Matches truqués en Italie - Le capitaine de la Lazio et 18 personnes arrêtés
Mauri accusé
Mauri, international italien de 32 ans et capitaine de la Lazio où il joue depuis 2006, a été impliqué dans le scandale par un des joueurs repentis, Carlo Gervasoni, arrêté en avril. Selon Gervasoni, Mauri a participé au trucage des matchs Lazio-Genoa (4-2, 14 mai 2011) et Lecce-Lazio (2-4, 22 mai 2011) au bénéfice de certaines officines de paris truqués. Entendu sur cette affaire par la justice sportive en avril, Mauri avait dit aux tifosi de la Lazio: "Soyez tranquilles, j'espère que cette affaire sera bientôt terminée".
Le coup de filet est sans précédents, le pedigree des personnes arrêtées, entendues ou perquisitionné fait peur. Toutes les strates du football italien sont touchés par cette affaire nauséabonde. "Dans le cadre de cette enquête, des soupçons de manipulation de matches de la saison 2010-2011 de Serie A ont émergé, notamment au sujet des matches entre la Lazio et le Genoa et entre Lecce et la Lazio", a dit Raffaele Grassi, directeur du SCO, le service de police chargé de l'enquête, à l'antenne de SkyTG24. Ainsi, ces 19 personnes, dont plusieurs autres joueurs de première division (Serie A), ont été arrêtées pour "association de malfaiteurs à des fins de tricherie et de fraude sportive" dans le cadre de l'enquête du parquet de Crémone sur des matches arrangés par les officines de paris.
Cinq autres suspects ont été interpellés en Hongrie pour leur implication présumée dans un réseau international de paris sportifs illégaux dirigé par Tan Seet Eng, originaire de Singapour, arrêté en décembre. Selon les enquêteurs de l'opération "Last bet" ("Dernier pari" en anglais), les joueurs concernés sont soupçonnés d'avoir truqué des matches contre de l'argent, ce qui est compréhensible pour des joueurs de divisions inférieurs, moins pour les professionnels de la Série A et B. Les arrestations effectuées lundi matin par la police ont visé plusieurs villes et plusieurs clubs italiens. Cette descente policière a eu lieu alors que le sélectionneur italien Cesare Prandelli doit donner à 12h00 lundi sa liste de 23 joueurs pour l'Euro. Au nom du "code éthique" de la sélection italienne, Criscito, premier choix au poste d'arrière-gauche, pourrait donc ne pas être retenu.
Un match à 2 millions d'euros
Les matches truqués pouvaient rapporter jusqu'à 2 millions d'euros pour une seule rencontre, a affirmé lundi le procureur de Crémone Roberto Di Martino, chargé de l'enquête sur le "Calcioscommesse", ces arrangements liés aux paris. "Pour Lecce-Lazio, le gain tiré des paris serait d'environ 2 millions d'euros, et 600.000 euros ont été utilisés pour la corruption des licenciés" (joueurs, ndlr), a expliqué M. Di Martino en conférence de presse à Crémone. Il a ajouté qu'une "des nouvelles les plus importantes (ndlr: sur un total de 19 arrestations opérées lundi matin) est la présence d'un groupe de cinq Hongrois, dont certains sont déjà détenus en Hongrie pour des faits semblables à ce qui s'est produit en Italie".
Le procureur a cité d'autres matches de la saison 2010-2011 soupçonnés d'avoir été arrangés par les parieurs, parmi lesquels Bari-Sampdoria et Lazio-Genoa, en plus de Lecce-Lazio, ainsi que "sept à huit matches de Sienne regardés à la loupe pour de possibles manipulations. Des joueurs, des dirigeants, et celui qui était alors l'entraîneur (ndlr: Antonio Conte, actuel entraîneur de la Juventus Turin, tout juste sacrée championne d'Italie), sont concernés".
Conte perquisitionné
La police de Crémone a arrêté 19 personnes et a effectué des perquisitions dans une trentaine de domiciles de joueurs, d'entraîneurs et de gérants de clubs de Serie A, Serie B et de Lega Pro, une division inférieure du football italien. Selon l'Ansa, le domicile de l'entraîneur de la Juventus Turin, Antonio Conte, a également été perquisitionné lundi matin dans ce cadre. Les faits qui intéressent les enquêteurs remontent à la saison dernière, quand Conte entraînait Sienne en deuxième division (Serie B). Cette troisième vague d'arrestations, après celles de novembre 2011 et d'avril 2012, se produit à trois jours de la mise en action de la justice sportive. Jeudi, la commission de discipline de la Fédération italienne de football (FIGC) doit juger 22 clubs et 61 joueurs ou ex-joueurs dans le cadre de l'enquête de Crémone. Les premiers risquent des points de pénalité, les seconds des suspensions.
Au cur du scandale, des mafias locales et étrangères et des joueurs qui s'arrangeaient pour influer sur le résultat d'un match, afin de parier dessus à coup sûr. Des joueurs, des intermédiaires de toute sorte et peut-être des dirigeants truquaient les rencontres de ligues inférieures et même de Serie A. Il ne s'agissait pas seulement d'acheter la victoire. Les paris pouvaient en effet prendre différentes formes, comme l'"over", le fait de marquer plus d'un certain nombre de buts dans une rencontre.
Un scandale exceptionnel
Face à l'ampleur du dossier, le ministère italien de l'Intérieur a créé en juin 2011 une force spéciale chargée d'enquêter sur la corruption liée aux paris sportifs. Cristiano Doni, ancien capitaine de l'Atalanta et international italien, a été suspendu trois ans et demi en août pour son implication dans le "Calcioscommesse", un scandale de matches truqués en Serie B, la deuxième division italienne, la saison dernière. Giuseppe Signori, ancien attaquant international de la Lazio, a pour sa part été suspendu cinq ans. Quinze joueurs ont été suspendus entre un et cinq ans dans cette même affaire.
L'Italie redoute désormais un séisme comme celui du "Totonero" en 1980, qui avait précipité l'AC Milan en deuxième division et coûté deux ans de suspension à Paolo Rossi, ou du "Calciopoli", le scandale des arbitres qui a privé la Juventus de deux titres (2005 et 2006) et l'a laissée en Serie B à son tour. Les optimistes préféreront se rappeler qu'à chaque fois que l'Italie a été touchée par une telle affaire, elle a remporté dans la foulée la compétition (Coupes du monde 1982 et 2006).
Conte nie toute implication
L'entraîneur de la Juventus Turin a nié "toute implication" dans l'affaire des matches truqués dite "Calcioscommesse", après avoir été placé comme témoin assisté et subi chez lui une perquisition ce matin. "Je répète que je nie toute implication dans cette affaire, comme pour mes joueurs" de Sienne, qu'il entraînait la saison 2010-2011, visée par l'enquête. Le procureur de Crémone Roberto Di Martino a précisé que l'enquête étudiait 7 à 8 matches de Sienne.
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