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Les JO de Sotchi, l'opération séduction de Vladimir Poutine

Comment faire oublier les difficultés de son pays et redorer le blason de la Russie ? En organisant les Jeux olympiques les plus chers de l'histoire, répond Poutine. Un pari risqué.

Article rédigé par Ariane Nicolas - avec AFP
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le président russe, Vladimir Poutine, est applaudi par des athlètes russes à Sotchi (Russie), le 5 février 2014. (VADIM GHIRDA/AP/SIPA / AP)

Une vitrine médiatique qui tombe à pic. Le président russe, Vladimir Poutine, a fait des Jeux olympiques de Sotchi (Russie) un symbole majeur du retour de la Russie sur le devant de la scène internationale. Cet événement doit également lui permettre de regagner un certain prestige personnel... Un pari risqué, selon les observateurs. Explications.

Redorer le blason de la Russie

Au pouvoir depuis 14 ans, Vladimir Poutine a usé de toute son influence en 2007 pour décrocher l'organisation de ces Jeux, le plus grand événement en Russie depuis la chute de l'Union soviétique, en 1991. "J'ai personnellement choisi cet endroit", se félicite le président russe dans un documentaire qui sera diffusé vendredi 7 février, après la cérémonie d'ouverture, sur la chaîne de télévision publique Rossia 24. 

Vladimir Poutine a fait des événements sportifs une de ses priorités stratégiques, obtenant également l'organisation en Russie du premier Grand Prix de Formule 1 à la fin de l'année et la Coupe du monde de football en 2018. L'homme fort du pays promet de "montrer que la Russie est capable d'impressionner le monde en organisant une grande fête sportive, en construisant des infrastructures, en accueillant des invités" de la planète entière, observe l'analyste Maria Lipman, du Centre Carnegie. Une stratégie de "soft power" qui rappelle celle du Qatar, organisateur de la Coupe du monde de football 2022.

Faire oublier les difficultés du pays

En 2007, la popularité de Vladimir Poutine approchait 80% d'opinions favorables et la croissance de l'économie russe atteignait près de 8%. Mais la situation a changé. Pour Maria Lipman, il est "beaucoup plus difficile de convaincre que la Russie est sur la bonne voie" avec une croissance économique d'à peine plus de 1%, un rouble qui s'effondre par rapport au dollar et à l'euro et les violations croissantes des droits de l'homme dénoncées par les ONG.

De plus, les critiques se sont multipliées sur le coût de ces Jeux olympiques, les plus chers de l'histoire. Elles visent également les soupçons de corruption concernant les dépenses globales de 37 milliards d'euros pour organiser cet événement dans une zone auparavant quasi vierge d'installations sportives, et à quelques centaines de kilomètres des républiques instables du Caucase du Nord.

Aux yeux de l'analyste Dmitri Orechkine, ces Jeux sont donc désormais "un défi pour Vladimir Poutine, et non un motif de satisfaction. Il est nerveux comme on peut l'être avant de passer un examen, et si quelque chose ne se passe pas bien, l'examen sera raté." Avec quelles chances de réussite ? "Dans le meilleur des cas, les Jeux olympiques montreront que la Russie est un pays comme les autres. Mais il y a beaucoup plus de chances de se retrouver face à un échec que de récolter des bénéfices." 

Entretenir sa propre légende

Accueillir pour la première fois les JO d'hiver en Russie est aussi "un projet personnel de Poutine, qui pense à l'histoire et à ce qu'on écrira sur lui", d'après le politologue Dmitri Orlov. Depuis plusieurs années, l'homme fort du Kremlin entretient son image d'homme sportif et téméraire, se faisant filmer en train de jouer au hockey sur glace, par exemple, de faire de l'ULM avec les grues ou de pêcher torse nu en Sibérie.

Au cours d'une rencontre avec des membres du CIO, mardi, Vladimir Poutine a joué l'hôte parfait, proposant de leur montrer des panthères de Perse en cours de réintroduction dans la région.

Le président russe, Vladimir Poutine, caresse une panthère de Perse lors d'une visite dans un parc près de Sotchi (Russie), le 4 février 2014. (ALEXEI NIKOLSKY / RIA-NOVOSTI / AFP)

Il a ainsi emmené dans son propre véhicule tout-terrain le Français Jean-Claude Killy, président de la commission de coordination des Jeux, et Gilbert Felli, directeur exécutif du CIO, dans la réserve naturelle située sur les hauteurs de Sotchi. Une expédition qui n'a pas laissé Jean-Claude Killy indifférent : "Avec Poutine, on est devenu copains", confie l'ancien champion au Monde. Mais il est peu probable que le reste des Jeux soit, pour Vladimir Poutine, une simple promenade de santé. 

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