Équipe de France de handball: Karl Konan, la belle histoire
La scène se passe au début des années 2010, sur un terrain goudronné d’Abidjan. L’association DK Cœur Afrique, fondée quelques années plus tôt par Daouda Karaboué pour venir en aide aux orphelinats de Côte d’Ivoire et développer la pratique du handball, y organise un tournoi, comme chaque été. Et un jeune en particulier tape dans l’œil de l’ancien gardien des Bleus, double champion d’Europe, du monde et olympique, retraité des terrains depuis 2013. « Il démontrait déjà beaucoup de qualités avec une morphologie (1m96, 96kg) intéressante. Et beaucoup de maturité, pour un jeune de 16-17 ans, qui se ressentait dans son handball mais aussi dans la vie de tous les jours » confie le natif d’Abidjan (44 ans), aujourd’hui responsable de la filière gardiens de but de la FFHB et ambassadeur de la Confédération Africaine de Handball (CAHB).
« J’ai discuté avec sa maman qui travaillait à l’orphelinat de Bingerville, sans rien lui promettre. On a gardé le contact. Quelques années ont passé et j’ai vu évoluer Karl. » Nous sommes alors en 2013 et Daouda va jouer à plein temps son rôle de grand frère pour son jeune padawan ivoirien. «Sincèrement, ce que j’ai fait pour lui, je ne l’ai fait pour personne d’autre, ni avant, ni après. Après un tournoi international disputé dans la Creuse, je l’ai emmené faire la tournée des pôles et centres de formation en France. Chambéry n’était pas complètement convaincu, Nantes l’a recalé mais Aix-en-Provence a dit ok. "
« Je préférerais que tu sois Didier Drogba en Côte d'Ivoire que Daouda Karaboué en France"
Et le Pays d’Aix Université Club (PAUC) ne va pas regretter d’avoir misé sur le jeune Abidjanais né à Cocody. Très vite, Karl Konan signe son premier contrat professionnel et s’impose au fil des années et des coaches successifs (Noka Serdarusic, Jérôme Fernandez, Thierry Anti) comme un joueur majeur du club aixois, au point d’être élu meilleur défenseur du championnat de France en 2019. Daouda Karaboué, qui fut un temps entraîneur des gardiens du PAUC avant de s’occuper de la relève à son poste dans la région PACA n’a rien raté de l’éclosion de son protégé au plus niveau et continue de l’accompagner. « On ne s’appelle pas tous les jours mais s’il a besoin, il sait que je suis là. Je lui ai aussi présenté ma conseillère, Isabelle Duprat, qui s’occupe bien de lui. Mais il ne me doit rien du tout, à part de rester sérieux » confie le grand frère, qui fut évidemment consulté par Karl au moment d’opter pour la nationalité et la sélection françaises. Un choix cornélien. « Sincèrement, je lui ai dit qu’il valait mieux être Didier Drogba en Côte d’Ivoire que Daouda Karaboué en France. En plus, mon cousin Aboubacar Karaboué est depuis deux ans le président de la Fédération ivoirienne de handball. Mais là-bas, le chantier est énorme! Il y en a pour plusieurs années à construire quelque chose de solide et Karl a déjà 25 ans. C’est son avenir qui prime. Je comprends son choix. Je suis passé par là moi aussi et je n’avais personne pour me conseiller. »
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La convocation du jeune arrière gauche pour le stage des Bleus cette semaine à la Maison du handball de Créteil a évidemment réjoui l’ancienne doublure de Thierry Omeyer chez les Experts, même s’il faudra attendre un peu pour fêter la première sélection, faute de match à disputer cette semaine. « C’est une belle récompense par rapport à tous les sacrifices qu’il a dû consentir: quitter son pays et sa famille, venir en France sans aucune certitude. Ne pas perdre de vue que ce n’est qu’une étape et que la concurrence sera rude. Mais découragement n’est pas ivoirien, comme on dit chez nous! Et si la porte s’ouvre, il sera là, j’en suis certain! » Karl Konan, lui aussi, se verrait bien partir pour plusieurs mandats chez les Bleus.
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