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L'épopée séduisante du Leeds United de Marcelo Bielsa touche au but

Après avoir manqué la montée en playoffs la saison passée, Leeds United pourrait faire un très grand pas vers une promotion en Premier League ce jeudi soir contre la lanterne rouge de Championship, Barnsley (18h). Depuis l'arrivée de Marcelo Bielsa, ce club historique du football anglais est passé par tous les états. Retour sur deux saisons d'une épopée sévèrement rafraîchissante.
Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 8min
  (FACUNDO ARRIZABALAGA / EPA)

16 ans après avoir quitté la Premier League par la petite porte, Leeds United se trouve en position très favorable en vue d’un retour dans l’élite. Le club du nord de l’Angleterre, sacré trois fois champion national en 1969, 1974 et 1992, est leader de Championship à trois journées de la fin. Opposés à la lanterne rouge Barnsley ce jeudi, les Peacocks pourraient compter jusqu’à 6 points d’avance sur Brentford, 3e et premier barragiste virtuel, à deux journées de la fin du championnat. En cas de victoire, seule une catastrophe pourrait empêcher Leeds de bénéficier d’une ascension directe dans l’élite.

Bielsa et des promesses

"L’année dernière, dès le premier match de championnat contre Stoke (remporté 3-1, ndlr), on a compris que quelque chose de spécial était né. Tout le monde l'a compris en sortant du stade”, raconte Théo, plume du compte twitter @LeedsFR, dédié à l’actualité du club. Trois mois plus tôt, les Peacocks annonçaient le début de l’ère Marcelo Bielsa. L’entraîneur argentin, passé en Ligue 1 à Marseille et à Lille avec des fortunes diverses, reprenait un club engourdi, pris dans les méandres des divisions inférieures du football anglais avec un passage peu reluisant en troisième division entre 2007 et 2010.

"C'était assez fou de le voir arriver. Quoi qu'on en pense, on sait qu'avec lui il y aura du bruit et des choses qui se passent. J'étais très content, surtout quand on regarde les coaches qui sont passés chez nous avant lui", ajoute Théo, qui suit Leeds depuis un séjour sur place en 2010. Très vite, tout a changé sur le terrain. La greffe de la philosophie de jeu d’El Loco a pris. Dans un championnat réputé très physique, où les duels sont âpres, Leeds est une équipe joueuse et ambitieuse dans l’animation, caractérisée par une recherche systématique du jeu en triangle. Bielsa s’appuie sur le jeu de position et demande à son bloc de presser très haut l’adversaire pour se créer un maximum d’occasions.

Lors de l'exercice 2018/19, son équipe est leader incontestable de Championship à la mi-saison avec un spectacle toujours au rendez-vous. Fin décembre, le club enchaîne deux victoires renversantes en l'espace de trois jours, contre le futur promu Aston Villa (3-2) après avoir été mené 2-0 et contre Blackburn (3-2) après avoir été mené 2-1 jusqu'à la 90e minute. "Avant, ce genre de match, on en avait un tous les cinq ans, maintenant on en a au moins deux par année", se réjouit Théo. "Quand tu vois jouer les équipes de Bielsa tu es obligé de te régaler", appuie Dimitri, supporter de l'OM converti au "Bielsisme" lors de son passage au club phocéen et aujourd'hui suiveur assidu de Leeds. 

Mariage à l'anglaise

Depuis son compte Twitter suivi par plus de 3200 personnes, Théo a noté l'intérêt nouveau de beaucoup de supporters de l'OM et plus largement de "ceux qui aiment le football comme l'envisage Bielsa". L'aura du technicien argentin et la fascination qu'il suscite ont fait de Leeds l'une des "équipes frisson" du foot européen. Un phénomène amplifié par des épisodes romanesques, comme lorsque Marcelo Bielsa a demandé à ses joueurs de laisser Aston Villa égaliser après que les siens ont ouvert le score quand un adversaire était au sol. Ce geste de fair-play avait été salué à travers toute l’Europe.

