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Reportage Wimbledon Village, lieu de quiétude où joueurs et spectateurs vivent au rythme du tournoi

Situé à quelques minutes à pied du stade du Grand Chelem londonien, Wimbledon Village s'anime pendant la quinzaine, dans une ambiance de hameau de campagne.
Article rédigé par Apolline Merle - De notre envoyée spéciale à Wimbledon
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Tous les magasins de Wimbledon Village décorent leurs vitrines aux couleurs et symboles du tournoi. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

"Ici, on est vraiment à la campagne. Tu respires". Quand Arnaud Clément, ancien top 10 mondial, évoque Wimbledon Village, on comprend rapidement la dimension singulière que revêt ce lieu. A moins d'un kilomètre du All England Lawn Tennis and Croquet Club (AELTC), ce petit village vit au rythme du tournoi. Réputé calme tout au long de l'année, ses quatre rues principales s'animent pendant la quinzaine du Grand Chelem londonien. Les restaurants et les bars sont pleins midi et soir. Les voitures et les bus circulent en nombre, et les passants sont parfois à touche-touche sur les trottoirs. Dimanche matin, à la veille de l'ouverture du tournoi, un petit marché composé d'une dizaine de commerçants, attire la foule, avant ou après le brunch. L'ambiance de Wimbledon commence à se réveiller, doucement.

"Beaucoup de locaux quittent le village pendant le tournoi, parce qu'ils n'aiment pas qu'il y ait autant de monde. Ils louent donc leur maison", témoigne Philip, propriétaire de la librairie de Wimbledon depuis quinze ans. Si les lieux de restauration sont très prisés, les commerces sont eux un peu plus calmes que d'ordinaire. "Les gens viennent ici pour regarder du tennis, et pas pour acheter un livre", concède le libraire.

Des vitrines aux couleurs du tournoi

Plus que les nombreux visiteurs, ce sont les vitrines des magasins, des bars et restaurants qui attirent l'œil. Décorées aux couleurs du tournoi, elles mettent en valeur, chacune à leur manière, raquettes et balles de tennis, les accessoires incontournables de la quinzaine. Peinture sur vitrine, compositions florales ou sculptures sur des bosquets, pas une ne manque à l'appel.

Un concours de la plus belle vitrine est même organisé chaque année. "Il y a dix ans, l'association des commerçants de Wimbledon a organisé un concours de décoration de vitrines. C'est une grande compétition et le public peut voter", nous glisse Ben, patron du bar le Hemingways, qui n'a encore jamais gagné mais qui a terminé troisième l'an dernier. Pour cette édition, il a opté pour la représentation picturale sur les vitres de son pub des vainqueurs du tournoi depuis dix ans.

Ben, patron du bar le Hemingways, a choisi de représenter en dessin sur ses vitres, les vainqueurs hommes et femmes de Wimbledon depuis dix ans. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Ben savoure d'avoir retrouvé l'affluence d'avant Covid. "En 2020, il n'y a pas eu de tournoi. Et ces deux dernières années, il y avait encore des restrictions. Pour nous, ça a été dur car pendant la quinzaine, normalement, nous avons du monde chaque jour comme un samedi. Nous gagnons beaucoup d'argent pour l'année. Heureusement, il semble que tout soit revenu à la normale." Si les touristes sont nombreux à venir découvrir cette ambiance de quartier vibrant au rythme de la petite balle jaune, les joueurs et leurs staffs aiment aussi s'y balader.

"Le village, c'est hyper préservé et vraiment mignon. On peut se balader, aller faire ses petites courses, son petit-déjeuner."

Arnaud Clément, ancien top 10 mondial et consultant pour franceinfo: sport

à franceinfo: sport

"Souvent les joueurs louent des maisons ou des appartements avec un petit jardin à l'anglaise, très bien entretenu", se remémore Arnaud Clément, ancien top 10 mondial et consultant pour franceinfo: sport"Ici, on vit complètement différemment des autres tournois. C'est une parenthèse par rapport à la manière de vivre dans la saison. A la nuit tombée, tu peux même apercevoir un renard au milieu de la rue."

"Une année, nous avons eu Andy Murray"

"Chaque année, c'est la même ambiance. Il y a beaucoup de monde pendant le tournoi qui passe au village. Et même des joueurs, sourit Rawad, 16 ans, qui a été embauché pour l'été en tant que serveur au petit café Maison St Cassien. "Une année, nous avons eu Andy Murray, et il n'y a pas longtemps, Grigor Dimitrov. Vous pouvez voir aussi sur les murs tous ceux qui sont venus ici", indique le jeune serveur, en montrant les clichés. De nombreux cadres ornent en effet les murs de l'établissement. A l'intérieur, des photos, parfois un peu jaunies par le temps, des plus grands joueurs avec leur dédicace : comme celles de Maria Sharapova, Andre Agassi ou encore Andy Murray.

Même les animaleries, les coiffeurs et salons de beauté jouent le jeu, le 2 juillet 2023. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Wimbledon Village profite aussi de l'attractivité du tournoi du Queen's, qui a lieu juste avant le Grand Chelem, afin de faire monter l'effervescence progressivement. "Quand le tournoi du Queen's commence, on peut déjà apercevoir des joueurs ici, avec leurs équipes. Et il y a aussi ceux qui travaillent à Wimbledon, qui sont là bien avant le début du tournoi, pour entretenir les courts, installer tout le matériel nécessaire. Ils sont tous là entre deux et trois semaines avant", explique Ben. 

Federer sans monnaie

Ici, tout le monde a son anecdote avec des joueurs. Le libraire Philip a vu passer bon nombre de joueurs et joueuses, actuels ou anciens, dans sa boutique, notamment des Américains comme John et Patrick McEnroe, Tracy Austin, Pam Shriver, Lindsay Davenport ou Martina Navrátilova. "Mais surtout, nous avions l'habitude de voir Roger Federer ici chaque année. Il venait avec ses jumelles, il s'asseyait près des fenêtres et leur lisait des histoires. Et puis il achetait des livres. Mais comme il n'avait jamais d'argent sur lui, c'était son père qui devait toujours payer", se souvient-il, amusé.

"Nous ne l'avons jamais dérangé. Et un jour, il y a peut-être six ou sept ans, un client l'a reconnu et lui a demandé une photo. Il a accepté, mais il n'est ensuite plus jamais revenu, car il voulait un endroit où il ne serait pas dérangé."

Philip, propriétaire depuis quinze ans de la librairie de Wimbledon village

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"L'année dernière, Dan Evans est venu prendre un verre, le jour où il a été éliminé. Et nous recevons aussi beaucoup d'entraîneurs, dont certains étaient déjà venus l'année dernière", sourit-il, fièrement.

Depuis dix ans, un concours de la plus belle vitrine est organisé chaque année par l'association des commerçants de Wimbledon. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

Le soir, le village s’anime, devient plus festif, et le flot de voitures et de touristes se densifie. Car en fin de journée, les spectateurs prennent souvent la direction du village pour terminer la journée autour d'un verre. "Quand les matchs se terminent, entre neuf et onze heures, les gens arrivent et les restaurants et les bars se remplissent petit à petit", explique Ben, entre le service de deux tables.

Comme Ben, Philip et Rawad partagent ce sentiment de "privilège" de travailler ici. "Les autres années, j'avais l'habitude de suivre les matchs au stade ou sur la télé, confie Rawad, qui a toujours vécu à Wimbledon Village. Cette année, ça sera plus difficile puisque je travaille. Mais je suis vraiment excité à l'idée de travailler dans ce lieu et cette atmosphère unique."

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