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Pourquoi les clubs de football bataillent ferme pour une place européenne ?

Si le Premier ministre Édouard Philippe a mis fin à la saison de Ligue 1, la décision n'est pas encore entérinée par la Ligue de football professionnel. Des clubs comme l'Olympique Lyonnais tentent de jouer leur va-tout afin d'accrocher une place dans la plus prestigieuse des coupes d'Europe, La Ligue des champions. Car du classement final de cette saison 2019-2020 dépendra plusieurs facteurs sportifs mais aussi et surtout économiques. Des garanties qu'est en mesure d'offrir une qualification en C1 ou en C3.... À condition d'y accéder.
Article rédigé par Clément Mariotti Pons
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
  (DENIS CHARLET / AFP)

À l'arrêt depuis le 8 mars dernier, la Ligue 1 ne devrait pas reprendre "au mieux" avant août prochain. N'en déplaise à Jean-Michel Aulas, le président de l'Olympique Lyonnais.

Car non, le chef des Gones refuse que le championnat de France édition 2019-2020 en reste là. En l'état actuel des choses, l'OL terminerait à la septième place, soit en dehors des places européennes (sous réserve que soit retenue l'hypothèse d'une clôture du classement selon l'option A ou C, voir ci-dessous). Une incongruité pour un club encore en lice en Ligue des champions (vainqueur de son 8e de finale aller de Ligue des champions face à la Juventus Turin, rappelons-le). Et cela même si sa place en finale de la Coupe de la Ligue - dont, là encore, on ne saurait dire si elle pourra se tenir - face au PSG lui laisse un espoir de qualification en Ligue Europa.

Mais c'est un secret de polichinelle : Aulas comme les supporters lyonnais rêvent de C1. Un intérêt motivé aussi bien d'un point de vue sportif que financier.

La C1 sinon rien ?

La manne financière que représente la Ligue des champions est en effet considérable, en témoigne la dotation prévue par l'UEFA pour la campagne 2019-2020 :

• 15,25 millions d’euros pour chacun des 32 clubs qualifiés pour la phase de groupes, sans oublier la prime de 2,7 millions d'euros pour une victoire et 900 000 euros pour un match nul
• 9,5 millions d'euros pour les clubs qualifiés pour les huitièmes de finale
• 10,5 millions d'euros en cas de qualification pour les quarts de finale
• 12 millions d'euros pour les clubs qualifiés pour les demi-finales
• 15 millions d'euros pour les finalistes + 4 millions d'euros pour le vainqueur
• 585,05 millions d'euros divisés et redistribués en fonction du coefficient UEFA de chaque club

Une manne d'autant plus considérable qu'elle ne comprend pas le montant des droits TV ou du "market pool". Pour Michael Tapiro, directeur et fondateur de la Sports Management School, cet attrait financier est plus que bienvenu par les temps qui courent, sans occulter le prestige de la "plus prestigieuse des coupes d'Europe". "En C1, il y a un cut à passer, et il est sportif", explique-t-il. "La Ligue Europa, c'est un brassage plus large et surtout un gain économique qui est non négligeable vers lequel tendent les clubs. Mais en France, aucune équipe ou presque ne joue pour la gagner. On voit bien que l'enjeu de la C3 est financier, pas sportif. Quand on a un club qui ambitionne d'être dans les 4-5 meilleurs en France, ça l'ennuie plus qu'autre chose : plus de matches, des risques de blessures qui se multiplient et mettent l'effectif sous tension... Ce n'est pas comme en C1. C'est un peu comme la 2e coupe d'Europe en rugby. S'il n'y avait pas cet intérêt financier, aucun club ne chercherait à être européen ou presque."

À titre de comparaison, voici les montants alloués aux participants à la Ligue Europa cette saison :

• 2,92 millions d'euros pour chacun des 48 clubs qui se qualifie pour la phase de groupes, avec une prime de 570 000 euros pour une victoire et 190 000 euros pour un match nul
• Un million d'euros pour les premiers de groupes et 500 000 euros pour les deuxièmes
• 500 000 euros pour chaque club qualifié pour les seizièmes de finale
• 1,1 million d'euros pour chaque club qualifié pour les huitièmes de finale
• 1,5 million d'euros pour chaque club qualifié pour les quarts de finale
• 2,4 millions d'euros pour chaque club qualifié pour les demi-finales
• 4,5 millions d'euros pour chaque club qualifié pour la finale

Les sommes liées au classement par coefficient (84 millions d'euros au total), aux parts de marché (168 millions d'euros au total) ou aux versements de solidarité pour les participants aux tours de barrages (107,5 millions d'euros au total) viennent s'ajouter à l'addition.

Classement final de la Ligue 1 version 2019-2020 : la bataille s'annonce rude

Voilà pourquoi les dirigeants de Ligue 1 s'apprêtent à batailler ferme quant à la décision sur le classement final de cette saison. Notamment ceux de Reims, Rennes, Nantes, Lyon et Montpellier, à la lutte pour un strapontin en C3. Pour rappel, les trois options sur la table sont les suivantes :

A - Classement établi selon un ratio nombre de points obtenus/nombre de matchs joués (arrondi à la deuxième décimale) après la J28
B - Classement arrêté à la dernière journée disputée en intégralité, soit la J27
C - Arrêt du classement à l’issue de la phase aller

Le président de l'OGC Nice Jean-Pierre Rivère a pour sa part assuré "qu'il y aura une décision collégiale avec une majorité qui se dégagera". 

Paris et Lyon désavantagés si la Ligue des champions va à son terme ?

Pour les deux représentants tricolores encore engagés en Ligue des champions, le regard est aussi tourné vers l'UEFA. L'instance qui régit le foot européen doit décider de la poursuite ou non de la campagne en C1, notamment durant l'été. "Il faut être réaliste : pour que cela se fasse, il faut que tous les pays concernés soient déconfinables et déconfinés", précise Michael Tapiro. "Et pouvoir organiser cette suite de la compétition dans un endroit où il n'y a pas de risque de re-contamination... Cela me paraît inextricable". De quoi faire frémir le président du PSG Nasser Al-Khelaïfi et son homologue de l'OL, Jean-Michel Aulas...

Car derrière la proposition faite ces dernières heures par le président de Lyon d'organiser des play-offs en Ligue 1 pour les équipes du haut et du bas du classement - possiblement durant l'été - il y a aussi une problématique d'équité sportive. Si l'Allemagne ou l'Angleterre reprennent leurs championnats d'ici la fin mai-début juin alors que la France ou l'Italie sont à l'arrêt total, n'y a-t-il pas un risque d'assister à une fin de compétition à deux vitesses ? Dans ces conditions, il devient compliqué de mettre les engagés sur un même pied d'égalité. 

"Pour pouvoir poursuivre la C1, il faut que les équipes soient entraînées, opérationnelles. Et qu'avant de faire un 1/4 de finale de la Ligue des champions qui est assez violent en termes d'effort physique, il faut au moins faire 3-4 matches à bonne intensité", précise Michael Tapiro. Un scénario on ne peut plus idéaliste et qui semble, aujourd'hui, très compromis.

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