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Open d'Australie: Nadal-Federer, LE choc

La rivalité opposant les stars de l’histoire de la petite balle jaune a toujours fasciné les fans et les observateurs. L’ère Open a été marquée par quelques duels fameux (Borg contre Connors puis McEnroe, Sampras-Agassi, Nadal face à Federer ou Djokovic). Ces derniers temps ont confirmé la mainmise du duo Nadal-Djokovic. Mais la confrontation entre Roger Federer et l’Espagnol reste le must, un classique inégalable dont Melbourne Park vivra ce vendredi la 33e édition.
Article rédigé par Grégory Jouin
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Roger Federer croise Rafael Nadal

Comparaison n’est pas raison. La formule se justifie d’autant plus lorsqu’il s’agit de tennis, le sport de duel par excellence, où le mental fait souvent autant de différences que la technique et le physique. Le tennis a produit quantités de duels légendaires.

Rivalités notables

Si l’on s’en tient à l’ère Open (depuis 1968), il convient d’écarter d'emblée certaines rivalités trop déséquilibrées, trop éphémères, qui ne reposaient que sur une seule surface, ou celles qui n’ont pas influé assez longtemps sur le sommet de la hiérarchie (de Borg-Vilas à Federer-Djokovic en passant par Connors-Lendl, Lendl-Edberg, Lendl-Becker, Edberg-Becker, Agassi-Courier) ou encore les confrontations entre Andy Murray et le trio de gloutons qui dévorent le circuit ATP depuis quelques années).

Lendl face aux Américains

Deux exemples. Le combat entre Jimmy Connors et John McEnroe a atteint son paroxysme dans les années 1982-1984 lorsque les deux gauchers Américains se battaient pour le trône (avec Ivan Lendl), ce qui n’était pas le cas avant (Jimbo n’a remporté aucun Majeur entre 1979 et 1981 lorsque Big Mac était le seul rival de Bjorn Borg). Mais étrangement, une seule grande finale les a mis face à face dans cette période là (Wimbledon 1982, gagnée en 5 sets par Connors) avant que McEnroe retourne progressivement la situation pour mater son compatriote trois fois en 1984 (1/2 à Roland-Garros et à l’US Open, finale à Wimbledon).

Même cas de figure avec la passation (rapide) de pouvoir entre McEnroe et Lendl au milieu de la décennie. Le New-Yorkais bat le Tchécoslovaque en 1983 (1/2 à Wimbledon) et en 1984 (finale à l’US Open) tandis que le Slave confirme son succès de Roland-Garros 1984 par une autre finale moins mémorable et à sens unique à Flushing Meadows en 1985. En 1982, aucun des deux n’inscrit son nom au palmarès d’un Majeur, et McEnroe chute à partir de 1986.

Plusieurs rivaux pour Borg et Nadal

Si l’on retient uniquement les grands matches ayant opposés ces champions à savoir ceux disputés dans les tournois du Grand Chelem, c’est surtout parce qu’ils ont symbolisé une époque, qu’elle ait duré trois saisons ou davantage. Six binômes tyranniques ont sévi depuis 40 ans en ce sens qu’ils se sont battus pour les grands titres et (ou) la première place mondiale durant de nombreux mois: Connors-Borg au cœur des seventies, Borg-McEnroe au tournant des années 80, Lendl-Wilander au milieu de cette même décennie, Sampras-Agassi dans les années 90, Federer-Nadal et Nadal-Djokovic* pour ce qui est des deux périodes les plus récentes.

Quels enseignements en tirer ? D’abord, que la plus grande rivalité reste sans conteste celle entre Federer et Nadal. Sur les courtes périodes étudiées (trois années maximum), le tandem hispano-suisse possède l’avantage sur n’importe quelle autre paire dominante. De 2007 à 2009, les deux ténors ont remporté 10 titres majeurs (6 pour Federer, 4 pour Nadal), comme entre 2008 et 2010 (4 pour Federer, 6 pour Nadal) au plus fort de leur domination. Ils ont fait mieux entre 2006 et 2008 avec 11 couronnes sur 12 -dont 7 pour le Bâlois.

Federer-Nadal sans égal

Sur trois saisons, le duo Nadal-Djokovic pointe à deux longueurs (9 sacres entre 2011 et 2013, Nadal 4, Djokovic 5), comme le doublette Borg-McEnroe (5 pour le Suédois, 4 pour le Yankee). Puis viennent Agassi et Sampras (8, dont 6 pour Pete, entre 1993 et 1995), Borg-Connors (7 entre 1974 et 1976, dont 4 pour l’Américain) et Lendl-Wilander (7 entre 1986 et 1988, dont 4 pour le Slave).
Sur quatre saisons, Federer et Nadal creusent l’écart. De 2007 à 2010, les deux compères ont scoré 14/16 (7 chacun), autant qu’entre 2006 et 2009 (9 pour Federer) et sur 2005-2008 (9 pour Federer). Juste derrière vient le duo Nadal-Djokovic (12 titres du Grand Chelem entre 2010 et 2013 dont 7 pour le Majorquin).

