Les chantiers qui attendent le nouveau ministère des Sports et le duo Blanquer-Maracineanu
• Trouver le bon équilibre pour l'organisation des Jeux olympiques 2024
Trouver l'équilibre entre le budget et la politique sportive ambitieuse que s'est donnée le Comité d'organisation des Jeux olympiques 2024 (COJO), après le passage de la crise économique liée à l'épidémie de Covid-2019, telle est la tâche conséquente qui incombe au nouveau ministre des Sports Jean-Michel Blanquer et à sa ministre déléguée, Roxana Maracineanu. Même si les Jeux prévus à Paris n'ont lieu que dans quatre ans, l'impact de la pandémie mondiale a bel et bien un effet sur le COJO qui va devoir réaliser des économies pour faire face aux conséquences budgétaires de la crise. Les organisateurs devront faire bouger les lignes du cahier des charges pour l'adapter à la situation actuelle et le nouveau ministre des Sports devra surveiller de près le dossier.
Pour rappel, le budget initial d'organisation des JO de Paris s'élevait à 3,8 milliards d'euros, une somme quasi intégralement financée par des recettes privées (sponsors, billetterie, contribution du CIO). Si début juin, Tony Estanguet, le patron du COJO, indiquait que les travaux avançaient selon les délais de départ, le chantier des lignes de métro 16 et 17 du futur Grand Paris Express était lui en retard. D’ailleurs, le 22 juin, le secrétaire d'État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari, a indiqué que celles-ci ne seraient pas livrées à temps. Les organisateurs devront ainsi trouver des solutions pour desservir cette zone olympique. Un problème supplémentaire à gérer.
En mai déjà, Tony Estanguet avait évoqué certains secteurs où des économies étaient réalisables comme la restauration, la sécurité, la mobilité ou encore la réduction du nombre de lits au village olympique. Tout cela avec une ambition environnementale inédite répétée en boucle par les organisateurs, tout comme l’"héritage" laissé aux territoires après le passage des JO. Sur le plan purement sportif, le nouveau ministre devra se pencher sur la manière d'offrir aux athlètes les meilleures chances possibles de remporter des médailles aux Jeux. À trois ans de la compétition, les sportifs français doivent se préparer dès maintenant à cette échéance et le ministère des Sports doit dégager une ligne directrice permettant aux fédérations de mettre les athlètes dans les meilleures conditions.
• Affirmer le nouveau modèle de gouvernance du sport
Roxana Maracineanu restant au gouvernement, le projet d'Agence nationale du sport (ANS) devrait donc se poursuivre. Portée par l'ancienne nageuse, l'ANS a vu le jour en 2019 et était présidée jusque-là par... Jean Castex, le nouveau chef du gouvernement. Projet très fortement critiqué par plusieurs partis d'opposition, qui considère que la création de l'ANS correspond à un désengagement de l'État dans le domaine du sport, la majorité y voit davantage un outil complémentaire au ministère des Sports.
En tant que ministre, Roxana Maracineanu défendait une gouvernance "plus cohérente et partenariale", arguant du fait que l'ANS permet une direction collégiale entre l'État, les collectivités locales, le mouvement sportif et le monde économique. L'un des chantiers du ministère des Sports sera donc d'affirmer ce nouveau modèle de gouvernance du sport français, qui ne fait toujours pas l'unanimité. Maracineanu prévoyait de le faire en 2020 en proposant un projet de loi Sport. Elle et son ministre de tutelle devraient poursuivre le travail mené par Jean Castex et l'ANS depuis moins d'un an.
• Poursuivre la lutte contre les violences sexuelles dans le sport
Si le dossier sur les violences sexuelles dans le sport, porté par Roxana Maracineanu, a connu des avancées notables, il reste toutefois beaucoup à faire. Après le scandale qui a éclaté au sein de la Fédération française des sports de glace (FFSG), révélé par l’ancienne patineuse Sarah Abitbol en janvier dernier avec la publication de son livre Un si long silence (éditions Plon), Roxana Maracineanu avait pris l’affaire à bras le corps. D’abord en prenant position personnellement et en demandant la démission de Didier Gailhaguet, alors président de la FFSG depuis plus de vingt ans. Puis en lançant en février une Convention nationale sur la prévention des violences sexuelles dans le sport.
