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Festival de Cannes : dans le documentaire "How to save a dead friend ?" une réalisatrice russe présente son pays comme la "Fédération de la dépression"

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"Quand tu es jeune en Russie, le seul espace où tu peux encore être libre, c'est dans ta tête"
"Quand tu es jeune en Russie, le seul espace où tu peux encore être libre, c'est dans ta tête" "Quand tu es jeune en Russie, le seul espace où tu peux encore être libre, c'est dans ta tête"
Article rédigé par franceinfo Culture - Cédric Cousseau
France Télévisions - Rédaction Culture

La réalisatrice russe Marusya Syroechkovskaya présente à Cannes "How to save a dead friend ?", un documentaire choc sur la génération des millenials. Il est présenté dans la sélection "Acid" qui défend les cinéastes indépendants.

How to save a dead friend ? Le titre du documentaire de la jeune réalisatrice Marusya Syroechkovskaya sonne comme une épreuve impossible. Ce que traverse selon elle une partie de la jeunesse de son pays, celle qui a grandi dans les années 2000 avec l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine. Son oeuvre, caméra au poing, à la première personne, documentant dix années de sa vie en Russie, dépeint une génération empêchée d’être elle-même, de vivre ses rêves, de s’exprimer librement. Son film présenté à Cannes relate des comportements d’auto-destruction qu’ils ont vécus, elle et son mari. En 2016, son compagnon Kimi mettra fin à ses jours. 

"Il n'y a pas de statistiques sur le suicide en Russie. On ne sait pas vraiment où on en est, quel est le pourcentage de suicides au sein de la jeunesse. Ils sont en fait signalés comme des accidents, des overdoses ou d’autres motifs de ce genre, témoigne Marusya Syroechkovskaya, interrogée par franceinfo. Ce que je peux dire sur mon expérience et l’expérience de Kimi, c’est que nous étions tous les deux en dépression et nous ne le savions pas. Nous pensions que c'était ça la vie, que ça allait être comme ça pour toujours. Donc dans un sens, nous nous sommes comme automédicamentés avec la drogue et l'alcool. Ça nous a aidés au début."

"On est libre qu'à l'intérieur de sa tête"

Marusya Syroechkovskaya renomme aujourd’hui la Fédération de Russie en "Fédération de la dépression". Elle dénonce les attaques aux libertés fondamentales qui conduisent au mal-être. "En Russie, tu peux être libre quand tu parles avec tes amis. Je veux dire si tu n'utilises pas ton téléphone ou des messages en ligne pour communiquer car tout peut être lu par les autorités. Tu ne peux pas être toi-même et dire ce que tu penses car tu peux être puni pour ça. Où est-on libre aujourd'hui ? À l’intérieur de sa propre tête. Il y a encore cet espace où tu peux être toi-même, où tu peux dire ce que tu veux sans avoir peur que ça t'amène en prison."

Marusya a quitté la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine, fuyant la répression contre les voix s'opposant au pouvoir, laissant ses proches derrière elle et ne sachant pas quand elle pourra revoir sa mère. How to save a dead friend ? se fait remarquer dans la sélection Acid qui promeut les cinéastes indépendants. "C’est plus qu’important d’être là car c’est la chance de montrer mon film et de faire en sorte que mon histoire soit visible. Bien sûr que la mort est présente dans le film mais il y a aussi beaucoup d'espoir car ainsi Kimmy n'est pas parti oublié, il est encore là à travers ce documentaire."

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