monument " symbole de la crise qui ravage son pays. "Avec ce matériau si précieux, si noble, avec lequel on a fait tant de belles et grandes choses" , explique-t-il, "j'ai voulu rendre hommage aux gens qui ont tout perdu et qui dorment sous les ponts".

Mais la vie moderne c’est aussi "Le musée de la triche" de Julien Prévieux, les pneus déchirés de Mike Nelson, le film d'animation façon vieux jeu vidéo de David Shrigley, les cicatrices au sol de Kadder Attia, les animaux de Daniel Naudé... A la Biennale il faut déambuler et se perdre. "Si l'on n'est pas perdu, on ne peut pas faire de découvertes", dixit Ralph Rugoff, le commissaire de cette 13ème Biennale.

Anish Kapoor au couvent

Prendre sa voiture et faire trente kilomètres au nord-ouest de Lyon, dans la campagne, jusqu’au couvent de la Tourette. Un chef d’œuvre de béton et de lumière signé Le Corbusier à la fin des années cinquante. C’est là qu’Anish Kapoor expose. L’artiste britannique, dont on a tant parlé ces derniers jours après les actes de vandalisme – notamment des insultes antisémites - sur sa sculpture à Versailles, présente 13 de ses œuvres.

On les trouve dans l’église, le réfectoire, la salle du chapitre, les couloirs... Notamment une série de sculptures en acier brossé qui reflètent en les déformant les murs et les fenêtres interminables de Le Corbusier. Un dialogue entre le travail des deux artistes dont s’enthousiasme le frère Marc Chauveau. Frère Marc habite au couvent mais c’est aussi le commissaire de cette exposition, et c’est lui, ce passionné d’art, qui a tout fait pour qu’Anish Kapoor expose au couvent. "Hier pour la messe 80 personnes étaient dans les stalles, et l’œuvre de Kapoor était là, devant elles. On vit dans ce couvent, on mange au réfectoire, on prie à l’église et les œuvres sont complètement à leur place. Ce n’est plus une exposition et c’est ça qui est extraordinaire".  

Et quand on demande à frère Marc s’il a peur que ces sculptures-là soient à leur tour souillées : "Non et nous sommes absolument ravis d’accueillir l’artiste. Vous savez, Le Corbusier expliquait qu’il avait construit ce couvent avec une intention : offrir aux hommes ce dont ils ont le plus besoin, le silence et la paix". Si ce n’est pas ça la vie moderne...

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