David Bowie : ses trois dernières chansons sont bouleversantes
Que contient "Lazarus, the original cast recording" ?
Il s'agit d'un double CD. Sur le premier, on trouve 19 chansons écrites par Bowie et interprétées par les chanteurs et les musiciens du spectacle "Lazarus" montré à Broadway fin 2015 et début 2016 et qui arrive la semaine prochaine à Londres.
Parmi ces titres enregistrés par la troupe théâtrale le 11 janvier, le lendemain même de la mort du Thin White Duke, beaucoup de ses classiques révisités (notamment Life on Mars, mais on n'est pas trop fan du chant de Sophia Anne Caruso, Heroes et surtout The Man Who Sold The World dans une version aussi subtile qu'audacieuse). Mais aussi trois chansons inédites, composées spécialement pour la comédie musicale. Il s'agit de "No Plan", "Killing a Little Time" et "When I met You".
Ces trois chansons interprétées cette fois par David Bowie font l'objet du second CD et constituent tout l'intérêt de cet album (Sony le sait, qui a pris soin de bien verrouiller ces titres, qui ne sont pas disponibles encore sur les plateformes de streaming comme Apple ou Deezer). Produits par le fidèle Tony Visconti en compagnie du formidable groupe de jazz fusion de Donny McCaslin qui officiait sur l'album "Blackstar", ces titres font semble-t-il partie des mêmes sessions. Ils constituent surtout ses ultimes enregistrements.
"No Plan", joyau poignant de ces trois inédits
"When I met You", qui débute comme un titre de post-rock et se déploie de façon à peu près linéaire, est le plus classiquement Bowie du lot.
Avec son gros riff rock, sa batterie sur ressorts et ses pas de côté très free-jazz, "Killing a Little Time" rappelle davantage la tonalité de l'album "Blackstar". Difficile de ne pas avoir la chair de poule lorsque le Thin White Duke chante "I'm falling man, I'm choking man, I'm fading man" (Je tombe, man, J'étouffe, man, Je disparais, man").
Mais il y a encore plus bouleversant : "No Plan", le joyau de ce trio d'inédits. Sur cette chanson en apesanteur à briser le coeur, qui se termine sur un solo de saxophone poignant, Bowie chante : “Here, there's no music here / I'm lost in streams of sound / Here, am I nowhere now ? No plan... / Wherever I may go, just where, just there, I am / (...) Here is no traffic here, no plan / Nothing to regret, this is no place, but here I am." (Ici, il n'y a pas de musique/ Je suis perdu dans les courants sonores / Ici, suis-je nulle part maintenant ?...)
Comme un message de l'au-delà
Comment ne pas interpréter ces paroles comme un message d'outre-tombe ? Il le faut pourtant. D'abord, Bowie a joué toute sa vie durant avec l'idée d'un double extra-terrestre. Ensuite, ces chansons, aussi troublantes soient-elles, ont été écrites pour la comédie musicale "Lazarus".
Ces paroles ne sont donc pas celles de Bowie mais celles d'un personnage de fiction, en l'occurence l'extra-terrestre Thomas Jerome Newton qu'il interprétait dans "L'Homme qui venait d'ailleurs" de Nicholas Roeg sorti en 1976 et dont la pièce "Lazarus" constitue une sorte de suite.
Certes, le personnage de Newton ressemble fort à Bowie et il a sans doute voulu avec cette pièce mettre en scène sa propre mort, alors qu'il se savait condamné. Mais il faut surtout garder à l'esprit que David Bowie ne pensait pas avoir dit son dernier mot avec ces trois chansons. Une semaine avant sa mort, début janvier, il avait annoncé à Tony Visconti qu'il avait écrit cinq nouveaux morceaux et qu'il avait hâte de retourner en studio.
La parution vendredi 21 octobre de "The Lazarus The Cast Album" (Sony) coïncide avec l'arrivée de la comédie musicale à Londres. La première a lieu le 25 octobre 2016 au King Cross Theatre et devrait être à l'affiche jusqu'au 22 janvier 2017.
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