L'heure du verdict pour Oscar Pistorius
La lecture des attendus du jugement est prévue pour durer des heures, voire un, deux, peut-être trois jours. La peine sera annoncée environ un mois plus tard. La juge Thokozile Masipa "doit passer tout en revue et ne rien laisser passer qui puisse fournir matière à une procédure en appel", explique l'avocat David Dadic. "La juge aura du mal à conclure qu'il n'est coupable de rien", pronostique-t-il. De fait, l'athlète sud-africain au visage de play-boy dont les performances avaient fini par faire oublier qu'il était un handicapé courant sur des prothèses en carbone, n'a jamais nié avoir lui-même ouvert le feu le soir du drame. Tout s'est déroulé chez lui le 14 février 2013, dans une maison qu'il a dû revendre depuis pour financer son procès.
Pistorius a tiré quatre fois sur la porte des WC de sa salle de bains avec une arme chargée de balles expansives dont il ne se séparait jamais, et placée sous son lit pour dormir. Sa victime Reeva Steenkamp, un mannequin de 29 ans, passait la nuit avec lui. Ils se connaissaient depuis trois mois. Seul témoin et seul survivant, Pistorius affirme avoir fait une "erreur" croyant à l'intrusion d'un cambrioleur, à l'instar de Rudi Visagie, un ancien Springbok qui avait tué sa fille en pensant qu'il s'agissait d'un voleur de voiture. L'affaire en 2004 avait fait grand bruit en Afrique du Sud et durablement marqué les esprits. La justice avait abandonné les charges contre le rugbyman considérant qu'il avait suffisamment souffert de la perte de sa fille.
Incidents et crise de furie
Dans le cas de Pistorius, même si la peur d'une intrusion est compréhensible dans un pays à la criminalité élevée, il n'est pas sûr de s'en tirer à si bon compte. Lui-même a répété à la barre: "Je n'ai pas eu le temps de penser. J'ai entendu du bruit, j'ai pensé que quelqu'un était venu m'attaquer, donc j'ai tiré". Mais le parquet a découvert d'autres infractions à la législation sur le port d'armes commises avant le crime. Il a aussi réuni un dossier à charge qui, s'il contient des faiblesses --scène de crime contaminée par l'intervention des policiers, voisins réveillés par des cris dans la nuit mais n'ayant rien vu-- demeure accablant. Charmeur et souriant sur les couvertures de magazine, modèle de combativité pour les petits écoliers ou handicapés de son pays, Pistorius cachait un tempérament instable, niant ses torts même devant l'évidence et abonné aux incidents, coups de gueule et crises de furie, y compris en compétition. Encore récemment, en juillet, il s'est battu dans une boîte de nuit à Johannesburg.
"(...) La cour n'aura d'autre choix que d'admettre que l'accusé savait que la victime était dans les toilettes, et a tiré quatre fois intentionnellement sur elle dans le but de la tuer", a estimé le procureur Gerrie Nel dans son réquisitoire en août. Même dans le cas où la cour accepterait la thèse de tirs incontrôlés sous l'effet de la panique, "l'accusé ne peut pas échapper à une condamnation pour homicide involontaire", a martelé M. Nel, soulignant qu'il ne croyait pas une seconde à cette version. En l'absence de preuve matérielle irréfutable, l'avocat du champion a jeté toutes ses forces dans la balance pour emporter la conviction de la juge. Pistorius a depuis l'enfance "sur-développé le réflexe de combat", "sa perception (du danger) est subjective, et il a agi par négligence. Ce qui doit conduire à un verdict d'homicide involontaire", a-t-il plaidé. Passible de la perpétuité --25 ans de réclusion incompressible--, Pistorius pourrait aussi obtenir une peine plus légère, voire rester en liberté sous caution en attendant d'avoir épuisé tous les recours.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.