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Thibaut Fauconnet : "Le sport de haut niveau est un truc de gamin"

Il est la figure de proue du short-track en France. Thibaut Fauconnet a terminé la Coupe du monde fin novembre et peaufine désormais sa préparation pour les Jeux Olympiques de Pyeongchang (9-25 février 2018). Rencontre avec un sportif pas comme les autres.
Article rédigé par Christophe Gaudot
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
 

Thibaut, quel regard portez-vous sur votre saison de Coupe du monde qui s'est achevée fin novembre ?

Thibaut Fauconnet : "Une saison positive. À titre individuel, la saison s’est bien passée. Il n’y a pas eu de médaille malheureusement mais de bonnes performances sur le 1 500 mètres. Je fais deux finales A sur quatre manches, avec une troisième et une quatrième place mais je suis pénalisé. C’est mon style, parfois ça passe, parfois non…Et quand je n’ai pas été dans la finale A, je suis dans la B et je la gagne. C’est positif, si je fais ça aux Jeux, je considérerai mes Jeux comme réussis. Si je suis en finale A, tout peut arriver pour la médaille. Comme j’ai fait un podium, je me dis que c’est possible aux Jeux. Si je fais la même chose, je prends la médaille olympique donc très satisfait de cette saison de Coupe du monde sur le plan individuel."

La déception, c'est le relais....

T.F. : "C'est le gros point noir. Je suis très déçu, de moi-même surtout. On a des équipiers très jeunes qui étaient très bons, c’était des tauliers du relais. On a essayé de monter ce relais en huit mois. Le but était d’être performant pour les qualifications olympiques.. J’ai été très chiant, peut-être un peu trop même mais il fallait leur apporter tout ce que je pouvais en deux secondes. Huit mois à l’échelle d’une préparation olympique, c’est deux secondes. Ça a marché parce qu’ils ont été vraiment bons. Sur les deux dernières Coupes du monde, on sort coup sur coup l’équipe championne du monde, les Pays-Bas. C’était magique. Ils ont été très bons, il aurait fallu que les Jeux soient en 2019 et pas en 2018. Je suis très déçu, j’aurai tellement voulu être avec eux aux Jeux, avec ces idiots."

Le short-track est encore un petit sport en France mais à Font Romeu il dispose d'un centre d'entraînement de tout premier ordre.

 T.F. : "Ça a tout changé car c’était le premier centre d’entraînement à la hauteur de nos espérances. On a eu un centre d’entraînement à Albertville pour préparer les Jeux de Vancouver (2010) mais c’était de la dernière minute, de la bricole totale. On s’entraînait très tôt puis entre 12h et 14h. Pendant quasiment deux ans, j’ai pris mon repas de midi à 10h le matin, c’était affreux. Avant ça j’étais à Dijon. Ils ont tout fait pour que ça se passe bien mais la patinoire n’était pas aux dimensions olympiques donc il a fallu évoluer. Font Romeu a été une superbe découverte. On a tout sur place, les piscines, les centres de récupération, les kinés, les docteurs, la piste d’athlétisme, la piste de roller, la patinoire. C’est immense et génial. Un outil parfait pour nous. C’est la seule patinoire dédiée à l’entraînement. Toute les nations viennent s’entraîner à Font Romeu. Cet été il y a eu les Kazakhs, les Polonais, les Hollandais, les Coréens. C’est dire à quel point il est bien."

"Aller le plus vite possible, être le premier à l’arrivée et mettre une combinaison de super-héros"

Vous avez vu grandir ce sport en France.

 T.F. : "On ne l’a pas vu grandir, on a fait grandir le short-track. S’il n’y avait pas eu nous, les athlètes, il n’y aurait pas ça. Ce que les jeunes ont, c’est génial, on n’avait pas ça nous. C’est une vraie fierté d’avoir participé à tout ça. On peut encore mieux faire mais c’est déjà bien."

Comment êtes-vous venu au short-track ?

 T.F. : "L’histoire est belle. J’ai commencé à huit ans, mes parents sont assez sportifs donc je faisais plein de sport. J’en ai fait plein d’autres aussi après en même temps que le short track. Mes parents me demandent ce que je veux faire et ma mère me dit que j'aime bien aller à la patinoire pour le centre aéré. Elle m’y emmène en septembre et c’est là que l’histoire est belle : le mec qui m’accueille me demande ce que je veux faire, je lui réponds : 'de la course'. Et c’était parti. Il m’a emmené du jour zéro jusqu’à la qualification pour les Jeux 2006, je ne les ai pas faits mais j’étais déjà en équipe de France. Il s’appelle Christian Liabot, c’est le Philippe Lucas du short-track."

Vous avez une vision très "enfantine" de votre sport...

 T.F. : "Le sport de haut niveau est un truc enfantin. Dans le sport de haut niveau, il faut être le plus gros gamin sur la glace. On fait la course, c’est un truc de gamin dans la cour de récré. Par contre, en dehors il faut être le plus mature possible pour pouvoir tout mettre en oeuvre pour être le plus performant possible au moment où il faut redevenir un gamin. Il faut être capable de switcher. C’est là-dedans que je pense être pas trop mauvais… Mon sport je le définis comme ça : 'Aller le plus vite possible, être le premier à l’arrivée et mettre une combinaison de super-héros'."

"Quand tu es dans la course, l'enjeu n'existe plus"

Quel est votre rapport au stress ?

 T.F. : "Je l’ai défini justement, le stress est un truc qui te fait avancer, il faut s’en servir. sans stress, rien n’aurait été possible. Le stress n’est pas la peur et la peur n’enlève pas le danger. Ce sont des phrases toutes faites mais elles sont tellement vraies."

Et à l'enjeu ?

 T.F. : "L’enjeu n’a rien à voir avec la course. L’enjeu c’est ce que tu mets avant. Le résultat est ce qui vient après. Ce sont des moments distincts. Tu dissocies tout. Quand tu es dans ta course, l’enjeu n’existe plus parce que tu l’as abordé avant et tu as tout mis en oeuvre pour l’atteindre et le résultat n’existe pas encore parce qu’il va venir et ce sera le moment de faire le bilan après."

 Et enfin la confiance ?

 T.F. : "La confiance est importante dans notre sport mais aussi et surtout par rapport aux autres. J’ai gagné un nombre incroyable de course avant de les disputer. J’étais sur la ligne, je savais déjà que j’avais gagné. Les autres le savent aussi, c’est ça le plus dur et je l’ai déjà ressenti." 

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