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Jeux paralympiques. Oscar Pistorius est-il le seul athlète handisport capable de rivaliser avec les valides ?

Le sprinteur sud-africain a pu participer aux JO de Londres, avant d'enchaîner dans une dizaine de jours avec les Paralympiques. En 2016, d'autres athlètes handicapés franchiront-ils le pas ?

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
L'athlète sud-africain Oscar Pistorius lors du relais 4x400 m aux JO de Londres, le 10 août 2012. (EZRA SHAW / GETTY IMAGES EUROPE)

JO DE LONDRES - Oscar Pistorius, restera à jamais le premier athlète handicapé à participer aux Jeux olympiques. Le coureur sud-africain, surnommé "Blade Runner" à cause de ses prothèses de jambe en fibre de carbone, a atteint les demi-finales du 400 m le 5 août dernier, à Londres. Alors que se préparent les Jeux paralympiques, qui auront lieu du 29 août au 9 septembre, d'autres athlètes handisport peuvent-ils franchir le pas et affronter des valides ? Éléments de réponse.

Des performances un peu justes pour affronter les valides

Oscar Pistorius savait qu'il n'avait aucune chance de médaille à Londres, mais a atteint son objectif en atteignant les demi-finales. C'est auprès de lui que les caméras se sont agglutinées, avec lui que ses concurrents voulaient échanger leur dossard. "Blade Runner" était venu pour participer. Aux Jeux paralympiques, il viendra pour gagner et pour défendre ses titres sur 100, 200 et 400 m, excusez du peu !  

D'autres athlètes ont des performances comparabales à celles des valides. Le sauteur en longueur français Arnaud Assoumani est dans ce cas. Né sans son avant-bras gauche, Assoumani détient le record du monde de la discipline chez les paralympiques, avec 7,80 m (indoor) et 7,23 m (en extérieur). Insuffisant pour une qualification aux JO, les minima fixés par la Fédération française d'athlétisme étant de 8,20 m. Cela dit, son record personnel lui aurait permis de figurer dans le top 20 des Jeux. "Je m'entraîne autant que les valides, comme un sportif de haut niveau" a-t-il explique-t-il sur Europe 1.

La cycliste sur piste britannique Sarah Storey (auparavant nageuse handisport au palmarès exceptionnel) a elle été retenue aux Jeux du Commonwealth, en 2010. Dans sa discipline ultraconcurrentielle de la poursuite par équipe, avec le handicap de n'avoir qu'une seule main, elle a eu toutes les peines du monde à se faire une place. Malgré sa présence dans l'équipe victorieuse de la Coupe du monde à Cali (Colombie) en 2011, on lui a fait savoir que sa performance n'était pas assez bonne et qu'elle devait quitter l'équipe, raconte la BBC (article en anglais). Elle a donc regardé ses ex-coéquipières enlever haut la main la médaille d'or et battre le record du monde, le 4 août dernier.

Au tir à l'arc, les athlètes à armes égales

La frontière entre valides et handicapés s'efface en revanche complètement dans d'autres disciplines. "Depuis Pékin, les compétitions de tir à l'arc handisport attirent plus de spectateurs que celles des valides", remarque le magazine The Paralympian (PDF en anglais, p.18). Et il y a de quoi.

Le premier à avoir fait tomber un record du monde aux Jeux olympique ? Im Dong-hyun, un athlète coréen pratiquement aveugle (1/10 à l'œil gauche, 2/10 à l'œil droit).

 

Et des athlètes participant aux Paralympiques ont déjà fait leurs preuves en compétition face aux valides. Le tireur suisse Philippe Horner est de ceux-là. Huitième et premier Suisse aux championnats d'Europe 2010 chez les valides, il défend les couleurs de son pays aux Paralympiques, avec de réelles chances de médaille. Cerise sur le gâteau, il a établi le record du monde en chaise roulante, avec un excellent score, précise la Tribune de Genève.

L'archer suisse Philippe Horner aux Jeux paralympiques de Pékin, le 13 septembre 2008. (AFP)

Autre favorite pour une médaille paralympique, la championne anglaise Danielle Brown, qui a remporté des titres chez les valides et en handisport. "C'est bien qu'on pousse les valides à se surpasser", expliquait-elle au quotidien britannique The Independent après sa sélection aux Jeux du Commonwealth avec les valides, en 2010. Et ça marche : l'équipe britannique de tir à l'arc, dont elle faisait partie, a remporté le titre.

Une grande marge de progression

Les athlètes paralympiques se rapprochent petit à petit des valides car leur marge de progression est très importante. Les records tombent à la pelle tous les quatre ans - encore 54 à Pékin, en 2008.

Première explication : le progrès technique. Les prothèses-lames à la Pistorius sont issues de la recherche spatiale, explique sur son site l'Agence européenne. Grâce à elles, l'athlète allemand Wojtek Czyz a d'ailleurs battu de 27 cm son record au saut en longueur en 2008.

Seconde explication : la compétition ne s'est professionnalisée que récemment, et les athlètes n'ont pas encore repoussé les limites de la performance dans de nombreuses disciplines. Là où les records d'athlétisme progressent lentement chez les valides, ils tombent régulièrement en handisport.

L'ancêtre des Jeux paralympiques. Un match de basket handisport entre les Etats-Unis et les Pays-Bas à Stoke Mandeville, près de Londres (Royaume-Uni), le 30 juillet 1955. (FRED RAMAGE / KEYSTONE / GETTY IMAGES)

L'histoire des Paralympiques n'en est encore qu'à ses balbutiements. "Quand on sait qu'il y aura 4 200 athlètes de très haut niveau à Londres, on a peine aujourd'hui à croire que les Paralympiques ont commencé il y a 64 ans à l'hôpital de Stoke Mandeville [dans la banlieue de Londres], avec seize vétérans blessés à la guerre", sourit Philip Craven, président du comité international paralympique. L'épreuve a acquis ses galons de professionnalisme bien plus tard : les minimas qualificatifs n'ont fait leur apparition que lors des Jeux de Barcelone, en 1992. Quant aux spectateurs, ils ne se sont mis à payer pour voir les Jeux paralympiques qu'à Atlanta, en 1996. Avant, on distribuait gratuitement les tickets.

L'intérêt croît, la technique se développe, certains athlètes rivalisent avec les valides…Autant de raisons qui laissent croire qu'Oscar Pistorius ne sera bientôt plus une exception, mais un pionnier.

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