Rugby, l’enfer du décor, les jeunes et les amateurs également touchés par le dopage
Fin novembre 2015, le match de Fédérale 2 entre Figeac et Cahors est le théâtre d'un derby. C'est forcément un match particulier. Cette confrontation l'est d'autant plus qu'une opération antidopage est diligentée. A l'origine: des rumeurs de dopage dans ce milieu amateur. Et c'est Christophe Bassons, correspondant inter-régional antidopage pour la région Aquitaine, qui est à la manoeuvre, avec le procureur de la République. Christophe Bassons, vous le connaissez certainement. En 1998, il était l'un des trois coureurs de l'équipe Festina à ne s'être pas dopé dans l'immense scandale Festina. L'année suivante, il avait préféré mettre un terme à son Tour de France, face à la pression exercée par le peloton sur lui, et notamment Lance Armstrong qui avait alors dit face aux prises de position du Français concernant le dopage dans son sport: "S'il pense que le cyclisme fonctionne comme cela, il se trompe et c'est mieux qu'il rentre chez lui."
Vidéo: Le sport amateur pas épargné selon Christophe Bassons
A 42 ans, Christophe Bassons est donc arrivé sur le lieu de cette rencontre, avec une quinzaine de gendarmes et le personnel nécessaire aux tests antidopage, après la mi-temps. "On avait eu des informations sur des pratiques dopantes. Et le rugby nous posait des questions", explique-t-il à Thierry Vildary lors de son entretien. "C'est un sport d'impact, et en Fédérale 1 ou 2, c'est un moyen d'exister, d'avoir des revenus complémentaires, et d'accéder au sport de haut niveau." Dix joueurs sont ainsi contrôlés, et les tests se révéleront positifs pour trois d'entre eux. "3/10, c'est lourd", assure Bassons, qui précise que l'un d'eux était positif à un anabolisant. Une surprise pour lui, même s'il estime que le niveau amateur n'est pas plus épargné que les professionnels. Pour lui, le problème "n'est pas d'avoir les meilleurs produits, mais c'est de savoir bien les prendre."
Les jeunes en quête de masse musculaire
Rémi a également accepté de parler face à la caméra. Il reprend une activité physique après avoir entendu pendant cinq ans qu'il ne pourrait plus refaire du sport. Il est pourtant jeune. Mais une hernie discale lui a été diagnostiquée, alors qu'il n'avait que 16 ans. "Ce n'est pas un mauvais coup, ça a été fait par l'usure", estime-t-il. Parmi les facteurs qu'il pointe du doigt, la prise de poids. Car depuis très jeune, il court après les kilos, afin de faire face au défi physique du rugby. A 15 ans, il ingurgite 4500 calories par jour. En une intersaison, entre sa 1re et sa 2e année en cadet, il passe de 105 à 115kg. "Je m'entraînais beaucoup, et je prenais beaucoup de compléments alimentaires." Car à cette époque, il fait partie d'un grand club français, dans les catégories de jeunes. "A cet âge, on pense à être sur la feuille de match tous les week-ends, c'est tout. Mais à cet âge, on est capable de réfléchir sur d'autres moyens que l'entraînement. Et on en a les moyens".
Vidéo: Extrait des confessions de Rémi
Des compléments alimentaires vendus en pharmacie, d'autres produits achetés sur internet avec une carte bancaire d'amis majeurs, tous les moyens sont bons pour tenir le coup. "Quand on lit les notices des compléments alimentaires, c'est précisé que c'est un traitement de 3 à 6 mois. Moi, ça a été 18 mois d'affilée. Tout ce que je voyais, c'était les effets. On a une sensation d'être invincible. Je ne sais pas ce qu'il y avait dedans, mais quand on voit les effets, on peut lier ça aux stéroïdes, aux anabolisants. Mais je ne peux pas le certifier." Rémi n'a jamais été contrôlé. Il évoque la pression du statut social, lorsqu'on est membre de l'équipe de jeunes d'un grand club. Il parle aussi du rêve de jouer en Top 14. "A 15 ans, la vision de l'avenir s'arrête à 25 ans", estime-t-il. Sauf qu'un jour, il a ressenti des douleurs, qui l'empêchaient de dormir la nuit, et de courir. "Si cette blessure n'était pas arrivée, j'aurais pu aller plus loin, et j'aurais certainement eu des problèmes de types rénaux".
Le dopage chez les jeunes, cela inquiète beaucoup dans les pays anglo-saxons, comme en Grande-Bretagne, où de jeunes joueurs ont été suspendus pour dopage. C'est aussi le cas en Afrique du Sud, où entre juin 2015 et avril 2016, 18 joueurs de rugby ont été contrôlés positifs, mais seulement deux qui évoluent en Super Rugby, c'est-à-dire au top niveau.
Le reportage de Stade 2 à voir en intégralité dimanche à 16h35 sur France 2
Vidéo: Extrait de "Rugby, l'enfer du décor"
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