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Coupe du monde de rugby : "On ne travaillait pas avec la vidéo, on était moins préparés", se souvient Philippe Sella, en comparaison avec l'actuel XV de France

L'ancien international aux 111 sélections entre 1985 et 1992 profite de la Coupe du monde pour livrer son regard sur la professionnalisation du rugby.
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Philippe Sella en tant que manager général du club d'Agen, où il a débuté le rugby, le 24 août 2019. (THIERRY BRETON / AFP)

Une demi-finale d'anthologie face à l'Australie puis la première finale de Coupe du monde du XV de France en 1987, trois Tournois des cinq nations (1987, 1989 et 1993), 30 essais en bleu et des chevauchées fantastiques, plein centre. C'est ce que laissera, entre autres, Philippe Sella dans le palmarès du rugby tricolore et dans l'imagerie populaire. Toujours présent dans le monde du rugby, en particulier amateur, l'ancien capitaine des Bleus aux 111 sélections (1982-1995) regarde la Coupe du monde 2023 d'un œil attentif. L'ex trois-quarts centre, aujourd'hui âgé de 61 ans, a répondu aux questions de franceinfo: sport sur l'évolution du rugby ces 30 dernières années.

Franceinfo: sport : Quelle est la différence entre jouer une Coupe du monde maintenant et à votre époque ?

Philippe Sella : Nous, lors de notre entrée en lice, on a découvert beaucoup de choses. Il fallait déjà qu'on essaie de capter un nouvel environnement. On se disait “waouh c’est ça qu’on voudrait, être professionnels." Comme le XV de France d'aujourd'hui, on a dû suivre une grosse préparation sauf que nous, il fallait que ce soit sur notre temps libre, après le boulot. La récupération physique était plus délicate parce qu'on n’était pas habitués à enchaîner autant d’heures de rugby. Tactiquement, c'était aussi différent, on ne travaillait pas avec la vidéo. On était beaucoup moins préparés.

De plus, on était amateurs, on travaillait à côté. Aujourd’hui les joueurs sont complètement dédiés au rugby. Ils peuvent parfois mener des actions personnelles en parallèle, c'est très bien parce que leur sport leur permet de créer du lien avec des entreprises, mais leur priorité reste quand même le rugby. Les joueurs doivent maîtriser un environnement très différent du nôtre à l'époque. Mais ils y sont habitués, on le voit dans cette Coupe du monde, ils connaissent le fonctionnement de tout ce système du très haut niveau.

Cette professionnalisation a-t-elle modifié les valeurs du rugby ?

Le fond de ce sport ne peut pas changer. L’éducation du rugby commence relativement jeune. Désormais, les joueurs ont la chance d’avoir des entraînements supplémentaires dès le plus jeune âge, pour être mieux préparés, alors qu’avant c’était une fois par semaine. Ils gagnent donc du temps dans l'apprentissage des différents aspects techniques et physiques nécessaires à ce sport. Les fameuses valeurs du rugby sont donc découvertes à ce moment-là, dès tout jeune. C'est ça qui a changé.

Ils évoluent aussi plus vite dans la relation à avoir avec les autres, ils apprennent ce qu'est le collectif, la communication et le soutien.

Philippe Sella, ancien capitaine et trois-quarts centre du XV de France

à franceinfo: sport

Le fait que le rugby soit devenu professionnel peut-il créer encore plus de vocations ?

Les jeunes aujourd’hui peuvent plus se projeter. Lorsqu'ils découvrent leurs qualités, leurs capacités, ils peuvent se dire : "Ah il y a tel club qui s’intéresse à moi, ça me plairait peut-être de devenir professionnel”. Alors qu'avant on imaginait juste s'entraîner deux fois par semaine, jouer un match le week-end et faire son job à côté. C’est donc comme ça que, petit à petit, les joueurs confirment et assument leur plaisir à pratiquer le rugby et développent encore plus de compétences, même s’ils doivent suivre une double formation.

De gauche à droite, Philippe Sella, Daniel Dubroca, Abdelatif Benazzi, Christophe Lamaison lors des retrouvailles du "XV de Légende" organisées par Canon, fournisseur officiel de la Coupe du monde de rugby 2023, le 20 septembre 2023. (Canon)

Le double projet reste-t-il nécessaire aujourd’hui ?

On ne sait jamais si le joueur va devenir professionnel ou pas. Et s’il le devient, il peut quand même y avoir autre chose après la vie de rugbyman, c'est même mieux parce qu'on ne peut pas vivre éternellement du rugby. Il y a d’autres sports où c’est possible mais pas chez nous. C’est pour ça que la double formation est importante chez les jeunes rugbymen, ça leur permet de faire cette transition plus facilement. Il faut absolument les aider pour qu’ils arrivent à obtenir leur diplôme en parallèle du rugby, parce qu’on ne sait jamais.

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