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"I may destroy you", une mini-série glaçante et engagée sur le viol et le consentement

Diffusée depuis peu sur la plateforme de streaming OCS, "I may destroy you" raconte la reconstruction chaotique d'une jeune britannique victime de viol.

Article rédigé par franceinfo Culture - Mélisande Queïnnec
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3 min
Michaela Coel, qu'on avait vue dans "Chewing Gum" ou "Black Mirror" sur Netflix, interprète Arabella, une jeune écrivaine victime de viol. (HBO)

Les grandes lignes sont posées dès le pilote. Des couleurs bigarrées, aveuglantes, le verre de trop, une chute, une blessure au front et un téléphone cassé. Et les jours qui suivent, une volonté de mettre des mots sur un ressenti. Ecrivaine en devenir, Arabella (Michaela Coel, également réalisatrice, auteure et productrice de la série) a été agressée sexuellement dans une boîte de nuit. Au fil des épisodes, par flashs, elle comprend et tente de se reconstruire. Commence alors une longue introspection.

Produite par HBO et la BBC, I may destroy you ("je pourrais te détruire") brise quelques tabous et aborde avec brio le sujet très sensible du viol. Une nouvelle production - à déconseiller aux plus jeunes - qui risque de faire parler d'elle.

Un long chemin vers la reconstruction

C'était dans une boîte de nuit. Cela aurait pu se passer n'importe où ailleurs. Perruque rose poudré sur la tête et look branché, Arabella, auteure insouciante d'un écrit acclamé sur le web, part danser avec ses amis. Le lendemain, elle doit rendre sa première production à son éditeur. Mais pendant la soirée, elle est droguée et violée par un anonyme. Et cette agression, elle ne s'en souvient pas de prime abord. Ce n'est que plus tard qu'elle fait le lien entre ses blessures, son black-out et cet homme, dont le visage lui revient par bribes.

L'actrice est également productrice, réalisatrice et auteure de cette nouvelle série. (HBO)

Suivent les examens médicaux, les interrogations et les remises en question. La peur, qui fera désormais partie de sa vie. La tentative d'Arabella de renouer avec sa vie d'avant, une vie rythmée par les premiers jets envoyés à son éditeur, la drogue, l'alcool et les fêtes. Sa volonté d'oublier et de se dissocier de son traumatisme. "Tout va bien". C'est ce qu'elle affirme à ses proches et ce dont elle tente de se convaincre. Même si sa reconstruction ne fait que commencer...

Elle l'avait révélé en 2018 : Michaela Coel a elle-même vécu ce traumatisme. C'est sans doute ce qui rend la série si réaliste : tout est observé depuis le point de vue de la victime, Arabella. Les douze épisodes peuvent parfois manquer de rythme ou sembler confus. Mais les expériences variées des amis d'Arabella, qui s'ajoutent au fil conducteur de la série, permettent tout de même d'offrir une réflexion percutante sur le consentement. 

Des personnages d'une grande complexité

Récompensée par un BAFTA pour sa série Chewing-Gum diffusée sur Netflix, Michaela Coel est naturelle et émouvante dans le rôle d'Arabella et s'impose ainsi comme une artiste à suivre. Elle s'entoure notamment de Weruche Opia (Bad Education) dans le rôle de Terry, le meilleur ami de l'héroïne, Paapa Essiedu (Le Crime de l’Orient-Express) dans celui de Kwame, son autre meilleur ami et Aml Ameen (Sense8) qui campe Simon, également proche de la protagoniste.

Michaela Coel (Arabella) et Weruche Opia (Terry). (HBO)

"La série explore différents thèmes : l'amour, le sexe, les responsabilités, l'amitié, ce que la société perçoit comme des tabous - avec beaucoup de nuances", confiait il y a quelques jours Aml Asheen à la BBC. "C'est aussi la première fois que je vois des personnages britanniques Noirs si étoffés, qui mettent en relief la variété de nos expériences. J'admire beaucoup cela." Pour une fois, des personnages Noirs - non stéréotypés - tiennent ainsi les premiers rôles. Michaela Coel les représente dans toute leur complexité, s'attardant sur chacun au fil des épisodes. 

Une avancée bienvenue alors que la question du racisme dans le paysage audiovisuel est de plus en plus présente... et une autre qualité qui fait d'I may destroy you une série à visionner cette année. "Michaela [...] n'écrit pas pour être drôle [la série contient quelques moments comiques, ndlr], elle dépeint la réalité", résumait Paapa Essiedu à la BBC. Parfaitement écrits et filmés, servis par un jeu d'acteur d'une grande justesse, les douze épisodes de trente minutes ne peuvent, en tout cas, laisser indifférent.

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