Roland-Garros : le bilan du tournoi femmes par Justine Henin
Que retenez-vous de cette édition 2018 chez les femmes ? Entre l'élimination rapide de la tenante du titre Ostapenko, les retours de Serena Williams ou de Maria Sharapova à Paris, la belle performance de Daria Kasatkina et les performances de Sloane Stephens ou Simona Halep, quel bilan faites-vous ?
Justine Henin : "De manière générale, je dirais que le bilan est un peu décevant à mes yeux parce que c’est vrai qu’on n’a pas vu beaucoup beaucoup de matchs qui nous ont emportés. Bon, Jelena Ostapenko, je pense que c’était une demi-surprise. Vous savez quand vous gagnez comme ça un Grand Chelem et que ça pose sur vos épaules, c’est bien que ce soit derrière et pouvoir passer à autre chose. On a déjà expérimenté ça à beaucoup de reprises. On attendait beaucoup le retour de Serena (Williams), on attendait ce fameux match contre Sharapova. On sent que les retours ça reste compliqué. Bon, Serena a quand même montré des choses vraiment intéressantes. Elle a surtout montré qu’elle voulait être en pleine possession de ses moyens pour être sur le court et je crois qu’elle a raison. Elle a gagné tellement de choses qu’elle doit pouvoir être en mesure de continuer à être à 100% de ses moyens physiques pour s’imposer."
Y a-t-il d'autres joueuses qui vous ont agréablement surprise ?
JH : "Oui, pour le reste, il y a quelques filles qui devaient être au rendez-vous et qui le sont. Je ne suis pas surprise par Simona Halep, j’étais heureuse de la bonne prestation de Daria Kasatkina, retrouver deux Américaines en demi-finales il y avait un côté intéressant. Il m’a juste manqué des matchs accrochés. J’ai beaucoup aimé Kerber - Halep, j’ai trouvé que là il y avait un véritable combat. C’est pour moi probablement le match du tableau féminin jusqu’à présent (entretien réalisé avant la finale, NDLR)."
Un mot sur les Françaises. Encore une fois leurs performances ont été en demi-teinte à Roland. Comment est-ce que vous l'expliquez et quelles sont les pistes pour aller plus loin en Grand Chelem
JH : "Je crois qu’il y a un élément important à mettre en avant. Oui, c’est compliqué pour les Françaises à Roland-Garros et ça je peux essayer de le sentir. Moi je n'ai jamais trop aimé jouer en Belgique parce qu’il y a beaucoup de pression. Ici en plus on parle d’un Grand Chelem… D’une part c’est beaucoup sur leurs épaules et d’autre part ce ne sont pas encore des filles qui ont mentalement les capacités d’aller au bout d’un Grand Chelem. J’aime beaucoup le jeu de Caroline Garcia, sa manière de penser les choses, je crois qu’elle est dans la bonne direction mais comme elle l’a dit, elle est très lucide : « en Grand Chelem, ça ne suffit pas encore ». Elle n’est pas encore en mesure de produire son meilleur tennis à ce moment-là. C’est avec l’expérience, c’est avec l’audace, avec la capacité à mieux gérer les moments importants qu’elle va y arriver. C’est sûr que pour le public français c’est une grosse déception cette année mais ce sont des conditions toujours très particulières pour elles."
"Ce ne sont pas encore des filles (les Françaises) qui ont mentalement les capacités d'aller au bout d'un Grand Chelem"
Aujourd'hui (dimanche) se dispute la finale messieurs. Rafael Nadal visera un onzième sacre à Paris face à Dominic Thiem. L'Autrichien a-t-il des chances de renverser le maître des lieux ?
JH : "Il en a déjà, c’est évident. À partir du moment où vous avez deux joueurs qui rentrent sur le terrain avec la même hargne, la même rage de vaincre… Mais il y a une question quand même, c’est celle de détrôner Nadal dans sa forme actuelle. Il sera un jour détrôné à Roland-Garros. Est-ce que ce sera parce qu’il arrêtera sa carrière et essaiera de passer à autre chose ou parce que son niveau de jeu aura fortement baissé, je ne sais pas. Mais à l’heure actuelle, avec le niveau de jeu qui est le sien, la situation va être très très compliquée. Il détient les clés ici et celui qui voudra aller les chercher - en l’occurrence Dominic Thiem - devra être à son top niveau avec très peu de failles, très peu de moments de faiblesse. Parce que j'ai l'impression que Nadal a plus envie que jamais. Ça ne s’arrête jamais avec lui, il en veut toujours plus, il aime ça et je pense que ça va être extrêmement compliqué pour Thiem même si je suis complètement fan du jeu de l’Autrichien. Il n’est pas que puissant, c’est un garçon qui réfléchit sur le court, qui joue de manière intelligente et capable de trouver beaucoup de zones. Mais est-ce que mentalement et physiquement ça va tenir ? Parce que contre "Rafa", il faut être au top tout le temps."
Si vous deviez donner un pourcentage de succès pour l'un et l'autre, quel serait votre pronostic ?
JH : "70/30 pour Nadal je dirais."
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