Sport et environnement : "dans certains endroits en France, il ne sera plus possible de courir la journée", alerte WWF France
Dans un rapport publié mardi, WWF France alerte sur les multiples conséquences du réchauffement climatique sur la pratique du sport.
À l'heure où la préservation de l'environnement est devenue une préoccupation importante, y compris pour les supporters, l'ONG WWF France s'est intéressée à l'impact du changement climatique sur la pratique sportive dans l'Hexagone. Dans un rapport publié mardi 6 juillet et intitulé "Dérèglement climatique : le monde du sport à +2°C et +4°C", l'organisation spécialisée dans la protection de l'environnement et de la biodiversité, alerte sur l'impact de ce phénomène sur nos activités physiques. Quelles en seront les conséquences concrètes ? Éléments de réponse avec Arnaud Gauffier, directeur des programmes au WWF France.
Quel est le but de ce rapport ?
Arnaud Gauffier : La thématique de l'environnement dans le monde du sport est relativement absente. Avec ce rapport, nous voulons alerter l'opinion publique, les pouvoirs publics et les fédérations sportives : nous souhaitons montrer que le changement climatique ne se résume pas à des canicules au Canada (en référence au record de chaleur enregistré à Lytton), à l'augmentation du niveau de la mer au Sénégal, ou à la fonte de la neige qui va priver de ski la partie la plus aisée de la population française. Le dérèglement climatique, c'est quelque chose qui va toucher au quotidien tout le monde et tous les sports.
Quelles sont les conclusions de ce rapport ?
Des pratiques aussi simples et répandues que le running vont énormément changer : dans certains endroits en France, et surtout dans le sud, il ne sera plus possible de courir la journée tellement il fera chaud par exemple. Il faut savoir qu'au-delà de 32°C, la pratique sportive est déconseillée car elle peut être dangereuse pour la santé.
Pour ce rapport, nous avons imaginé deux scénarii : un lors duquel le réchauffement climatique atteint +2°C, et un autre avec un réchauffement à +4°C. Selon les prévisions du GIEC (le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), à +2°C, un scénario qui pourrait arriver d'ici 2050, il y aura 9 jours supplémentaires lors desquels la température va dépasser les 32°C et donc lors desquels la pratique sportive sera dangereuse. À +4°C, ce qui serait observable autour de 2090, ce sont 22 jours en moins lors desquels on pourra faire du sport.
Concrètement, à quoi faut-il s'attendre ?
Jouer au rugby dans le sud-ouest va devenir compliqué à l'avenir. Faire des plaquages nécessite de jouer sur un terrain souple, pas sur du sable ni de la terre, or l'herbe aura du mal à pousser dans cette partie-là du pays à cause de la chaleur - et quand bien même elle pousserait, elle serait soumise aux inondations l'hiver. Le centre névralgique de ce sport pourrait migrer vers le nord de la France. Cela va aussi toucher la moitié des salles de sport, celles construites en béton et qui ne sont pas adaptées pour encaisser des chocs climatiques comme les canicules. Ce ne sont que quelques exemples, mais tous les sports vont être impactés.
Toutes ces conséquences posent aussi des questions d'accessibilité, avec tous les impacts sur la santé publique que le manque d'exercice implique. Le sport est une activité populaire par nature : cela coûte peu cher de faire du running ou du football par exemple. Mais si demain la course ou le football deviennent des activités uniquement praticables dans des salles de sport climatisées payantes, alors le sport deviendra tout de suite moins accessible aux classes les plus précaires.
Enfin, cela va avoir un impact sur les performances sportives : dans le monde qui vient, on pourrait ne plus battre de records dans certaines disciplines comme le marathon par exemple. Avec les fortes chaleurs, en courir un sous la barre des deux heures deviendra beaucoup plus compliqué.
Vous énoncez un certain nombre de recommandations pour limiter les dangers. Quelles sont-elles ?
Il faut que les acteurs du sport commencent dès maintenant à adapter leurs pratiques sportives, un sujet pour l'heure assez absent. Il est aussi important qu'ils adoptent une politique ambitieuse de transition écologique du sport autour de différentes thématiques comme l'alimentation, la gestion des déchets, les transports. Certains organisateurs de grands événements prennent des engagements sur le climat comme Paris 2024, qui a pour ambition de devenir le premier grand évènement sportif à compenser plus d'émissions de CO2 qu'il n'en émet. Créer des outils d'observation du sport et du climat serait aussi une bonne manière d'évaluer l'impact de l'activité physique sur l'environnement.
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