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La scène jazz endeuillée par la mort d'Eglal Farhi, fondatrice du New Morning, mythique salle parisienne

Le jazz perd une de ses grandes figures. Eglal Farhi, qui avait fondé le New Morning à Paris en 1981, s'est éteinte à l'âge de 97 ans.

Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Eglal Farhi au New Morning en 1993, près d'une statue de Billie Holiday (CHRISTIAN DUCASSE)

Eglal Farhi est morte mercredi soir à son domicile de Neuilly-sur-Seine, a annoncé le New Morning jeudi. La direction du club parisien a rappelé que sa fondatrice avait fait de cette salle "l'un des clubs les plus importants au monde et un véritable foyer pour les gens du métier".

Née le 8 avril 1922 en Égypte, pays dont sa famille s'était exilée en 1968, Eglal Farhi, journaliste de profession et passionnée de jazz, a cofondé le New Morning dans le 10e arrondissement de Paris en 1981. Pour ce faire, elle s'est inspirée du premier club de jazz que ses deux beaux-fils, issus d'une première union de son époux, avaient lancé à Genève en 1976. Ce premier club s'appellait déjà le New Morning. Alors, à l'aube de la soixantaine, Eglal Farhi, une femme dans un monde du jazz très masculin, a lancé avec son beau-fils Alain un nouveau club à Paris. Elle en a pris la gérance, étant la seule à avoir la nationalité française. L'établissement a pris le même nom que celui qui existait en Suisse depuis cinq ans. Le succès et la renommée de cet établissement dépasseront toutes les espérances.

Bienveillante, souriante, élégante, Egal Farhi a su créer des liens étroits avec les plus grands musiciens qui ont voué au club un attachement jamais démenti, comme l'illustre ce reportage France 3 de 2013 dans lequel on retrouve une Eglal Farhi en pleine forme. Sa fille Catherine, qui a repris le flambeau, entretient et cultive aujourd'hui cet esprit. Le New Morning, qui a été récemment modernisé, demeure un endroit très chaleureux où il fait bon passer une soirée à l'écoute des grands artistes d'aujourd'hui, toujours fidèles au lieu.

C'est le 16 avril 1981 que le concert inaugural s'est tenu avec une affiche de prestige : l'illustre batteur Art Blakey et ses Jazz Messengers. Par la suite, une liste phénoménale de légendes du jazz - mais pas seulement - a forgé la renommée de cette salle aux murs ornés de photos de musiciens et à la capacité d'accueil plus importante que les clubs de la rue des Lombards : de Stan Getz à Dizzy Gillespie, de Chet Baker à Gil Evans, de Nina Simone à Michel Petrucciani... Mais il n'y a pas que les jazzmen qui s'y sentent chez eux : Prince s'y est produit plusieurs fois lors d'aftershows nocturnes d'anthologie. Ces dernières années, on a aussi bien pu y entendre une Marianne Faithful accompagnée d'un Bill Frisell à la guitare qu'un Hermeto Pascoal bardé de ses ustenciles et de son exubérance brésilienne, sans oublier des chanteurs comme le Néerlandais Dick Annegarn venu roder un nouveau répertoire, ou encore l'Israélienne à la voix d'or Noa... Le New Morning n'a pas de frontière, à l'image de sa fondatrice, son âme.

Réactions

Le club parisien Baiser Salé, situé rue des Lombards, a rendu jeudi un émouvant hommage sur Facebook à la fondatrice du New Morning, rappelant que cette "femme pleine de joie, de caractère et de culture" lui avait "témoigné son soutien" dans des "moments difficiles". "Son apport pour le jazz est inestimable. La scène jazz parisienne a été dynamisée dans les années 80 par le New Morning, soufflant un vent de renouveau et de modernité sur la capitale."


Pascal Anquetil, célèbre journaliste de jazz, ancien directeur du défunt Centre d'information du Jazz (CIJ), a rendu hommage à Eglal Farhi jeudi, sur sa page Facebook : "Classe, générosité, fidélité, élégance, distinction, culture, amour des musiciens (je pense à Chet), voilà les premiers mots qui me viennent naturellement à l'esprit quand je pense à elle. Je lui dois, par exemple l'immense bonheur d'avoir pu fêter au New Morning l'anniversaire des 10 ans, puis des 20 ans du Centre d'Information du Jazz. Et tant d'autres grands moments !!!"

François Lacharme, président de l'Académie du Jazz, a salué jeudi sur Facebook une "ambassadrice du jazz unique", dont la "bienveillance s'accompagnait d'une autorité naturelle". 


La radio TSF Jazz a exprimé jeudi sur Facebook sa "profonde tristesse après la disparition d'Eglal Farhi, fondatrice de cette académie du Jazz et espace total de liberté qu'est le New Morning".

La Sacem a salué sur Twitter la mémoire de la fondatrice du New Morning, "temple du jazz" : "Tristesse d'apprendre la disparition d'Eglal Farhi ️; elle ouvre en 1981 le @newmorning Paris, temple du jazz. Merci d'avoir fait vivre ce répertoire dans un lieu si emblématique, merci à Catherine sa fille de continuer l'aventure."  https://t.co/BxxpLCPAnv

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