Mondial-2015: déjà plus de blessés qu'en 2011
Le "taux de blessures n'a pas changé depuis 2002". Voilà ce que World Rugby, la fédération internationale, a déclaré à l'AFP. Pourtant, force est de constater que les blessures foisonnent lors de cette Coupe du monde 2015. L'image marquante, c'est cette équipe du Pays de Galles, qui a perdu trois joueurs en quatre minutes lors du match contre l'Angleterre. La formation de Warren Gatland poursuivait ainsi sa triste dynamique, débutée avant même la Coupe du monde avec les forfaits des cadres Jonathan Davies, Leigh Halfpenny ou Rhys Webb. Au total, le XV du Poireau, qui affronte samedi l'Australie avec la première place pour enjeu, a laissé sept joueurs sur le bord de la route (Davies, Halfpenny, Webb, Walker, Allen, S. Williams, Amos). L'Italie en a fait autant (Castrogiovanni, Garcia, Rizzo, Masi), soit deux fois plus que les Fidji (Nayacalevu, Colati), l'Australie (Skelton, Palu). Avec un seul blessé, la France (Huget), l'Angleterre (Vunipola), l'Afrique du Sud (De Villiers), l'Ecosse (Gilchrist), la Géorgie (Kubriashvili) le Canada (Braid), et la Roumanie (Tonita) s'en sortent bien.
Et le malheur de ces rugbymen n'est pas un cas isolé. Sur les 20 équipes engagées, onze ont perdu au moins un membre de son équipe de départ pour le reste de la compétition. Parmi les ténors, seuls les Néo-Zélandais, les Irlandais et les Argentins n'ont pas à déplorer de blessure grave. Mais les forfaits sont désormais devenus le quotidien du rugby moderne. Les raisons sont multiples.
Plus de temps de jeu, plus de rucks
Selon World rugby, depuis 1995 et l'arrivée du professionnalisme, le temps de jeu a explosé, passant en moyenne de 20 à plus de 35 minutes entre 1987 et 2011. Surtout, la structure des matches a changé. Le nombre de pénalités (-16%), de touches ou mêlées (-35 à 37%) a considérablement baissé. En revanche, le nombre de points de rencontres (mauls et mêlées ouvertes) a bondi de... +135%. C'est là que les contacts sont les plus rudes. Lorsque des joueurs lancés "déblayent" des joueurs arrêtés, occupés à protéger le ballon. "Ce n'est pas une Coupe du monde 'à toucher'. On est dans un rugby où la dimension physique est devenue primordiale, où toutes les nations sont bien préparées, et pas que les quatre-cinq meilleures", souligne le sélectionneur du XV de France Philippe Saint-André.
Le professionnalisme, qui a débuté en 1995, a fait des rugbymen des athlètes complets. Plus d'entraînements, un meilleur suivi, toujours plus de musculation, tout cela produit ces effets. "Les équipes qui remportent les Coupes du monde, celles qui sortent des poules pour aller en quarts, en demies ou en finale, présentent graduellement des avants qui sont significativement plus lourds", remarque Adrien Sedeaud, chercheur à l'INSEP et auteur d'une étude sur l'évolution des rugbymen depuis la première Coupe du monde en 1987 jusqu'à celle de 2011. Poids, taille, masse corporelle, tous les indicateurs sont à la hausse, comme nous le montrons dans le grand format intitulé "Rugbymen, le physique de l'emploi".
Guy Novès: "Un moteur de Ferrari dans une caisse de 2CV"
Pour Christophe Mombet, ancien adjoint de Pierre Berbizier en équipe de France et maintenant responsable du centre de formation du Racing-Métro, "le rugby de haut niveau nécessite d’être prêt physiquement. Mais même prêts, les joueurs ont des articulations qui ne sont pas préparées." Dans Télérama, Guy Novès, futur sélectionneur du XV de France à l'issue de ce Coupe du monde résumait: "Le joueur est physiquement beaucoup mieux préparé, il est équipé de bien meilleures protections, et pourtant ses articulations et ses tendons craquent de plus en plus. Pourquoi ? Parce que si le muscle grossit, le tendon, lui, reste identique. Si vous mettez un moteur de Ferrari dans une caisse de 2CV, elle sortira dans les virages."
A moins de dix jours des quarts de finale et des chocs entre les meilleures nations du monde, le bilan n'est pas encore clos.
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