"Adults in the Room" : Costa-Gavras adapte le best-seller de Yánis Varoufákis sur la crise grecque

Le cinéaste franco-grecque Costa-Gavras était sans doute le mieux placé pour adapter Conversations entre adultes, l’ouvrage que le ministre grec des finances Yánis Varoufákis a consacré à ses échanges avec les responsables européens sur la dette grecque, à partir de sa nomination en 2015. Curieusement titré en anglais, alors que le titre français de l’ouvrage convenait parfaitement, Adults in the Room sort sur les écrans mercredi 6 novembre.

Du politique à l’économie

A de rares exceptions près, Costa-Gavras s’est principalement consacré à un cinéma politique engagé, depuis son célèbre Z en 1969 sur la dictature des colonels en Grèce (1967-1974). Puis il réalisera L’Aveu (1970), Etat de siège (1973), Section spéciale 1975) ou Missing (1982). De la politique à l’économie, il n’y qu’un pas que franchissait son film Le Capital en 2012 en adaptant le roman éponyme de Stéphane Osmont, sur l’hégémonie du monde financier dans les sociétés modernes.

Il y revient dans Adults in the Room, où le propos est autant politique qu’économique, s’agissant des débats au sein de l’Eurogroupe entre Varoufákis et ses homologues européens pour rééchelonner la dette grecque. Le réalisateur se situe dans la lignée de films relevant d’un sujet qui, au prime abord, ne se prêtent guère au cinéma. Il y avait bien eu le succès de Wall Street d’Oliver Stone en 1987, mais il fallut attendre la très grande réussite de Margin Call de J . C. Chandor en 2012 sur le krach de la banque Lehman Brothers pour véritablement lancer le genre.

Le ballet de l’Eurogroupe

Autant Chandor avait réussi à réaliser un véritable thriller financier qui tenait en haleine de bout en bout, autant le film de Costa-Gavras tombe à l’eau, malgré son talent et ses tentatives d’animer son propos. Politico-économique, Adults in the Room enchaîne les passes d’armes déséquilibrées entre les deux parties. Varoufákis se retrouve en effet seul devant un front commun, mené par Wolfgang Schäuble, ministre fédéral allemand des Finances. Gavras dénonce les priorités financières édictées par l’Eurogroupe, sans tenir compte des conséquences sociales pour son pays, balayées d’un revers de la main. Et ce ne sont que propositions bottées en touche, et reformulées, affinées sans cesse après concertation avec le premier ministre grec Aléxis Tsipras, qui occupent l’écran.

Ce n’est pas pour rien que le livre dont s’inspire Gavras a pour titre Conversations entre adultes, le film sortant très peu des alcôves bruxelloises et des joutes verbales. Pourtant le cinéaste grec filme toujours aussi bien, diversifie ses cadres, monte de beaux travellings dans les couloirs labyrinthiques de l’institution et dirige des acteurs convaincants. Mais le flot de paroles déversé et leur répétition stérile encombrent le film. On en vient à se demander si le sujet est cinématographique. Costa-Gavras tente bien, en fin de parcours, un effet de mise en scène audacieux avec une chorégraphie métaphorique où Varoufákis se retrouve isolé et menacé par les membres de l’Eurogroupe, mais le ballet ne prend pas, ou arrive trop tard.

La fiche

Genre : Drame / Biopic
Réalisateur : Costa-Gavras
Acteurs : Christos Loulis, Alexandros Bourdoumis, Ulrich Tukur, Daan Schuurmans, Aurélien Recoing, Josianne Pinson, Cornelieus Obonya, George Lenz
Durée : 2h04 
Pays : France / Grèce
Sortie : 6 novembre
Distributeur : Wild Bunch Distribution

Synopsis : Après 7 années de crise lla Gèce est au bord du gouffre. Des élections, un souffle nouveau et deux hommes qui vont incarner l’espoir de sauver leur pays de l’emprise qu’il subit. Nommé par Alexis, Yanis va mener un combat sans merci dans les coulisses occultes et entre les portes closes du pouvoir européen. Là où l’arbitraire de l’austérité imposée prime sur l’humanité et la compassion. Là où vont se mettre en place des moyens de pression pour diviser les deux hommes. Là où se joue la destinée de leur peuple. Une tragédie grecque des temps modernes.