PSG : saison facile, saison risquée ?
Sur le papier, le club de la capitale a un boulevard pour aller très loin en Ligue des champions. Mais sur le terrain ?
Le PSG est-il déjà en vacances ? C'est ce que dénoncent les supporters lyonnais, excédés que le club de la capitale ait cédé face à l'AS Monaco lors du match au sommet de la 31e journée, dimanche 20 mars. Le comportement de David Luiz, défenseur parisien au petit trot, impliqué sur les deux buts monégasques, pose question : et si le titre était arrivé trop tôt dans la saison d'un PSG qui peut se louper sur ses derniers grands rendez-vous ? Inventaire des craintes des supporters parisiens, avant la réception de Nice, samedi 2 avril.
Être sacré champion trop tôt : un vrai risque
Le cas du PSG : le club parisien a été sacré champion de France début mars, à sept journées de la fin. Et a loupé son premier match sans enjeu en s'inclinant contre Monaco (0-2) le 20 mars. Or, finir le championnat en roue libre ne paraît pas idéal pour aborder les matchs couperets européens.
Exemple : le Bayern Munich, saison 2013-2014
Etre sacré champion à sept journées de la fin, est-ce la panacée pour préparer tranquillement les autres échéances de fin de saison ? Supporters et joueurs du PSG veulent le croire. Mais il y a un précédent fâcheux. Le Bayern Munich cuvée 2013-2014. L'alliage du meilleur entraîneur du monde, Pep Guardiola, arrivé en Bavière l'été précédent, et du meilleur effectif européen – ossature de l'équipe d'Allemagne, future championne du monde, de quoi décrocher une deuxième Ligue des champions de suite, ce qui serait une première depuis 1990.
Pep Guardiola décide de faire tourner son effectif en championnat, et de lancer des jeunes pour préparer la double confrontation contre le Real Madrid en demi-finale. Il accorde même des passe-droits aux stars. Et réduit l'intensité des entraînements pour éviter les blessures. Ce qui se traduit par une série de contre-performances, dont une rouste à domicile contre Dortmund (0-3). "On ne devrait pas commettre l'erreur de se croire infaillibles, prophétise Guardiola après la défaite, cité dans le livre Pep Confidential. Nous ne sommes pas des surhommes, on doit continuer à courir." Il annonce dans la foulée le retour de la discipline, et décide d'aligner sa meilleure équipe à chaque match. C'est trop tard.
Après un match aller très serré, remporté 1-0 par le Real Madrid, Guardiola parle du "plus gros raté de sa vie" en tant que coach. Erreur. Le naufrage a lieu une semaine plus tard, pour le match retour. Dirigeants et supporters du Bayern exigent de Guardiola qu'il renonce à son jeu de possession à la barcelonaise pour une attaque à outrance à l'allemande. Pep cède, aligne un 4-2-4 contre-nature. Son équipe se fait fesser 0-4 à domicile. Au bout d'un quart d'heure de jeu, le Real compte déjà trois buts d'avance. Guardiola restera longtemps prostré dans son bureau, après la défaite, entouré de ses adjoints qui tentent, de longues heures durant, de lui remonter le moral.
Avoir un championnat trop facile : plutôt un avantage
Le cas du PSG : le club parisien a été sacré pour la quatrième fois de suite en Ligue 1. Et, sauf cataclysme, on ne voit pas trop ce qui empêcherait la série de durer. Est-ce susceptible d'amollir les joueurs qui devraient élever leur niveau de jeu pour les grandes compétitions ? Pas forcément.
Exemple : le Steaua Bucarest 1986-1989
Le record de la plus longue série d'invincibilité d'un club de foot est détenu par l'ASEC Abidjan, invaincu 108 matchs de suite dans son championnat, entre décembre 1989 et 1994. Arrive en second le Steaua Bucarest, au crépuscule du règne du dictateur roumain Nicolae Ceausescu, entre 1986 et 1989, avec 104 matchs de championnat consécutifs sans défaite. Pour les mauvaises langues, le fait que le fils du Conducator était le président du club explique cette incroyable série. D'autres feront remarquer que tout en survolant le championnat, le Steaua a réussi des performances de haute volée en coupe d'Europe, où l'étiquette de club du pouvoir roumain ne lui octroyait aucun passe-droit. Le club remporte la Coupe des clubs champions en 1986 au terme d'une incroyable séance de tirs au but face au FC Barcelone. Les Blaugranas manquent toutes leurs tentatives, stoppées par un Helmuth Duckadam en état de grâce dans le but roumain.