Six mois plus tard, un premier bilan a été présenté mercredi, deux jours avant la démission du gouvernement Philippe. Cette convention a déjà permis au ministère d’identifier 177 agresseurs présumés. Près de 90 procédures judiciaires sont en cours concernant ces affaires, et 16 personnes sont actuellement incarcérées. Si sous l’impulsion de Roxana Maracineanu, la fédération a pu être épurée et la parole libérée, des actions concrètes sont encore à mener au niveau de la prévention, de la sensibilisation auprès des associations de toutes tailles, de la formation, ainsi qu’un engagement plus fort de la part des fédérations. Plus que des sanctions, il s’agit aussi de rebâtir un nouveau modèle.
• Gérer le retour du public dans les enceintes sportives
Parmi les chantiers à très court terme, le nouveau ministre des Sports et sa ministre déléguée devront se charger du retour progressif du public dans les enceintes sportives. Le duo Blanquer-Maracineanu se trouvera dans le très concret très tôt avec les finales de Coupe de France et de Coupe de la Ligue qui se dérouleront respectivement les 24 et 31 juillet prochain. Pour le moment, 5 000 spectateurs pourront se rendre au Stade de France, mais le président de la Fédération française de football (FFF), Noël Le Graët, espère pouvoir rassembler au moins 25 000 personnes lors de ces deux finales. Le nouveau ministre des Sports devra se pencher très tôt sur cette question encore très sensible alors que l'épidémie de Covid-19 continue de rebondir dans certains pays et que les enceintes sportives sont des foyers de contamination importants.
Le Tour de France qui débute fin août et Roland-Garros fin septembre seront également concernés par ces décisions, alors que le tournoi du Grand Chelem a annoncé jeudi vouloir une jauge de spectateurs entre 50 et 60% de la capacité habituelle d'accueil. Pour les autres compétitions qui se déroulent à l'année, le retour des fans dans les enceintes sportives sera également une question brûlante. Dans de nombreuses disciplines, les recettes de billetterie sont essentielles aux budgets des clubs. Et après plusieurs mois passées sans engranger le moindre euro en raison de l'annulation des compétitions, il devient urgent d'envisager ce retour des spectateurs dans les enceintes sportives pour la survie de nombreuses structures sportives.
• Venir en aide aux sponsors pour réduire l'impact du Covid-19
La survie des fédérations et des clubs, qu'ils soient amateurs ou professionnels, passe également par un maintien des partenariats de sponsoring qui existaient avant le début de l'épidémie de Covid-19. À l'instar de Bistro Régent, entreprise de restauration et sponsor maillot principal du club de Ligue 1 des Girondins de Bordeaux, nombreux sont les partenaires à s'être désengagés en cette période de crise économique. Logiquement, les entreprises partenaires ont abaissé le budget alloué au sponsoring alors que de nombreux secteurs ont été frappés de plein fouet par l'arrêt de l'activité économique.
Pour le nouveau ministre des Sports, l'objectif est de rassurer ces partenaires pour qu'ils continuent de jouer leur activité de mécène. Au niveau local, cette réalité est particulièrement saillante et nombreux sont les clubs amateurs à compter sur les revenus de sponsoring pour survivre au quotidien. Les fédérations et les structures sportives anticipent déjà des négociations ardues dans les prochaines semaines et les prochains mois avec des partenaires prêts à se réengager mais avec des montants beaucoup moins importants. Afin de montrer qu'il ne laisse pas périr ces clubs et fédérations, le ministère des Sports devra très probablement plancher sur un mécanisme de soutien aux entreprises qui renouvelleront leurs partenariats.
Par Apolline Merle et Denis Ménétrier.
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