Festival de Cannes 2024 : cinq films incontournables de Jacques Audiard, en compétition avec "Emilia Perez"

De retour sur la Croisette pour son nouveau film "Emilia Perez" en compétition officielle, Jacques Audiard est un habitué du festival. Il a marqué le cinéma français avec des films inoubliables.
Article rédigé par Yemcel Sadou
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5 min
L'acteur Tahar Rahim dans le film "Un prophète" (2009) de Jacques Audiard. (REX FEATURES / SIPA)

Figure incontournable du cinéma français, Jacques Audiard est l'un des cinéastes combinant cinéma de genre et cinéma d'auteur, avec des histoires poignantes. Bien accueillis par la critique et le public, ses films se distinguent par des mises en scène stylisées et violentes et des personnages en souffrance aux émotions contradictoires. Au Festival de Cannes, il est passé de nombreuses fois à côté de la Palme d'or avant de l'obtenir en 2015 pour Dheepan. De la performance à fleur de peau de Tahar Rahim dans Un prophète à l'émouvante trajectoire de Marion Cotillard dans De rouille et d'os, les films de Jacques Audiard ont laissé une empreinte marquante dans le cinéma français.

1 "Regarde les hommes tomber" (1994)

Road-movie racontant un jeu du chat et de la souris entre deux truands que tout sépare, Regarde les hommes tomber (1994) est le tout premier film de Jacques Audiard. Sélectionné pour la Semaine de la critique au Festival de Cannes 1994, le film remporte trois César dont celui de la meilleure première œuvre en 1995 ainsi que le prix Georges-Sadoul.

Le film raconte deux histoires entremêlées. D'un côté, celle de Simon Hirsch, représentant commercial peu loquace, cherchant à venger son seul ami, un inspecteur de police qui s'est fait tirer dessus au cours d'une enquête. De l'autre, l'histoire de Marx interprété par Jean-Louis Trintignant, un escroc vieillissant qui entraîne dans ses combines Johnny, incarné par Mathieu Kassovitz, un jeune paumé pris d'affection pour lui. Ce rôle sera une révélation pour Mathieu Kassovitz qui remportera le César du meilleur espoir masculin pour sa performance en 1995.

"De battre mon cœur s'est arrêté" (2005)

Remake du film noir Mélodie pour un tueur (1978) de James Toback, De battre mon cœur s'est arrêté, avec Romain Duris et Niels Arestrup, est le quatrième film de Jacques Audiard. Coécrit avec Tonino Benacquista, ce film dramatique décrit une relation père-fils destructrice sur fond de magouilles immobilières. Il remporte un grand succès public comme critique, et reçoit huit César en 2006 dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur acteur dans un second rôle pour Niels Arestrup.

S'inspirant très largement du film original, De battre mon cœur s'est arrêté édulcore tout de même la figure du personnage principal. Thomas (Tom), jeune homme de 28 ans, est un marchand de biens véreux à Paris comme son père. Ambitionnant autrefois de devenir pianiste comme sa mère, il abandonne ce projet au décès de celle-ci. Soumis au chantage affectif et à l'immoralité de son père vieillissant, il vit dans un univers violent et ne fait preuve d'aucune pitié envers les immigrés qu'il expulse d'immeubles insalubres qu'il rachète. Entre les escroqueries et les relations mafieuses, Tom renoue avec son rêve de devenir pianiste. Il répète inlassablement sur son piano, aidé par une étudiante chinoise virtuose.

"Un prophète" (2009)

Grand prix du jury lors du Festival de Cannes 2009, Un prophète est un vaste roman d'apprentissage filmé, racontant l'ascension dans une prison d'un jeune délinquant d'origine maghrébine, interprété par Tahar Rahim. Ratant de peu la Palme d'or, le film fait l'unanimité au sein de la critique lors de sa présentation à Cannes et devient un succès en salles. Un prophète obtient le prix Louis-Delluc 2009 et neuf César en 2010 dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur, mais aussi du meilleur acteur et du meilleur espoir masculin pour Tahar Rahim, un doublé inédit pour un comédien. Cette double victoire conduit l'Académie des arts et techniques du cinéma à interdire le cumul de nominations dans différentes catégories pour un même rôle.

Un prophète devient le troisième long-métrage le plus récompensé de l'histoire des César, derrière Le Dernier métro de François Truffaut et Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau. Le film est aussi nommé aux Oscars 2010 dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère.

Une adaptation du film sous forme de série, créée par le scénariste Abdel Raouf Dafri, sera diffusée en 2024. Composée de huit épisodes, la série Un prophète est destinée à OCS et sera réalisée par Enrico Maria Artale. Le comédien Mamadou Sidibé tiendra le rôle de Malik. La série promet d'être une "renaissance du personnage de Malik", une véritable "série noire", sous le "prisme de la rue, des personnages peuplant le Marseille d'aujourd'hui", selon OCS.

"De rouille et d'os" (2012)

Mélodrame social adapté du recueil de nouvelles de l'écrivain canadien Craig Davidson, De rouille et d'os (2012) narre la rencontre d'un jeune père de famille en perte de repères et d'une dresseuse d'orques amputée des deux jambes. Matthias Schoenaerts et Marion Cotillard tiennent les rôles principaux. De rouille et d'os est souvent comparé à Intouchables sorti l'année précédente, les deux films mettant tous deux en scène le handicap moteur.

Le film est présenté en compétition lors du 65e Festival de Cannes. Comme pour Un prophète, la critique est quasi unanime et De rouille et d'os devient favori pour la Palme d'or. Jacques Audiard repart de nouveau bredouille de la Croisette.

Il s'agit du film d'Audiard ayant le plus de succès auprès du public avec 1 932 000 entrées. De rouille et d'os remporte tout de même quatre César lors de la 38e cérémonie dont ceux de la meilleure adaptation et du meilleur espoir masculin pour Matthias Schoenaerts. Audiard devient la personnalité la plus récompensée aux César avec dix trophées obtenus (deux pour le meilleur film, trois pour le meilleur réalisateur, quatre pour le meilleur scénario et un de la meilleure première œuvre).

"Dheepan" (2014)

Septième long-métrage de Jacques Audiard, Dheepan suit le parcours d'un réfugié politique tamoul, originaire du Sri Lanka, qui fuit la défaite de son camp lors de la guerre civile. Il espère obtenir l'asile politique en Europe et se réfugie dans une banlieue française où il trouve du travail comme gardien d'immeuble dans une cité. Jacques Audiard fait un parallèle entre son film et les Lettres persanes de Montesquieu. Il met le social au cœur du film et représente le regard des étrangers sur la France.

Dheepan se distingue avec son casting principal composé de comédiens encore inconnus. La distribution est tamoule et débutante dans le cinéma à l'exception de Vincent Rottiers et Marc Zinga. Dheepan est sélectionné en compétition au Festival de Cannes 2015 où il obtient la Palme d'or. Bien qu'il ne soit pas le favori des festivaliers et des critiques rappelant que ce n'est pas son meilleur film, Dheepan est majoritairement salué. Christian Lacape, président de l'Association des consultants en aménagement et développement des territoires, qualifie tout de même Dheepan de "film dégueulasse qui utilise les cités HLM comme décor de la soif de violence du réalisateur". Il estime que la cité présentée "sans employés des HLM ou de la ville, sans travailleurs sociaux, sans associations et sans commerces, n'existe pas".

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