Paris 2024 : médailles olympiques, porte-drapeau paralympique… Déjà en plein boom, le triathlon espère surfer sur la vague des Jeux
En plongeant depuis le pont Alexandre-III aux Jeux olympiques, avec deux médailles à la clef, le triathlon français a franchi un cap. Pour la première fois, le triple effort tricolore a glané des médailles olympiques en individuel mais, surtout, il s'est révélé aux yeux du grand public, dans un décor magnifique entre les Champs-Elysées et l'Assemblée nationale. Avec sa nouvelle reine Cassandre Beaugrand, sacrée championne olympique, il s'est aussi offert une égérie auprès du grand public.
Ce sera également le cas à l'occasion des Jeux paralympiques, puisqu'Alexis Hanquinquant, l'un des deux porte-drapeau tricolores, est champion paralympique et sextuple champion du monde en titre de paratriathlon. Pourtant, la discipline n'a pas eu besoin de ces deux ambassadeurs de choix pour exploser auprès du grand public. En vingt ans, elle a presque quadruplé son nombre de licenciés, passant de 17 000 en 2000 à plus de 65 000 en 2024.
"On a une progression très, très forte", se félicite ainsi Cédric Gosse, président de la Fédération Française de Triathlon (FFTri). Entraîneur au Paris Sport Club, Tristan Lindeperg confirme : "Il y a dix ans, j'avais 40 triathlètes. Aujourd'hui, on est plus de 200 ! On est très, très sollicités par les pratiquants qui veulent rejoindre le club. Ça fait cinq-six ans qu'on refuse entre 50 et 80 personnes à chaque rentrée, faute de place..."
Pas assez de place pour tout le monde
En d'autres termes : le triathlon explose tellement que les clubs n'arrivent plus à suivre. "On essaye de grandir en suivant ce mouvement, mais on n'a pas assez de staff et surtout de créneaux en piscine, justifie Tristan Lindeperg, également salarié de la Ligue d'Ile-de-France. L'enjeu pour les clubs n'est pas d'être visible et d'attirer du monde, c'est de se structurer pour répondre à la demande." Et si le nombre de clubs a quadruplé en vingt ans, ce n'est pas encore assez.
"On a des mastodontes, comme le Issy Triathlon [Hauts-de-Seine], plus grand club du pays avec 700 licenciés, mais aussi beaucoup de petits clubs familiaux avec quelques licenciés à peine", précise Cédric Gosse, lui-même issu du Trinosaure, pionnier du triathlon français aux Mureaux (Yvelines). Si le triathlon a posé ses valises en France en région parisienne et que celle-ci abrite les plus gros clubs, il n'y a toutefois pas de géographie du triple effort, comme cela peut être le cas en rugby ou en cyclisme. Même chose pour l'organisation des épreuves, dont le nombre explose depuis dix ans, et plus particulièrement depuis la fin de la crise liée au Covid-19.
"On a un maillage territorial très important avec de très belles compétitions partout, quasiment chaque semaine, dont des épreuves à la renommée internationale comme à Gravelines, Deauville, Quiberon, La Baule, Bordeaux, l'Alpe d'Huez, Nice, Embrun...", énumère le président de la FFTri.
Pour tous les goûts
Le succès grandissant du triathlon s'explique aussi par l'éventail de distances offert aux pratiquants. "Evidemment, on ne commence pas par un Ironman [3,8 km de natation, 180 km de cyclisme, 42,195 km de course à pied], sourit Cédric Gosse. Avant cela, on peut s'essayer sur un XS, S, puis se mesurer au M, au L, et enfin d'arriver sur la distance reine qu'est l'Ironman. Le seul prérequis, c'est d'avoir un vélo et de la place pour l'entreposer."
Surtout, le triathlon est l'un des sports les plus complets, par essence. "C'est un sport accessible qui repose sur les trois activités les plus pratiquées par les Français et les plus naturelles : nager, pédaler, courir, pose Cédric Gosse. Il y a aussi une notion de liberté : on peut le pratiquer sans être licencié. D'ailleurs, en 2023, 150 000 personnes ont pris le départ d'un triathlon sans être licenciés."
Autre facteur de séduction du triathlon : son rapport intrinsèque à la nature et aux grands espaces. "En général, on fait du triathlon dans des endroits plutôt beaux, où l'on s'aère", glisse Cédric Gosse. Enfin, pratiquer trois disciplines en une, c'est aussi casser la monotonie des séances d'entraînement. "On a toujours eu des licenciés qui viennent des autres sports et qui disent 'J'en ai marre de compter les carreaux de la piscine en natation' ou qui se blessaient trop en course à pied", avance Tristan Lindeperg.
Championne olympique, Cassandre Beaugrand faisait justement partie de ces nageurs qui ne voulaient pas quitter les bassins, tout en découvrant autre chose : "J'adorais nager et courir, mais je voulais un truc en plus. Je me suis dit, pourquoi pas rajouter le vélo, ce qui n'a pas été très facile, parce que ça n'était pas trop mon truc".
"En triathlon, on ne s'ennuie pas. Quand on en a un peu marre d'un sport, on peut se concentrer sur les deux autres, c'est plus ludique."
Cassandre Beaugrand, championne olympiqueà franceinfo: sport
Même son de cloche pour Emma Lombardi, quatrième aux Jeux, ou Dorian Coninx, champion du monde en titre. "Il y a une dimension sociale dans le triathlon aussi, on court contre soi-même, pas contre les autres. Donc ça crée une énergie de groupe, de la bienveillance plutôt que de la rivalité, explique le Français. C'est une discipline dans l'air du temps, en extérieur, mentale, et bonne pour la santé, qu'on peut ajuster selon la météo, les sensations."
La santé au cœur de la pratique
"On répond aux attentes sociétales, dans une société où on est de plus en plus un peu dans le zapping, en tout cas dans la volonté de vouloir profiter avec beaucoup de liberté de la pratique sportive", estime Benjamin Maze, directeur technique national de l'équipe de France. Au-delà du défi sportif, le triathlon est également l'un des sports les plus bénéfiques pour le corps humain.
"On a des licenciés qui ne font pas de compétition, qui sont là pour profiter des bienfaits du triple effort. Nager, pédaler, courir, ce sont les trois sports qu'un médecin va conseiller à quelqu'un qui veut se remettre en forme."
Tristan Lindeperg, entraîneur au Paris Sport Club Triathlonà franceinfo: sport
Sport d'endurance, le triathlon "renforce le système cardio-vasculaire sans traumatiser le système articulaire", détaille Tristan Lindeperg, qui accueille aussi bien les personnes à la recherche de ces bienfaits que "celles et ceux qui ont pris un dossard pour un Ironman comme un défi, et qui n'ont jamais fait de triathlon". Des novices qui seront sans doute plus nombreux encore à la rentrée prochaine, après les succès du triathlon tricolore sur la Seine olympique et paralympique.
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