Rafael Nadal et Roger Federer à Roland-Garros en 2011

21 Majeurs sur 24 !

Suivent les paires Borg-McEnroe (11 entre 1978 et 1981 dont 7 pour le Scandinave) et Sampras-Agassi (9 entre 1992 et 1995 dont 6 pour le Californien). Le duo Lendl-Wilander en compte également 9 en 4 ans (de 1985 à 1988, 5 pour l’enfant d’Ostrava), devançant Borg-Connors (8 entre 1974 et 1977, 4 chacun).

Sur un temps plus long, six ans, la tendance se confirme en faveur des ogres Nadal et Federer qui écrasent la concurrence. Les duettistes s’accaparent 21 trophées majeurs sur les périodes 2004-09 (14 pour le Suisse, 7 pour l’Espagnol) et 2005-10 (Federer 12, Nadal 9). Ce qui veut dire qu’ils ont enlevé 21 des 24 Majeurs en jeu, ne laissant que des miettes à leurs rivaux (Safin, Djokovic, Del Potro).

Le duo Sampras-Agassi assez loin

Malgré son emprise récente sur le circuit, le binôme Nadal-Djokovic ne peut résister à cet ouragan. Il compte tout de même 16 Grand Chelem depuis 2008 (5 de moins que les recordmen). Mieux que Borg-Connors entre 1974 et 1979 (13 dont 8 pour le Viking) et que Sampras-Agassi 1994-1999 (13 dont 9 pour le meilleur serveur de l’histoire). Et beaucoup mieux que le tandem Lendl-Wilander (11 dont 6 pour le meilleur joueur des années 80).

En ce qui concerne les finales en Grand Chelem disputées par ces duos dominants de l’histoire du jeu, Federer et Nadal se taillent encore la part du lion avec 8 grandes finales (5 à Roland-Garros, 3 à Wimbledon, une en Australie) dont 6 gagnées par le Taureau de Manacor. Nadal et Djokovic arrivent après avec 6 finales en Grand Chelem (3-3). Ils devancent les duos suivants : Sampras-Agassi (5, 4-1 pour Pete), Lendl-Wilander (5, 3-2 pour Mats), Borg-Connors (4, 2-2) et Borg-McEnroe (4, 3-1 pour Big Mac).

Nadal-Djokovic, encore de l’avenir

Seul bémol à cette dictature imposée par Roger Federer et Rafael Nadal dans les années 2000, les confrontations directes dans les tournois du Grand Chelem : le duo Nadal-Djokovic pointe en tête avec 11 matches dans les quatre Majeurs (8-3 pour Nadal), devant Federer-Nadal (10, 2-8).

Mais les compteurs seront remis à égalité à l’issue de la demi-finale de Melbourne entre les deux cracks. Là encore, les autres sont en retrait : Sampras-Agassi en comptent 9 (6-3), Lendl-Wilander aussi (5-4), Borg-Connors 7 (4-3)** et Borg-McEnroe 4 (1-3).

Dans la légende

Tout cela pour dire que nous vivons vraiment l’âge d’or du tennis, peut-être encore plus que dans les années 80, la référence absolue jusque-là pour les oppositions de styles et de personnalités qui écumaient la planète et magnifiaient les tournois du Grand Chelem. Novak Djokovic, Rafael Nadal et Roger Federer ont contribué à rendre au tennis ses lettres de noblesse en s’affrontant à la loyale dans des joutes mémorables sur les plus beaux courts du monde.

Ils comptent à eux trois plus de Majeurs que n’importe quel trio auparavant (36, 17 pour Rodgeur, 13 pour Rafa, 6 pour Nole). Ils ont suscité le respect (les trois) et l’admiration (surtout Federer pour sa classe hors norme) partout où ils sont passés. Et les rivalités entre l’Espagnol et le Suisse d’une part, et entre l’Espagnol et le Serbe d’autre part, resteront parmi les plus illustres de l’histoire du jeu.

*Le duo Nadal-Djokovic a remporté 9 des 12 titres du Grand Chelem entre 2011 et 2013 (5-4)
**Borg et Connors ne se sont déplacés que très peu en Australie, Majeur dévalué dans les années 70. Et Jimbo a été suspendu de 1974 à 1978 à Roland-Garros, ce qui peut expliquer le relatif peu d'affrontements des deux stars des années 70.

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