Triathlon : un ex-rugbyman à la conquête du Norseman pour devenir le premier homme noir à participer à cette course extrême
Xavier Jourson, formé dans le club de rugby du LOU, se frotte à l'une des courses les plus dures du monde dans laquelle les abandons sont légion.
"Ce n'est pas pour toi." La devise du Norseman est très claire mais n'a pas effrayé Xavier Jourson, français expatrié au Canada, qui s'est lancé ce défi fou au début de la pandémie de Covid. Au contraire, ces six mots ont convaincu l'ex-rugbyman de se lancer dans ce triathlon extrême, qui se déroule samedi 6 août en Norvège.
Cette année, ils seront 250 sur le bateau de départ après deux années chamboulées par la pandémie. Et parmi eux, Xavier Jourson aura un objectif bien particulier : devenir le premier athlète noir à finir le Norseman. "70% des participants sont scandinaves. Je veux être un précurseur pour que d'autres après se disent que c'est possible", affirme-t-il.
3,8 kilomètres de nage au milieu des fjords, dans une eau entre 13 et 16 degrés, et 180 kilomètres de vélo avec un dénivelé positif de 3 360 mètres, soit l'équivalent d'une étape de haute montagne sur le Tour de France, attendent les 250 concurrents avant un marathon qui se termine par l'ascension du Gaustatoppen et ses chemins tortueux et rocheux.
Dans une année normale, seuls les 160 premiers ont l'honneur de se mesurer à cette dernière difficulté dans laquelle quasiment personne ne court et où tous tentent, tant bien que mal, de puiser leurs ultimes ressources. Une fin de course harassante après une journée débutée à 4h30 par le saut du bateau transportant tous les courageux dans l'eau des fjords.
Un défi sportif mais aussi sociétal
Des participants qui ont encore les images de l'an dernier en tête et les conditions météorologiques terribles qui avaient rendu la compétition encore plus difficile. Le vent violent avait perturbé les athlètes dans l'eau, sur le vélo, mais encore plus sur les hauteurs finales où la chute n'était pas loin pour les "finishers". Les 17 abandons dans une édition réduite à 105 participants soulignent la difficulté de l'épreuve.
Rugbyman formé à Lyon, puis passé par Arras, l'Afrique du Sud, Poitiers, Saint-Savin, Bobigny et enfin Suresnes, Xavier Jourson a tout plaqué après une blessure et est parti à Miami avant de rejoindre le Canada où il vit actuellement. Sa préparation a été compliquée par le Covid et les conditions difficiles de l'hiver américain, et il a aussi dû faire face aux clichés. "Quand j'ai voulu acheter un vélo de course, le vendeur m'a snobé. J'ai changé de magasin, même chose", se souvient-il.
Je n'ai pas trouvé un triathlète noir auquel je pouvais m'identifier. Pareil à vélo.
Xavier Jourson, participant au Norseman 2022à franceinfo: sport
De son défi est également née l'envie de le documenter pour encore mieux remplir son rôle de représentation et de diffusion auprès de la communauté noire. "J'aimerais que ça incite beaucoup plus de jeunes à pratiquer le triathlon ou un sport d'endurance, c'est aussi pour ça que je le documente", avoue Xavier, pour qui la transmission et l'éducation sont les meilleurs remparts contre les stéréotypes.
Une transition physique
Ce projet a plu à l'organisation du Norseman qui lui a assuré un dossard, s'évitant l'angoisse du tirage au sort que doivent subir certains concurrents du fait du nombre réduit de places. Dans sa veine entrepreneuriale, le trentenaire a également réussi à trouver des sponsors pour l'aider dans sa préparation et son aventure et cherche un diffuseur pour son documentaire. Des activités chronophages, mais essentielles pour sa réussite.
Côté sportif, le pari est grand pour celui qui mesure 1,93 m et pesait 120 kilos lorsqu'il évoluait dans le monde de l'ovalie. Il a dû totalement repenser son physique via des entraînements différents. "C'est tout un changement. Le rugbyman, ce sont les fibres explosives qui travaillent, là, ce sont les fibres lentes. La perte de poids ça m'a aidé, mais ça crée plein de petits bobos aussi", raconte-t-il conscient des enjeux en terme de performance.
J'ai peut-être perdu 24 ou 25 kilos. Plus je serai léger, mieux ce sera.
Xavier Jourson, participant au Norseman 2022à franceinfo: sport
Après un peu plus de deux ans de préparation, l'heure est aux derniers questionnements pour l'habitant de Montréal. "Ma plus grande crainte, c'est l'eau, la nage, ce que je pratique le moins. Mais c'est ce qui est en premier, donc je vais essayer de miser le maximum dessus. Une fois que je sortirai de l'eau, je me dirais que j'aurais fait un grand pas", estime l'ex-rugbyman.
Si l'objectif principal est de réussir à finir la course pour terminer sa longue aventure de manière positive, Xavier s'est également fixé un classement et un temps qu'il aimerait réaliser, mais qu'il garde bien secret.
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