"Au bout du conte" : Jaoui plus Bacri, le conte est bon
De Agnès Jaoui (France), avec : Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri, Agathe Bonitzer, Arthur Dupont, Benjamin Biolay, - 1h52 - Sortie : 6 mars
Synopsis : Il était une fois une jeune fille qui croyait au grand amour, aux signes, et au destin ; une femme qui rêvait d’être comédienne et désespérait d’y arriver un jour ; un jeune homme qui croyait en son talent de compositeur mais ne croyait pas beaucoup en lui. Il était une fois une petite fille qui croyait en Dieu. Il était une fois un homme qui ne croyait en rien jusqu’au jour où une voyante lui donna la date de sa mort et que, à son corps défendant, il se mit à y croire.
Peut-on échapper aux contes ?
Jaoui et Bacri ont réellement un style qui ne ressemble à nul autre dans le paysage du cinéma français, tout en restant bien hexagonaux. Alors que l’on nous sert des comédies déclinées en « sentimentales », romantiques », « de potes », « chorales »…, au kilomètre, on ne peut qualifier les leurs que de Jaoui/Bacri. Et notamment ce nouvel opus, démarquage sur plus d’un point de leurs précédents films, tout en gardant une unité de ton, mais renouvelé. A croire qu’ils ont créé un genre à eux tous seuls.
Cette innovation émane en premier lieu de la référence aux contes de fées, archétypes narratifs dont tout un chacun est imprégné, consciemment ou non, qu’Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri se plaisent à détourner à plaisir. Le ton n’est pas à la parodie, mais à la vérification dans des situations réalistes, de la valeur des codes si bien installés des contes, comme éléments structurels des rapports de l’individu au monde. On peut compter sur le duo pour en prendre le contre-pied et assurer que rien n’est écrit d’avance, ou du moins exprimer la nécessité d’en réchapper. Mais est-ce bien possible ?
Reportage : P.Deschamps, T.Breton, P.Aziza, V.Castel
Des transferts parlants
Les archétypes des contes traversent tout le film : la princesse, le prince charmant, le grand méchant loup, le roi, la belle-mère… sous des formes contemporaines, finement ajustées dans un récit qui, au prime abord, ne relève pas du conte. Cette articulation participe pour beaucoup du charme, même si parfois la forme est plus appuyée qu’à d’autres. Le fil rouge de la pièce de théâtre pour enfants que fait répéter Marianne, est comme le chœur antique du théâtre classique, un rendez-vous régulier qui rythme l’action avec légèreté et humour. Un humour qui fait encore une fois mouche tout le long de situations et de dialogues irrésistibles.
Bien sûr, Bacri reprend son rôle de bougon, mais n’est-ce pas là qu’on le préfère ? Il ne se répète pas pour autant et renouvelle constamment son registre. Déphasé, en rupture de banc, il va effectuer un parcours à rebours de ses convictions désabusées. Jaoui est le rôle pivot, puisqu’elle est la fée. Tout s’organise autour d’elle, tout le monde revient vers elle, alors qu’elle s’empêtre en elle… Les jeunes gens à la découverte de l’amour vont être mis à rude épreuve, avec un grand méchant loup qui s’immisce entre eux sous les trait d’un ténébreux Benjamin Biolay, parfait. Tout ce petit monde s’organise avec harmonie, drôlerie et légèreté, alors que les thèmes traités relèvent de ceux qui façonnent nos vies. Original, décalé et au "Au bout du conte", charmant.
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