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Hollywood sera-t-il à l'arrêt à partir du 1er mai ? Les scénaristes menacent de faire grève pour obtenir des augmentations

La machine à rêves retient son souffle : les scénaristes de Hollywood menacent de faire grève à compter du 1er mai. Pourquoi ? Comment ? Avec quels risques ? Une grève semblable en 2007 avait eu des conséquences majeures.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des scénaristes de Hollywood, membres de la Writers Guild of America (WGA) manifestent devant les studios de Walt Disney, le 12 novembre 2007 à Burbank (Californie, Etats-Unis). (DAVID MCNEW / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Rien de va plus ces jours-ci à Hollywood. L’industrie est sous la menace d’une grève massive des scénaristes. Une grève imminente. C’est en effet le 1er mai qu’expire l’accord établi pour trois ans entre le puissant syndicat unique des scénaristes, la Writers Guild of America (WGA), et l’Alliance of Motion Picture and Television Producers (AMPTP) qui regroupe les plus grands studios de cinéma, chaînes télés et plateformes de streaming.

Les scénaristes ont décidé de profiter de cette occasion pour renégocier leurs rétributions à la hausse. Pour faire pression, la WGA, qui représente 11.500 scénaristes, a des arguments : ses membres ont voté massivement (97,85%) le 17 avril en faveur d’une grève, au cas où les négociations n’aboutiraient pas.

Les raisons de la colère


"Alors que le business a explosé, et que les studios ont engrangé quelque 30 milliards de dollars de profits annuels, la rétribution des scénaristes a baissé", constate Laura Blum-Smith, une des responsables de la WGA West citée dans le Guardian (en anglais). "Les studios sous-évaluent énormément les scénaristes et menacent la viabilité de la profession", ajoute-t-elle. Le journaliste du New York Times John Koblin ne dit pas autre chose : selon lui, "certains scénaristes vétérans assurent qu’ils travaillent plus qu’avant et touchent autant, voire moins, qu’il y a quelques années."

Selon la WGA, 50% des scénaristes sont aujourd’hui payés au minimum syndical, contre un tiers il y a huit ans. Certes, le minimum syndical est aujourd’hui fixé à 7412 dollars par semaine (environ 6700 euros). Mais alors que les auteurs ont pu longtemps compter sur 35 à 40 semaines de travail par an, les mastodontes du streaming ne les emploient plus que pour 20 à 24 semaines par an (soit moins de 6 mois sur douze). En cause : la longueur des séries, qui s’est fortement réduite. Lorsqu’un Desperate Housewives (2004 à 2012) comptait huit saisons de plus de vingt épisodes chacune, la plupart des séries actuelles ne comptent plus qu’une dizaine d’épisodes par saison, sans assurance d’être prolongées au-delà d’une seule.

Et on ne parle pas de la menace que fait peser l’intelligence artificielle sur les auteurs puisqu’elle pourrait bientôt contribuer à concevoir les scénarios.

Que veulent les scénaristes ?


Que réclament les scénaristes ? Une augmentation de leur rétribution, avec une hausse du salaire minimum, et une actualisation des règles afin qu’ils touchent une part plus équitable de droits d’auteur pour les rediffusions sur les plateformes. Car ces dernières, qui ne communiquent pas sur leurs audiences (contrairement aux cinémas et aux chaînes télévisées), leur reversent actuellement une part très faible, même en cas de succès notable. Enfin, ils espèrent obtenir une rallonge lorsque réécriture et corrections de dernière minute sont demandées (ce qui est monnaie courante avec présence requise sur le plateau), et des compensations pour les périodes de hiatus entre deux saisons d’une même série.

Le spectre de la grève de cent jours en 2007


La nervosité à Hollywood est donc à son comble à quelques jours du 1er mai. Une course contre la montre est engagée dans les négociations. Car si tous les scénaristes arrêtent en chœur de turbiner sur leurs claviers, c’est toute la chaîne de production qui serait mise en pause, des plateaux de tournage aux acteurs, en passant par les directeurs de casting, les agents, les décorateurs, les techniciens etc... Et même d’autres secteurs économiques comme les fleuristes, les chauffeurs et l’hôtellerie.

Si on en a une idée aussi précise c’est parce que le spectre de la grève des scénaristes américains de 2007-2008 est encore dans toutes les têtes : elle avait duré cent jours et mis l’industrie du rêve à l’arrêt plus de trois mois, entraînant des pertes de revenus colossales (2,1 milliards de dollars en moins au total pour la ville de Los Angeles, les ventes de détail reculant même de 830 millions de dollars dans toute la Californie durant cette période selon The Milken Institute) et un assèchement des films et des séries télévisées. Seule la télé-réalité en était sortie gagnante, permettant à The Apprentice avec Donald Trump, programme sur le déclin, de regagner en popularité… offrant au passage une rampe de lancement au futur président des Etats-Unis.

Quel impact sur vos films et séries préférés ?


Aujourd’hui quelles conséquences aurait une grève dure des auteurs sur les écrans, grands et petits ? Selon le journaliste du New York Times John Koblin, les plateformes de streaming seraient peu affectées : HBO travaille avec tellement d’avance que tout aurait l’air normal, au moins durant quelques mois, tandis que Netflix pourrait combler le vide en important massivement des films et séries du monde entier. Du côté des sorties de films, préparées très en amont, la grève pourrait être invisible dans un premier temps, mais elle risquerait, si elle traînait en longueur, d’affecter les sorties prévues l’an prochain. Au final, ce sont les late night shows télévisés (les shows tels ceux de Jimmy Fallon, Stephen Colbert ou Jimmy Kimmel) qui seraient les plus impactés. Ils nécessitent en effet d’écrire les répliques au jour le jour, en fonction de l’actualité. 

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