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"Dis-moi comment tu marches, je te dirai qui tu es" : au musée des Arts décoratifs de Paris, une exposition dévoile la chaussure sous toutes ses coutures

L'exposition "Marche et démarche" explore l'histoire de la chaussure, des souliers inconfortables du XVIIIe siècle aux sneakers d'aujourd'hui.

Article rédigé par Sophie Auvigne - Edité par Bastien Munch
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des chaussures présentées dans le cadre de l'exposition "Marche et démarche", au musée des Arts décoratifs de Paris. (SOPHIE AUVIGNE / RADIO FRANCE)

Dans le petit salon spécialement aménagé au milieu des vitrines du musée, Charlotte a enlevé ses chaussures pour essayer un modèle exposé, datant du XVIIe siècle. Il s'agit bien sûr d'une copie mise à disposition des visiteurs. Et ce n'est pas très pratique. "Là, j'ai pris d'un coup une vingtaine voire une trentaine de centimètres. Je vais essayer d'avancer avec mais c'est très périlleux. Je préfère me tenir", confie Charlotte, avant de faire quelques pas. "On se rend vraiment compte que tout est fait pour empêcher les femmes de bouger. C'est très très contraignant, il faut s'appuyer sur quelqu'un, autrement c'est pas possible, je pense qu'on se casse la jambe." 

Des visiteurs essaient des modèles d'anciennes chaussures, au musée des Arts décoratifs, à Paris. (SOPHIE AUVIGNE / RADIO FRANCE)

Jusqu'au 23 février 2020, le musée des Arts décoratifs de Paris raconte l'histoire de la chaussure, avec une exposition intitulée "Marche et démarche". Près de 500 exemplaires sont rassemblés, de la fin du XIVe siècle à nos jours, mais ils ne sont pas rangés par ordre chronologique. Les chaussures sont présentées des plus plates jusqu'aux plus hautes, de 20 à 50 centimètres.

Des chaussures très inconfortables

Premier enseignement de cette exposition : les chaussures n'ont pas été faites pour marcher. "L'aristocratie au XVIIIe siècle et la grande bourgeoisie au XIXe siècle portaient des chaussures avec lesquelles il était difficile, voire impossible, de marcher", explique Denis Bruna, commissaire de l'exposition. "Ils considéraient que la rue n'était pas faite pour eux donc les chaussures n'étaient même pas conformes à la forme du pied. D'ailleurs, les femmes françaises se bandaient les pieds pour pouvoir les glisser dans les escarpins les plus étroits, qui faisaient parfois 4 à 5 centimètres de large maximum. Par exemple, si on regarde Cendrillon, elle a un tout petit pied parce que c'est signe de haute aristocratie."

Pendant plusieurs siècles, les classes supérieures de la société ne marchaient pas.

Denis Bruna

à franceinfo

Même les sabots étaient un peu plus confortables, du moins ils autorisaient la marche. Pendant trois siècles, on a donc vraiment souffert dans nos chaussures. "L'exposition montre qu'on a travaillé sur des chaussures singulières pour des marches et des démarches particulières", continue le commissaire de l'exposition. "Pour le sport, pour la danse et pour l'armée, ce sont des chaussures de ville d'abord, au XVIIIe siècle, on utilise exactement les mêmes chaussures. Progressivement, on va travailler pour les rendre de plus en plus performantes. Par exemple, la chaussure de marche pour l'armée va apparaître à la fin du XIXe siècle avec Alexis Godillot. Aujourd'hui, c'est la mode qui a repris la chaussure de danse pour en faire la ballerine. Autre exemple, les chaussures de sport, les sneakers, sont devenues des chaussures très quotidiennes."

Des chaussures pour tous les jours ou bien pour marcher sur la lune, pour un numéro de clown, pour entretenir le fétichisme, ou plus simplement pour séduire... "Dis-moi comment tu marches, je te dirai qui tu es", c'est la promesse de Denis Bruna pour cette exposition au musée des Arts décoratifs de Paris.

Au musée des Arts décoratifs de Paris, une exposition dévoile la chaussure sous toutes ses coutures - Le reportage de Sophie Auvigne

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