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Eugenie Bouchard, la joueuse qui prend de court le tennis féminin

Douée et charismatique, la jeune Canadienne a tout pour devenir, à seulement 20 ans, la nouvelle reine du tennis mondial. Et sa consécration pourrait intervenir dès l'US Open, qui se déroule jusqu'au 6 septembre.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
La joueuse de tennis Eugenie Bouchard lors d'un match de Fed Cup entre le Canada et la Slovaquie, le 20 avril 2014 à Quebec (Canada). (MATHIEU BELANGER / REUTERS)

Pour le patron du tennis canadien, c'est "un phénomène marketing". Pour Venus Williams, "on dirait une star de cinéma". Pour Martina Navratilova, "elle a le potentiel d'une n°1 mondiale". Tous ces compliments sont à destination d'une seule joueuse : la canadienne Eugenie Bouchard - dites "Genie" si vous voulez lui faire plaisir -, 20 ans, n°8 mondiale, et qui a atteint les demi-finales des trois premiers tournois du Grand Chelem de la saison. L'US Open, qui dure jusqu'au 8 septembre, est l'occasion idéale pour faire sa connaissance.

A 8 ans, elle bat sa mère au tennis

Eugenie Bouchard a toujours su ce qu'elle voulait. "Quand je rentrais de l'école, j'étais toujours celle qui m'attelait à faire mes devoirs pendant que mes frères et sœurs glandaient devant la télé", explique-t-elle au Daily Mail (en anglais). Même démarche avec le sport : Eugenie demande à sa mère de l'inscrire au tennis. Mais, rapidement, elle s'ennuie pendant les cours destinés aux enfants. Elle veut se frotter au vrai tennis. "Elle jouait avec une raquette et une balle dans la cave. C'est devenu problématique quand elle s'est mise à casser des choses", se souvient son père Mike, dans le Toronto Sun. Le professionnalisme, déjà. "Ma sœur a raccroché la raquette à 6 ans, lâche-t-elle en riant sur la télévision canadienne CTV. Et ma mère a arrêté de me battre au tennis quand j'avais 8 ans." A 12 ans, elle demande à suivre l'entraînement de Nick Saviano, un ancien pro qui enseigne en Floride (Etats-Unis). Trois ans plus tard, c'est encore elle qui décide qu'il est temps de rentrer au pays.

Vous avez dit "Robocop" ? "Le tennis, c'est mon job", estime Bouchard, interrogée par Sports Illustrated (en anglais). Voilà qui change du discours habituel sur la passion, le-rêve-devenu-réalité et autres lieux communs tenu sur le circuit professionnel. "Dure moi ? Je ne dirais pas ça, s'est-elle défendue dans le quotidien australien The Star. J'ai pleuré après quelques matchs quand j'étais plus jeune. Quelques défaites particulièrement dures. Mais pas récemment, non."

Eugenie Bouchard fête sa victoire en quarts de finale à Roland-Garros, contre l'Espagnole Carla Suarez-Navarro, le 3 juin 2014 à Paris. (JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS)

"Je ne veux pas être la nouvelle Sharapova"

N'empêche, c'est elle la nouvelle tête de gondole de la WTA, l'organisation qui chapeaute le circuit féminin. Les vedettes actuelles, comme Maria Sharapova ou Serena Williams, étant sur la pente descendante, elles laissent la place à une nouvelle génération, emmenée par Eugenie Bouchard ou la jeune Roumaine de 26 ans, Simona Halep. "Je n'ai pas besoin d'étoiles filantes, a crûment résumé Stacey Allaster, responsable de la WTA, citée dans The Oregonian. Ce dont j'ai besoin, c'est un produit compétitif sur le long terme, avec des rivalités entre joueuses."

Être la nouvelle icône marketing du tennis, Eugenie Bouchard "s'en tape", comme elle l'a expliqué à Tennis.com. "Je ne veux pas être la nouvelle Maria Sharapova, je veux être la première moi." La joueuse russe, qui s'est autant distinguée ces dernières années sur les courts qu'en lançant sa marque de bonbons ou par ses shootings photo en tenue légère sur le capot de voitures de luxe, appréciera. 

