Arles accueille le premier festival du dessin qui rendra hommage à Sempé
Réputée pour ses Rencontres internationales de la photographie, la ville d'Arles accueille dès samedi 22 avril et jusqu'au 14 mai un ambitieux festival du dessin, ce "beau" langage lié à l'enfance qui "rassemble" les humains, avec un hommage spécial à l'humour et à la poésie du dessinateur Jean-Jacques Sempé (1932-2022).
Une quarantaine de dessinateurs français et étrangers réunis
Tendre ou critique, en couleur ou en noir et blanc, petit ou gigantesque, d'art ou de presse, le dessin revêt "mille formes" et "peut tout dire ou presque", souligne auprès de l'AFP Frédéric Pajak, co-fondateur, avec l'éditrice Vera Michalski, de ce festival présidé par l'animateur Antoine de Caunes.
"Il raconte la langueur d'un soir au bord de la mer, les expressions diverses et variées d'un visage, les convulsions du corps" ou du monde, poursuit celui qui a contribué à créer la maison d'édition Les Cahiers dessinés. Le dessin, c'est aussi la première forme d'art des enfants et celle qu'utilisèrent les humains de la Préhistoire, rappelle-t-il : "Pour beaucoup de gens, être face à un dessin, ça remue quelque chose profondément".
Des oeuvres originales – pour voir la texture, la matière – de quarante artistes français et étrangers, pour certaines issues de collections privées et donc rarement visibles, seront exposées jusqu'au 14 mai dans dix lieux emblématiques d'Arles, ville de 55 000 habitants à la pointe de la Camargue. Les "têtes" dessinées par Victor Hugo sortiront ainsi pour la première fois de la Bibliothèque nationale de France (BNF) à Paris pour être exposées à la Fondation Van Gogh, peintre qui vécut à Arles et y a réalisé certaines de ses toiles les plus connues.
L' "intemporel" Sempé mis à l'honneur
Un hommage spécial sera rendu à Sempé, ce dessinateur français mondialement connu qui créa, avec Goscinny, Le Petit Nicolas et réalisa plus d'une centaine de couvertures du magazine américain New Yorker. Quelque 200 de ses dessins sont exposés sur les murs en pierre de la chapelle du XVIIe siècle du Museon Arlaten - Musée de Provence, au cœur d'Arles.
Loué pour son trait de génie, cet autodidacte qui se représente sur un des murs comme un petit oiseau sautillant, compensant son manque de formation "par du travail", a capté la fragilité des humains avec ses petits personnages face à d'immenses immeubles ou publicités d'une société de consommation dévorante, les guerres des couples ou la solitude d'un pianiste de restaurant jouant dans une salle vide.
A New York, il croque les employés de bureau dans une pause déjeuner, les uns à côté des autres, mais seuls, tous le nez dans leurs dossiers comme leurs contemporains l'auraient dans leur portable. "Sempé est intemporel, il saisit la fragilité, la futilité et la vanité mais aussi le rêve, des sujets toujours actuels", s'émerveille Antoine de Caunes : "Il a surtout beaucoup de délicatesse et de tendresse pour ses personnages, même s'il dessine leurs failles".
Desœuvres d'artistes réputés et d'enfants
Les visiteurs pourront aussi découvrir des œuvres d'Aloïse (1886-1918), une Suissesse considérée aujourd'hui comme une figure majeure de l'art brut. "Elle a passé 50 ans de sa vie en asile psychiatrique, elle a dessiné avec des éléments de fortune. On va présenter plusieurs de ses dessins grâce à deux collectionneurs qui sont en Suisse", souligne Frédéric Pajak.
Autre destin sinueux et complexe, celui de Marcel Bascoulard. Né en 1913 dans le Cher, cet homme qui aimait s'habiller en femme, vécut dans la rue et mourut assassiné en 1978. Il a réalisé des dessins de la ville de Bourges avec une "minutie qui rappelle les gravures de Rembrandt", remarque le co-fondateur du festival.
Le musée Réattu, sur les bords du Rhône, accueillera les dessins de l'artiste Pierre Alechinsky, l'un des fondateurs du groupe d'avant-garde Cobra. Les dessinateurs de presse ne seront pas oubliés avec Wozniak (Le Canard enchaîné), Mix et Remix ou encore El Roto, qui collabore avec le quotidien espagnol El Pais.
Pour oublier les travers du monde, les paysages au crayon du Toulousain Adrien Neveu, les hiboux et oiseaux mystérieux du Suisse Guy Oberson ou les animaux grand format d'Olivier Estoppey emmèneront les visiteurs au cœur de la nature.
Enfin, les œuvres d'enfants de dix classes d'Arles, où le festival a organisé avec le soutien de la municipalité des ateliers toute l'année, seront exposées à l'Espace Van Gogh : "Parce que les dessins d'enfants sont toujours réussis, juge Frédéric Pajak, et disent beaucoup sur la famille, l'enfance, l'imagination".
Festival du dessin à Arles, du samedi 22 avril au dimanche 14 mai 2023
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