Tout sauf un exploit ponctuel. On retrouve le Steaua dans le dernier carré en 1987-1988, puis en finale en 1988-1989 face au Milan AC. L'entraîneur transalpin, Arrigo Sacchi, accroche dans le vestiaire de son équipe un article du journaliste légendaire Gianni Brera décrivant les Roumains comme des virtuoses du ballon, et conseillant aux tâcherons milanais de faire le dos rond avant de lancer des contre-attaques. Vexés, les Italiens se ruent à l'attaque du but roumain à la première seconde, et l'emportent 4-0, raconte la revue spécialisée The Blizzard (en anglais).
Le secret du Steaua ? Un travail de scouting remarquable dans le championnat roumain. Quand le jeune Gheorghe Hagi émerge avec le Sportul Studentesc, le Steaua met le grappin dessus et lui fait faire un essai, rapidement assorti d'un transfert. Pas sûr que les dirigeants du Sportul aient eu leur mot à dire. On conseillera donc au PSG de ne pas mégoter sur les zéros et de s'assurer la présence l'an prochain du jeune prodige rennais Ousmane Dembelé. Quand on voit que le Bayern Munich a battu d'un cheveu la Juventus Turin en 8e de finale grâce à Kingsley Coman, un enfant du club que le PSG n'a pas su retenir, on mesure les progrès à accomplir.
Avoir des cadres vieillissants : pas forcément un handicap
Le cas du PSG : les cadres de l'équipe (Ibrahimovic, Thiago Motta, Thiago Silva...) ont dépassé la trentaine. Parmi ses attaquants, Lucas fait figure d'exception avec ses 23 ans. En janvier, l'ancien directeur sportif de Liverpool Damien Comolli tirait la sonnette d'alarme : "Parmi les équipes de premier plan, je ne vois que le Barça à compter autant de trentenaires parmi ses joueurs majeurs. Et encore, il s'agit surtout de défenseurs, un poste moins exigeant sur le plan physiologique." Mais de grandes équipes ont brillé jadis avec des trentenaires en attaque.
Exemple : le Milan AC 1992-1993
Quand Arrigo Sacchi quitte le Milan AC pour prendre la tête de la sélection italienne, à l'été 1991, les observateurs estiment que le "Mage" a fait le bon choix. Que peut-il encore prouver avec une équipe qui a tout gagné, mais dont les joueurs majeurs ont dépassé la trentaine ? C'est le méconnu Fabio Capello qui prend le relais, avec pour seule consigne de Silvio Berlusconi de "tout gagner". Le Cavaliere n'a pas digéré l'exclusion de son équipe des compétitions européennes après l'affaire des projecteurs face à l'OM.
Le Milan de Capello termine la saison 1991-1992 invaincu, et continue sur le même rythme d'enfer lors de la saison suivante. A mi-parcours, les Rossoneri ont engrangé 31 points sur 34 possibles, leur dauphin intériste pointant à huit longueurs. Occupés sur le front européen, les Milanais voient leur avance fondre petit à petit et ne sont sacrés qu'à un match de la fin. Leur série d'invincibilité a pris fin en mars, face à Parme. Et l'opération reconquête de la Ligue des champions échoue d'un cheveu face à l'Olympique de Marseille de Basile Boli, auteur de l'unique but de la finale. L'équipe choisie par Capello pour ce match affiche 28 ans de moyenne d'âge, et aligne deux attaquants plutôt en fin de carrière (Van Basten, 28 ans, et Massaro, 31 ans).
Le Milan AC sera encore de deux finales, l'une gagnée face au FC Barcelone de Johan Cruyff en 1994, l'autre perdue face à l'Ajax de Louis Van Gaal en 1995. Pas mal pour une équipe vieillissante !
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