Le Procureur de Montpellier évoque "de fortes suspicions"
"Il ressort de l'ensemble des investigations des enquêteurs que de très fortes suspicions pèsent sur le non-respect de l'éthique sportive à l'occasion de ce match litigieux", a déclaré le magistrat lors d'une conférence de presse, précisant que deux compagnes de joueurs seront les premières personnes à être présentées au juge d'instruction mardi en fin de matinée. "Des liens très étroits ont été tissés entre les joueurs et leurs parieurs. Pour ceux qui doutaient d'un pacte, il y a matière à se poser des questions très légitimes", a-t-il souligné. Peut-on jouer normalement un match quand on a engagé personnellement des sommes aussi importantes et quand on sait qu'on a parié la défaite de son club?".
Le procureur a indiqué que les deux compagnes des frères Karabatic seraient les premières personnes présentées mardi au magistrat instructeur dans le cadre de cette'affaire. "Nikola Karabatic est mis en cause pour avoir retiré 1500 euros et parce que sa compagne a parié pour son compte et retiré des gains", a déclaré le magistrat , évoquant une situation similaire pour Luka Karabatic, son frère, qui joue comme lui à Montpellier. De son côté, Me Dupont-Moretti, avocat de Karabatic, s'il reconnaît que son client "a bien parié", refuse d'entendre parler de match arrangé.Nikola et son frère Luka "n'ont pas laissé filer le match, n'ont pas triché". Ce sera à l'enquête de préciser désormais le degré de responsabilité des uns et des autres dans ce dossier.
D'autres joueurs actuellement entendus seront aussi déférés mais le magistrat n'a pas voulu préciser lesquels, indiquant que le juge d'instruction "va devoir vérifier le degré d'implication de chacun des gardés à vue". Dix-huit personnes au total ont été placées en garde à vue dans cette affaire.Brice Robin a notamment donné des détails sur le comportement lors de la rencontre incriminée du gardien de Montpellier.
Il a tenu aussi à préciser qu'"aucun élément de suspicion ne pèse à l'encontre de Patrice Canayer", l'entraîneur de Montpellier qui a été entendu par l'équipe de Cesson, à la mi-temps du match incriminé le 12 mai, "passer un savon à son équipe dans les vestiaires". "Les deux responsables des clubs sont totalement innocents dans cette affaire", a-t-il insisté.
"Quand j'ai eu les éléments du dossier en main, moi non plus je n'y ai pas cru. J'ai refusé de croire que des joueurs aussi talentueux aient pu se laisser aller à de tels errements", a ajouté le Procureur, évoquant "l'appât du gain" pour seule explication. Le montant total empoché grâce aux paris litigieux a été de plus de 250.000 euros, pour une mise totale de 88.000 euros.
Les personnes interpellées sont entendues dans le cadre d'une commission rogatoire d'un juge d'instruction de Montpellier pour corruption active et passive, escroquerie et recel d'escroquerie aux dépens de la Française des Jeux (FDJ) suite au montant anormalement élevé de paris passés à l'occasion du match du Championnat de France du 12 mai. En cas de simple délit sportif, les joueurs risqueraient six matches de suspension et 15.000 euros d'amende. Le président de Montpellier, Rémy Lévy, a lui menacé de sanctions pouvant aller jusqu'au licenciement.En revanche, en cas de match truqué, le délit pénal de "fraude et corruption sportive" est passible de cinq ans de prison et 75.000 euros d'amende. Les gardes à vue pourraient "être prolongées", a affirmé Me Franck Nicolleau, avocat de deux autres joueurs, Dragan Gajic et Primoz Prost. A l'issue de leur audition dans les locaux du service central des courses et jeux, dans une annexe du ministère de l'Intérieur, à Nanterre, les personnes interpellées pourront être relâchées sans poursuite ou éventuellement présentées à un juge pour une possible mise en examen.
C'est bien de cela dont il est question dans une discipline où les joueurs, les plus côtés soient-ils bénéficient de rémunérations presque ridicules au regard de ce qui peut se pratiquer dans d'autres disciplines, avec des sélaires myens de 6.000 euros. D'autant que même les rares exceptions qu'on pourrait rapprocher du "star système", comme Nikola Karabatic et son salaire annuel de 500.000 euros -sans compter les revenus équivalents que lui rapportent ses sponsors-, restaient des personnages humbles et accessibles. Pourtant, depuis l'avènement du handball français, celui-ci n'a pas échappé à la surenchère comme le reconnait le Directeur technique national Philippe Bana: "On est dans un monde où l'argent existe, où il y a des tentations et nous il faut qu'on se batte contre ça.".
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