Roland-Garros 2022 : atteint du syndrome Müller-Weiss, Rafael Nadal souffre "d'une pathologie irréversible", explique un chirurgien
L'Espagnol affronte Alexander Zverev en demi-finales du tournoi, vendredi, en dépit d'une pathologie dégénérative et incurable, dont nous parle Gilbert Versier, chirurgien orthopédique à Paris.
Renversant en huitièmes contre Félix Auger-Aliassime, phénoménal en quarts contre Novak Djokovic, Rafael Nadal est en lice pour un quatorzième sacre à Roland-Garros. Il n'est plus qu'à un match de la finale de l'édition 2022. Le Majorquin affronte Alexander Zverev, vendredi 3 juin, en demi-finales pour un choc très attendu.
Mais aussi fort soit-il, Nadal n'est pas éternel. C'est en tout cas ce que ses récentes sorties médiatiques laissent penser. L'Espagnol laisse clairement planer le doute sur son futur. Il "ne sait pas" de quoi sera fait son avenir après le tournoi. C'est de notoriété publique depuis le mois d'août 2021 : l'Espagnol souffre d'une pathologie chronique au pied gauche, connue sous le nom de syndrome de Müller-Weiss.
Les douleurs liées à cette maladie ont sérieusement contrarié la fin de saison dernière de Nadal et joué un rôle dans son élimination précoce au Masters 1000 de Rome, mi-mai. "Au milieu du deuxième set, c'est devenu insupportable", confiait-il après sa défaite au deuxième tour contre Denis Shapovalov. Gilbert Versier, chirurgien orthopédique à la clinique Drouot de Paris, qui intervient notamment sur le Tour de France, décrit les conséquences de cette pathologie pour Franceinfo: sport.
Franceinfo: sport : "En quoi consiste exactement ce syndrome de Müller-Weiss ?
Gilbert Versier : C’est une pathologie très rare. Un chirurgien n’en voit que deux ou trois dans sa carrière. Elle est liée soit à un traumatisme sur l’os naviculaire, soit à un défaut du pied. Cela provoque une compression de cet os, qui elle-même va entraîner sa nécrose, c’est-à-dire sa mort. Il existe différents stades de gravité. De toute évidence, Nadal ne se trouve pas dans un grade avancé, sinon il ne pourrait pas jouer à un tel niveau et se déplacer comme il le fait.
Concrètement, quels sont les symptômes de ce syndrome ?
Il se traduit par des douleurs sur le dos du pied. En phase minime, la douleur est intermittente et le pied n’est pas déformé. Elle évolue lentement, mais à terme, l’os peut se fragmenter. Il devient alors impossible de courir, même de marcher vite, à cause des douleurs et de la déformation du pied. C’est comme si le pied se pliait de l’intérieur.
À quoi sont liés les différents pics de douleur, comme celui subi par Nadal à Rome ?
Ils sont liés à l’activité. Plus on est actif, plus les répercussions sur la nécrose sont fortes. Nadal risque une aggravation non négligeable de sa blessure en pratiquant le tennis à haut niveau. D’une certaine manière, il a eu de la chance de développer cette pathologie plutôt en fin de carrière. Si cela s’était manifesté dès ses débuts, il n’aurait pas fait cette carrière. On voit aussi qu’il fait ses meilleures performances sur terre battue. Cela se comprend, car comme il glisse, il y a beaucoup moins de contraintes sur son pied.
Existe-t-il des traitements face à cette pathologie ? Nadal doit-il se faire opérer ?
Une intervention signifierait la fin de sa carrière. Par contre, un forage reste possible, même s'il serait indisponible quelques semaines. Pour lui, les solutions sont les semelles et chaussures sur mesure, avec des matériaux qui vont réduire les contraintes, et des infiltrations. Je pense que Nadal va continuer de gérer la douleur comme il l’a déjà fait avec son équipe, choisir des surfaces qui lui conviennent. C’est une pathologie irréversible qui ne peut aller que vers l’aggravation, car on ne peut pas revasculariser un os mort.
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