En Guadeloupe, le carnaval autorisé in extremis se poursuit en demi-teinte
Les rues de Basse-Terre, chef-lieu de la Guadeloupe, ont renoué lors du Mardi gras avec "la grande parade", apothéose du carnaval de l'île. Annulé en 2021 pour cause d'épidémie de Covid-19, elle a été autorisée tardivement cette année.
"C'est une vraie libération pour tout le monde : durant le carnaval on se lâche totalement et en Guadeloupe, on en a besoin, tout va mal", assène Raymonde. La sexagénaire, inconditionnelle du Mardi gras, profite de la "grande parade" dans les rues de Basse-Terre. Elle embrasse d'un regard heureux toutes les installations mises en place pour accueillir l'événement retransmis en direct à la télé, la radio et sur les réseaux sociaux des chaînes locales.
"Un demi-carnaval mais un carnaval quand même"
"Le carnaval, c'est notre ADN, on s'y dépense mentalement, physiquement et puis on est tous égaux derrière le masque", raconte Danielle, carnavalière "depuis 1982". Aujourd'hui retraitée, elle explique que, lorsqu'elle était encore enseignante, elle ne donnait "jamais" de contrôle à ses élèves les lundis matin pendant la période du carnaval, de l'Epiphanie au mercredi des Cendres.
"Ce carnaval est un demi-carnaval", soupire Danielle, "mais enfin c'est un carnaval quand même !" Car cette année, tout est différent. L'île craignait une nouvelle annulation à cause de la pandémie mais l'événement a été autorisé in extremis et sous condition par la préfecture. "Il faudra instaurer une bulle sanitaire : les carnavaliers sont invités à se tester avant le départ des groupes, et le public doit porter un masque, même si l'épidémie décroit", avait indiqué le sous-préfet devant la presse.
Si le port du masque est très peu respecté par le public, c'est un "risque assumé" par les autorités, qui se félicitent du nombre de tests effectués en amont : "Plus de 4 500 sur le week-end du dimanche gras", indiquent-elles.
Macron, le roi Vaval
En Guadeloupe, le carnaval est mené par des groupes, qui défilent du début de l'après-midi jusque tard dans la nuit, au son de leur musique. C'est toujours le Roi Vaval, personnage voué à être brûlé le mercredi des Cendres (ce 2 mars), qui ouvre le bal. En cette année très marquée par la crise sanitaire, il est paru sous les traits d'Emmanuel Macron, couronné d'un virus du Covid, une seringue en guise de sceptre. Sur les bords de son char ont été rajoutés des ornements pailletés, ainsi qu'une cocarde bleue "pour parler d'Europe aussi", affirme une organisatrice.
Chaque passage anime la foule massée le long du parcours sur des chaises ou sous des barnums, sans masque ni distance de sécurité. On danse, on crie, on applaudit. Certains sont là depuis le matin, pour être sûrs d'être aux premières loges. "Voir tous ces gens heureux, c'est un plaisir !", s'exclame Jean-Pierre Lechat, quinquagénaire arrivé en 2020 en Guadeloupe et qui assiste pour la première fois à un carnaval. "Ça fait du bien moralement, on a besoin de ces moments."
18 groupes costumés au lieu de 50 habituellement
Les membres du groupe Voukoum, natif de Basse-Terre, défilent toutes paillettes dehors, le corps enduit de "gwo siwo", une pâte noire et brillante qui contraste avec les plumes multicolores des coiffes géantes portées par ceux du groupe Waka. "Cette année, pas de thème, pas de chorégraphie, pas de concours : on a recyclé des anciens costumes", crie une danseuse en tentant de couvrir le bruit des trompettes et des tambours avant de s'éloigner en dansant.
Le carnaval est, en temps normal, le théâtre d'un affrontement entre groupes, qui rivalisent de chorégraphies, de costumes et de musiques sur un thème choisi. Avant le Covid, le Mardi gras rassemblait plus de 50 groupes. Cette année, seuls 18 ont participé à la Grande parade.
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