Biréli Lagrène seul avec sa guitare sur son nouvel album "Solo suites"
Le guitariste de jazz Biréli Lagrène s’essaie à l’exercice ardu d’un album (presque) entièrement en solo. Le résultat est magnifique. Pour en savoir plus sur "Solo suites" sorti ce vendredi 6 mai, nous avons demandé au musicien de nous partager sa passion.
Bireli Lagrène est avant tout connu pour sa dévotion indéfectible au jazz manouche du fait de ses origines. Né en 1966 en Alsace dans une famille manouche, il débute la guitare dès l’âge de quatre ans et devient un prodige à l’âge de quatorze en remportant le premier prix du festival de musique tzigane de Strasbourg. Fortement influencé par Django Reinhardt à ses débuts, il a rapidement élargi ses influences en se tournant notamment vers le jazz-fusion. Au cours de sa déjà longue carrière, il a eu l’occasion de jouer avec les plus grands : Stéphane Grappelli, Al Di Meola, Jaco Pastorius ou plus récemment Jean-Luc Ponty et Kyle Eastwood. Le guitariste a répondu à nos questions.
Un album pas prévu
"Ce n’était pas du tout quelque chose que je prévoyais dans ma carrière" explique Biréli Lagrène. "Ce sont les gens qui m’entourent qui m’ont suggéré cette idée d’un disque en solo. Parce qu’à la base je suis quelqu’un qui aime partager avec d’autres musiciens. Alors j’ai gambergé, j’ai mis du temps, et finalement je leur ai dit : je crois que je vais le faire (rires);"
Me retrouver seul, c’était quand même un petit challenge.
Biréli Lagrèneà propos de son album "Solo Suites"
C’est effectivement la première fois qu’on entend Biréli Lagrène jouer seul à la guitare sur tout un disque. Et de même que l’idée de l’album n’était pas prévue, les morceaux ont eux aussi fait la part belle à l’improvisation. Quelques trames de départ seulement. "C’était complètement désécrit" précise le guitariste. "J’ai préparé un minimum : la voie dans laquelle je voulais que ma guitare sonne. Je voulais me donner une grande liberté à l’enregistrement."
Le jazz est une musique qui doit être improvisée, mais avec grand respect et rigueur.
Biréli Lagrène
Jazz, blues et grands espaces
Celui qui nous a habitués par le passé à des rythmes effrénés explore ici des ambiances plus calmes. Deux guitares, une électroacoustique et une électrique, pour une couleur globale plus folk que swing. "Je ne voulais pas faire un disque 'me voici me voilà'" avoue Biréli Lagrène. "J’ai préféré jouer les grands espaces, ne pas trop charger au niveau des notes. C’est un disque un peu plus simple par rapport aux autres que j’ai faits. Plus accessible."
À un certain âge, on se calme avec toutes ces notes qui défilent.
Biréli Lagrène
Le musicien joue beaucoup sur les silences et respirations. Un jeu aéré et aérien. Et Biréli Lagrène n’a pas son pareil pour évoquer des images avec seulement quelques notes. Sa guitare suscite instantanément la nostalgie et une mélancolie bienveillante, comme dans Memories qui ouvre l’album.
Bien qu’il se défende avec beaucoup d’humilité que sa musique n’est "que du blues avec un peu d’harmonie", Biréli Lagrène explore une palette très riche. Le guitariste virtuose qui sait être véloce n’étale pas ici sa technique. Il distille au contraire subtilement divers ingrédients de ses nombreuses influences. De superbes arpèges égrenés dans Nature Boy, un côté légèrement country-chicken-picking dans À suivre, ou encore des staccatos syncopés dans Question réponse. Un morceau dont le titre évoque justement la structure originelle du blues et cette façon de faire se répondre les phrases mélodiques.
Je suis très attiré par le blues. J’ai toujours ça dans un coin de ma tête.
Biréli Lagrène
Mais il y a aussi bien évidemment du jazz dans ce disque. Principalement à travers quelques reprises de standards : le classique Caravan de Duke Ellington, My Foolish Heart du répertoire de Bill Evans, Put Your Dreams Away popularisé par Frank Sinatra… "J’adore jouer des standards, j’en ai joué toute ma vie" confirme Biréli Lagrène. "Pour cet album j’ai plutôt choisi des ballades". Et c’est également une reprise qui clôt l’album, mais de façon totalement inattendue.
Entièrement solo ? Pas tout à fait
En effet, si un morceau comme À suivre… pourrait presque faire figure de morceau-titre pour un album nommé Solo suites, le terme "solo" est démenti au dernier moment par la chanson de John Prine Angel from Montgomery. Zoé Lagrène, fille du guitariste, vient chanter, tandis que son père ajoute une seconde guitare et une basse. Une véritable surprise après avoir entendu 16 morceaux à la guitare seule. "L’idée est venue sur le tard" explique Biréli Lagrène. "Je voulais contraster avec le reste du disque. Je trouvais ça assez rigolo comme idée."
Sur ce dernier titre, la basse prend les feux de la rampe, "un instrument que j’adore aussi et que je joue souvent, surtout récemment avec le Multiquarium Big Band pour le projet Pastorius" (Remembering Jaco, hommage à Jaco Pastorius, où Biréli Lagrène tient la place du bassiste - NDLR).
Briréli Lagrène enchaîne ainsi les projets, du Multiquarium Big Band à son trio avec le contrebassiste William Brunard et le saxophoniste Franck Wolf en tournée aux Etats-Unis en juin, en passant par quelques concerts avec le guitariste Sylvain Luc. Mais surtout, l'artiste va jouer son album Solo Suites sur scène, en débutant dès ce samedi 7 mai à la Salle Gaveau à Paris. Sa fille Zoé viendra le rejoindre pour interpréter Angel from Montgomery. On peut supposer sans trop prendre de risque qu’on y entendra beaucoup plus que "du blues avec un peu d’harmonie".
Biréli Lagrène - "Solo Suites" - Sorti le 6 mai (PEEWEE / SOCASDISC)
Le musicien sera en concert ce samedi 7 mai, Salle Gaveau à Paris
Retrouvez toutes les infos sur la Page Facebook de l'artiste
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