Au-delà de la qualité du jeu, la philosophie de Bielsa est très sociale. Il veut apporter du bonheur aux gens. C’est un homme simple. Le mec se trimbale toute la journée en survèt’ de Leeds avec ses airpods reliés avec un cordon. Sur les réseaux sociaux, on voit beaucoup de photos de lui en train de faire ses courses à Aldi. Il est lunaire. Ça tranche tellement avec le foot business, déconnecté de ses fans. Quand il arrive dans un club, il veut comprendre l’histoire et le mode de vie des supporters. Dans un club aussi populaire que Leeds, le mariage est parfait”, s’enflamme Dimitri, admirateur assumé d'El Loco.

Tout ce qu’il fait il le fait à fond”, ajoute-t-il. Comme lorsque Marcelo Bielsa s’est retrouvé au centre du “spygate”, quand le club de Derby County l’avait accusé d’avoir envoyé un espion à un entraînement à huis clos la veille d’un match. L’ex-sélectionneur du Chili a reconnu et assumé les faits, ajoutant même qu’il le faisait pour chaque match. “J’ai regardé 51 matches de Derby County pour préparer la rencontre. Quand vous êtes coach, une vingtaine de personnes vous abreuvent d'informations pour préparer les matchs. Toutes ne sont pas nécessaires, alors pourquoi les accumule-t-on ? Parce qu'on se sent coupable si on ne travaille pas assez. Ça réduit l'anxiété”, avait-il expliqué au cours d’une conférence de presse devenue culte.

The Damned United

Lors de cette première saison agitée, la folle envolée de Leeds s'était essoufflée, par manque de fraîcheur physique mais surtout de réalisme, comme l'expliquait le journaliste Romain Laplanche. Celui-ci notait que quand des équipes comme Norwich n'avaient parfois besoin que d'un tir cadré pour s'imposer, Leeds encaissait en décembre 7 buts sur 6 tirs cadrés concédés. Entre la 39e et la 44e journée, Leeds avait seulement inscrit 4 buts sur 113 tirs tentés. Les Peacocks avaient finalement dû passer par des playoffs, ironiquement perdus contre le Derby County de Frank Lampard.

"L'année dernière, [la montée en Premier League] n'était encore qu'un rêve, ce qui a été accompli était encore inimaginable en début de saison. Cette année, il y avait beaucoup plus d'attentes. Derrière chaque match, il y avait cet objectif de montée en tête", raconte @LeedsFR. Il n'y a pas eu d'essoufflement en 2019/20 pour Leeds United. Depuis leur victoire à Reading le 26 novembre dernier (0-1), les Whites n'ont plus jamais quitté les deux premières places de Championship, les deux seules délivrant à coup sûr le précieux sésame pour la Premier League.

"La différence par rapport à l'année dernière, c'est qu'ils encaissaient beaucoup trop de buts évitables. Un match pouvait se terminer à 32 tirs tentés, 22 cadrés à 1 et ils perdaient 1-0. Cette année, Leeds est la meilleure défense de Championship (34 buts encaissés en 43 journées)", détaille Dimitri. Portés par des joueurs clés dont le défenseur Ben White et les milieux Kalvin Phillips et Pablo Hernandez, les Peacocks ont les clés en main pour éviter les playoffs ; une phase qui ne leur réussit pas, en témoignent ses trois échecs consécutifs en 2008, 2009 et 2019.

Le club qui a révélé Eric Cantona au public anglais, doit pour cela s'imposer contre Barnsley. "Quand on supporte Leeds, on n'est jamais trop prudents. Quand on perdait des matches qui nous faisaient passer deuxièmes cette saison, on était tout de suite dans le drama", narre Théo, probablement en train de toucher du bois. Avec Leeds United, et encore plus avec Bielsa, tout peut basculer d'un côté comme de l'autre à n'importe quel moment. Après tout, la légende du club Don Revie, coach iconique de son âge d'or entre 1961 et 1974, était persuadé que son antre d'Elland Road était la cible d'une malédiction gitane.

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