Tahiti invité au festin à la table des grands
Jamais depuis sa création en 1992 la coupe des Confédérations n’avait accueilli un champion continental aussi peu côté. Mais c’est là la loi du terrain. 135e au classement mondial FIFA, Tahiti doit sa présence au Brésil à son titre de champion d’Océanie 2012. L’an dernier, les « Toa Aito » (guerriers de fer, en tahitien) se sont imposés à la surprise générale à Honiara, aux îles Salomon, en finale contre la Nouvelle-Calédonie qui avait éliminé les favoris néo-zélandais en demi-finale. Du coup, les amateurs tahitiens se sont retrouvés propulsés sur une autre planète, appelés à jouer contre des grosses nations avec, en apothéose, le 20 juin, un match contre l'Espagne, championne du monde et d'Europe, dans le mythique Maracana.
Champions d'Océanie
La participation à cette coupe des Confédérations est évidemment un changement de logiciel pour le football de Tahiti, pour son équipe qui va jouer devant 80.000 personnes alors qu’elle évolue habituellement, au mieux, devant quelques centaines de spectateurs lors de ses plus gros matches en Polynésie. Avec à la fois la satisfaction de participer à la fête et la crainte de boire la tasse. "L'objectif pour nous, c'est de ne pas prendre de but sur une mi-temps entière, mais si on peut marquer un but, ce sera une performance exceptionnelle" déclare plutôt prudent, le sélectionneur tahitien Eddy Etaeta.
"On ne nous voit pas gagner, alors la pression sera sur les autres" s'amuse Marama Vahirua, figure de la sélection, ancien joueur de première division française. Marama Vahirua, 33 ans, est le seul joueur parmi les 23 Tahitiens à avoir joué dans un club professionnel cette saison, au Panthrakikos, en première division en Grèce. Vahirua, connu en France pour célébrer ses buts avec Nantes en mimant des coups de rame en référence à ses origines polynésiennes, devra donc jouer le rôle de grand frère et de guide avec les 22 amateurs qui l'accompagnent dans le groupe tahitien cet été au pays du football roi.
Des amateurs dans le grand bain
La plupart des autres joueurs de Tahiti mènent un train de vie modeste. Un tiers environ sont sans emploi, dans une Polynésie française durement touchée par la crise. Les autres ont une vie quotidienne de salariés semblable à celle de millions de métropolitains. Cet aspect-là est aussi galvanisant pour eux qui vont affronter des stars mondiales qui gagnent des fortunes avec le foot, s'entraînent tous les jours et sont choyés par leurs préparateurs physiques.
Dans les rangs de Tahiti , les joueurs amateurs ne se consacrent exclusivement au foot que depuis deux mois, avant leur participation à cette grande compétition, leurs congés étant payés par leur Fédération. "Dans l'Histoire du football, nous sommes les premiers footballeurs amateurs à participer à une grande compétition mondiale, c'est une fierté de représenter les amateurs qui constituent 99% des joueurs" a encore souligné Eddy Etaeta.
Le coach a choisi de souder le groupe au travers d'épreuves originales, comme un duathlon à base de course de pirogues et de course à pied. Ses joueurs ont aussi été préparés aux ambiances qu’ils vont rencontrer à l'aide de haut-parleurs qui ont diffusé les cris et les sifflets de dizaines de milliers de spectateurs… Histoire de ne pas être trop tétanisés.
Si la Coupe des Confédérations est de loin le plus grand événement sportif auquel aura participé cette sélection de la Polynésie française, peuplée de 270.000 habitants, sa présence au Brésil n’est pas toutefois totalement ni un hasard. L'équipe tahitienne des moins de 20 ans s’était qualifiée pour la Coupe du Monde de la catégorie en Egypte en 2009, sous la houlette de Lionel Charbonnier, l’ancien international auxerrois, alors DTN à Papeete. Et de fait, parmi les 23 tahitiens retenus par Etaeta, l’ex-adjoint de Charbonnier devenu sélectionneur, on retrouve dix joueurs qui étaient dans ce groupe là. Alors certes, Tahiti avait connu de cuisantes défaites, mais au moins, les hommes ont un vécu international, et un peu plus de maturité pour tenter de faire bonne figure.
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