Au Havre, des visites théâtralisées pour découvrir les secrets de la Maison de l'Armateur
Rare bâtiment du Havre épargné par les bombardements, la Maison de l'Armateur est unique par son architecture du XVIIIe siècle. Des visites théâtralisées replongent le visiteur dans la vie du Havre et de ses négociants.
Quand on parle de l’architecture de la ville du Havre, on pense tout de suite à la Seconde Guerre Mondiale, qui fit de cette ville de Seine-Maritime l’une des plus détruites de France. Qualifiée de "ville-martyre", elle est rasée à 80% et sa reconstruction deviendra dans les années d’après-guerre, une priorité nationale. Ce qu’on sait moins, c’est que certains bâtiments historiques ont échappé miraculeusement aux bombardements.
Un joyau du XVIIIe siècle
La Maison de l’Armateur en fait partie (seul un de ces pignons a disparu). C’est une chance car elle est l’une rares à représenter l’architecture du XVIIIe siècle dans la cité normande. Située dans le quartier Saint-François, l’un des plus anciens du Havre, elle abrite désormais un espace muséographique qui raconte l’influence du commerce au Havre entre 1750 et 1830. La maison est en effet située au n°3 du quai de l’Île, face aux bateaux qui revenaient de leurs longs voyages avec dans leurs cales de nombreuses marchandises mais aussi des êtres humains voués à l'esclavage.
Une demeure atypique
Construite vers 1790 par Paul-Michel Thibault (1735-1799), architecte des fortifications et fontainier de la ville, la demeure s’élève sur cinq étages (rez-de-chaussée, entresol, étage noble, troisième et quatrième étages) avec, en son centre, un aménagement qui en fait toute l’originalité : un puits de lumière - octogonal pour le bas et circulaire pour le haut – autour duquel s’organise tout l’espace intérieur.
L'arrivée de l'armateur
En 1800, la demeure est rachetée par Martin-Pierre Foäche (1728-1816), un négociant-armateur issu d’une vieille famille havraise liée au grand commerce qui en fait sa résidence familiale d'hiver et y installe ses bureaux de négoce. Pour lui donner encore plus de distinction, il fait appel à l’architecte byzontin Pierre-Adrien Pâris (1745-1819), ancien dessinateur du cabinet du roi et ami de la famille. Il conçoit alors un décor Directoire dans lequel les influences antiques sont très présentes.
Un commerce longtemps inavoué
La maison reflète la réussite et la fortune de son propriétaire. Une fortune dont l'origine n'a parfois rien de noble. Cette dernière vient en partie de la traite négrière qui a été un des socles de la prospérité havraise à une époque.
Comme le souligne Élisabeth Leprêtre, conservatrice de la maison de l’Armateur, "pendant longtemps la Ville s’est interrogée sur la manière de mettre cette maison en valeur Lorsque nous avons repris le projet, en 2005, le choix a été fait de scénariser l’espace pour présenter une récréation plausible de l’habitation d’un homme ayant fait fortune dans le négoce maritime au XVIIIe siècle. S’il fut florissant et audacieux, le commerce qui a rendu le port du Havre prospère est aussi, pour une partie des navires, lié à un commerce longtemps inavoué, celui de la traite négrière".
La Conservatrice souligne d'ailleurs le rôle des descendants de Martin-Pierre Foäche qui n'ont jamais chercher à renier le passé de leurs aïeux, ont accepté de rendre accessibles à tous les archives privées de la famille.
Des usages divers
Une famille qui vivra dans la Maison jusqu'en 1830 avant de devoir la quitter à la suite d'un revers de fortune. Les notables quittent le quartier. Transformé en hôtel de voyageurs puis en immeuble de rapport où cohabitent gens de mer et armateurs, le bâtiment résiste aux bombardements. Classée au titre des Monuments historiques en 1950 puis rachetée par la municipalité cinq ans plus tard, elle est alors rebaptisée "Maison de l’Armateur". Après de longues années sans fonction particulière, elle a été ouverte au public en 2006.
Musée Maison de l’Armateur, 3, quai de l’Ile - Le Havre. Tél. : 02 35 19 09 85 ou 02 35 42 27 90. Ouvert tous les jours de 11 h à 12 h 30 et de 13 h 30 à 18 h, sauf mercredi de 14 h à 18 h. Tarifs : de 4€ à 7€
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