Pourtant, c'est elle qui a été la première idole de "Genie". A 17 ans, Sharapova remporte Wimbledon, en 2004. Eugenie suit le match à la télévision. Pour ses débuts, elle obtient de Nike de pouvoir jouer dans les vêtements dessinés par la championne russe. "J'essaie de jouer comme elle", confie-t-elle au site CBC, en 2013. Depuis, les relations entre les deux joueuses se sont rafraîchies. Comme avec son amie Laura Robson, avec qui "Genie" avait monté une vidéo de "Gangnam Style" mémorable, avec des passages dansés sur la grande muraille de Chine et des cameos de Jo-Wilfried Tsonga... et Maria Sharapova.

Elle s'en est expliquée en interview. Si le succès l'a éloignée de Robson, ce sont les comparaisons incessantes avec Sharapova qui l'ont poussé à prendre ses distances avec son idole. Sans oublier qu'elle a réalisé qu'elle ne pouvait pas avoir d'amie sur le circuit. "Je suis sympathique avec tout le monde, sans doute plus avec les joueuses qui parlent anglais, mais je ne dirais pas que j'ai des amis sur le circuit. C'est dur pour moi d'avoir des amies et de les affronter sur le court." La gaffe de la version québécoise du magazine Elle, qui a publié par erreur deux photos de Sharapova dans un large dossier consacré à Bouchard, n'a pas dû améliorer la situation. 

La "Genie Army" en veut toujours peluche

Dans les tribunes, c'est une autre histoire. Eugenie Bouchard est la seule joueuse à avoir son propre kop, comme au football. Tout commence sur le court n°15, le plus petit et le moins prestigieux de l'Australian Open 2014. La Canadienne séduit aussitôt une bande de six étudiants, qui cherchaient un joueur à soutenir. "D'abord pour son talent. Mais elle très jolie, ce qui ne gâche rien", confesse l'un d'eux, qui la connaissait depuis les juniors. La "Genie Army" est née.

Avec un rituel bien établi : les tee-shirts, les chants... Et le jet de peluche à la fin du match. "On voulait lui remettre en mains propres après sa victoire, sauf qu’elle ne nous a pas entendus, alors on l’a lancée... et elle l’a frappée derrière la tête, explique Jacob Courios au Journal de Montreal. Elle était un peu sous le choc, mais elle nous a dit merci. Elle s’est présentée avec la peluche en conférence de presse, et c’est là que tout a commencé."

Après chaque victoire, Eugenie a droit à son "trophée". Pendant son fantastique Open d'Australie - elle atteint les demi-finales en étant classée 30e mondiale - son agent s'arrange pour trouver des places à la bruyante "Genie Army". Koala, kangourous, Eugenie Bouchard a désormais une soixantaine de peluches. La "Genie Army" est devenue une franchise, faisant des petits dans une dizaine de pays. "Le problème, c'est qu'à cause des peluches, je dois payer un excédent de bagages à l'aéroport", sourit-elle.

A 20 ans, elle rêve de Justin Bieber

Ses bons résultats, son look avenant et la "Genie Army" lui valent une popularité mondiale : "J'ai déjà signé des autographes sur des bras, des visages, et refusé quelques demandes en mariage", s'amuse-t-elle dans Sports Illustrated (en anglais). "Elle a tout : la personnalité, le jeu, et le physique", a résumé son agent Sam Duvall, dans le Telegraph (en anglais). Récemment, le New York Times s'est fendu d'un portrait fleuve de la jeune femme, intitulé "Eugenie Bouchard, le prochain gros coup du tennis". On y apprend notamment qu'elle mange encore des petits pots pour bébé. Faut-il y voir un lien avoir sa hantise de vieillir ? Ou le fait qu'elle ne passe pas son permis de conduire ? Ce n'est pas demain la veille qu'on la verra au volant. "J'ai trop peur", confesse-t-elle. Ce qui oblige sa mère à se transformer en chauffeur à chaque étape du circuit WTA.

La "Genie Army" lui a même pardonné son pire faux-pas depuis le début de sa carrière. Interrogée par le speaker de l'Open d'Australie pour savoir avec qui elle aimerait avoir un rencard, elle a répondu après quelques secondes de réflexion "Justin Bieber", s'attirant les sifflets du public. 

"Ça va bien finir par arriver, analyse-t-elle quelques mois plus tard dans le Toronto Sun, alors que le chanteur canadien, né quatre jours avant elle, ne s'est manifesté que par un tweet sibyllin. Il faut que je fasse quelque chose de plus fort, gagner un tournoi du Grand Chelem par exemple ! " On vous redonne, à tout hasard, la date de la finale dames de l'US Open : le 6 septembre.

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