MMA : "En début de carrière, je me disais que j'aimerais vraiment éviter de croiser Francis Ngannou" confie Ciryl Gane
Celui que l'on surnomme "Bon gamin" va tenter de devenir le champion du monde d'arts martiaux mixtes (MMA) dans la nuit de samedi à dimanche aux États-Unis. Le trentenaire serait le premier Français à atteindre un tel niveau. Il s'est confié à franceinfo.
Il connaît l'enjeu et il se sait très attendu. Pourtant Ciryl Gane, 31 ans, paraît très décontracté, souriant, sûr de son destin à l'approche de ce que les commentateurs appellent déjà le combat du siècle. Le Français, originaire de La Roche-sur-Yon, va tenter, samedi 22 janvier, de ravir la ceinture de champion incontesté des poids lourds à l'UFC, la ligue la plus puissante des Arts martiaux mixtes (MMA).
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Il sera opposé au Camerounais Francis Ngannou, superstar de MMA, dans la banlieue de Los-Angeles (États-Unis). En cas de victoire, cet ancien footballeur et basketteur serait le premier Français champion du monde dans la discipline, un symbole fort alors que le MMA n'est légal en France que depuis deux ans.
Il y a beaucoup de superlatifs pour évoquer ce combat. Est-ce que vous le considérez comme un combat historique ?
On a en tout cas un "story-telling" qui a été monté autour du combat. C’est assez particulier et ça n’a jamais existé à l’UFC. L’histoire, c'est d'avoir deux gars au top, venant du même club et qui ont été entraînés par le même coach [Fernand Lopez a été l’entraîneur de Francis Ngannou à Paris, puis de Ciryl Gane]. Ça ajoute vraiment quelque chose d'assez de particulier à ce combat-là. Et au-delà de ça, je pense vraiment que nous sommes aujourd'hui considérés comme les mecs les plus forts de la planète, comme les gars les plus solides. Ce combat-là devient encore plus intéressant.
Il y a donc tout un scénario qui est en train de se construire en amont de ce combat ?
Vraiment. Et les gens aiment bien, ils aiment surfer là-dessus. Avoir deux anciens coéquipiers qui se retrouvent et qui n'ont d’autre choix que d’entrer dans la cage, c’est un bon scénario. En début de carrière, je me disais que j'aimerais vraiment éviter de croiser Francis Ngannou.
"Malheureusement, ce sera le combat inévitable"
Ciryl Ganeà franceinfo
Donc on va le faire. C'est vrai que c'est un truc assez particulier.
Comment se situe ce combat dans votre carrière puisque vous avez un parcours plutôt atypique?
C'est un aboutissement. C'est une étape importante et ça représente la dernière marche pour accéder au titre suprême, un titre mondial, et avoir ce statut de l'homme le plus fort du monde. Forcément, ça rajoute un petit quelque chose. Pour autant, je n'ai pas cette pression-là. Je pense qu'il y aura un plaisir qui sera plus important que mes autres combats, malgré la ceinture intérimaire que j'ai eue au mois d'août. Là, il y aura un sentiment encore plus particulier.
Vous avez démarré le MMA il y a quatre ans seulement. Êtes-vous surpris d’en être déjà là ?
Je suis surpris dans le sens où, quand je regarde autour de moi, personne ne l'a fait. J'enchaîne victoire après victoire. Je prends des clients, les uns après les autres. C'est vrai que personne ne l’a fait avec aussi peu d'expérience. Mais pour le coup, je suis en cohésion avec moi-même. Tout ça me paraît normal.
Est-ce un regret que ce combat n'ait pas pu être organisé à Paris, comme ça avait été envisagé à un moment ?
Un peu, oui, parce qu'on y croyait. Malheureusement, ça ne s'est pas fait. Les gens y croyaient beaucoup. En tout cas, je parle des Français. Ils auraient vraiment aimé, et pas que les fans. Dans le monde politique aussi. J'ai croisé quelques personnes, quelques acteurs qui étaient vraiment prêts à accueillir cet événement en France. Malheureusement, ça ne s'est pas fait, mais ce n'est que partie remise.
Vous répétez à l’envie que vous avez envie de casser les codes par rapport à ce sport. Qu'est-ce que ça veut dire?
Pas que par rapport au MMA. Forcément, l'image fait que je suis lié à ce sport mais ça dépasse ce cadre. Je prends l’exemple de mon surnom, "Bon gamin". Mon futur adversaire est surnommé "Prédateur". C'est assez drôle, c'est assez contradictoire par rapport à mon sport qui représente quand même un aspect plutôt violent. Pour les gens qui n'ont pas l'habitude de voir ces choses-là, ça peut quand même heurter. Avoir un gars qui s'appelle le "bon gamin", on ne comprend pas trop au début et au final, on s'aperçoit vite que ça correspond beaucoup à ma personnalité. Par rapport à ça, je pense que je casse les codes.
"Je suis là juste pour un message de paix et d'amour. Et ça, c’est vrai, c'est contradictoire avec mon sport."
Ciryl Ganeà franceinfo
Et ça vous plaît d'avoir cette image pas stéréotypée du combattant ?
Ce n’est pas la question. C'est juste que je suis honnête et je suis cent pour cent moi-même. Je suis très authentique. On a beaucoup réfléchi en début de carrière à opter pour une attitude peut être un peu différente. On sait très bien qu'il y a beaucoup de choses autour des combats, mais pour le coup, je n’étais vraiment pas intéressé sur le fait de jouer un rôle.
Vous parliez de jouer un rôle. Celui de porte-drapeau du MMA en France, d'être un peu la vitrine de ce sport, est-ce que c'est aussi quelque chose que vous avez envie de jouer ?
Je veux être ce porte drapeau, je veux montrer à la face du monde que tout est possible. En voyant ce sport, les gens peuvent penser que je ne suis pas humain. J’ai envie qu’ils comprennent quel genre de personnage je suis. Mais j'ai surtout envie de leur montrer que je suis comme eux, que je ne suis pas une machine. Ça peut encourager certaines personnes.
"Je vois par exemple Michael Jordan. Le gars, c'est un cyborg, c'est un robot. Il y a beaucoup d’athlètes comme ça. Moi j'ai envie de montrer que je suis complètement normal et que pour autant, j'arrive à performer."
Ciryl Ganeà franceinfo
Je suis vraiment quelqu'un de simple. J’arrive avec mon drapeau et je représente la France. Je crois que les Français aiment bien cette image.
Le MMA n’a été légalisé en France qu’en janvier 2020. Est-ce que les choses avancent assez vite ?
Le MMA est vraiment déjà installé. On a un peu de retard sur les connaissances, sur les gros médias et les choses comme ça. Mais le MMA est clairement installé aujourd'hui. On a même une ligue qui est vraiment en devenir. L’UFC soutient ce projet et envoie du personnel pour le développer. Ça se met en route.
Vous êtes parti précipitamment rejoindre les États-Unis par peur d’être rattrapé en France par l’épidémie de Covid-19. Comment vivez-vous cette période ?
C'est un vrai problème. Ici aux États-Unis, on est dans une superbe ambiance, on est super heureux d'être là. Il n'y a qu'un seul problème : le Covid. C'est lui qui peut faire qu’il n’y aura pas d'événement. C'est lui qui fait que demain, je n'ai pas d'argent qui va rentrer sur mon compte. C'est lui qui fait que demain, je n'aurai pas l'occasion d'être l'homme le plus fort au monde. Donc c'est ce petit truc, même pas palpable, qui fait qu'on est extrêmement vigilants.
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