Soupçon de matches truqués: l'intermédiaire Michel Moulin mis en examen pour "corruption passive"
Après deux jours de garde à vue, six hommes étaient en train d'être présentés jeudi au palais de justice de Paris aux juges d'instruction parisiens Serge Tournaire et Hervé Robert. Parmi eux, le principal actionnaire des "Crocodiles" nîmois Serge Kasparian, son président Jean-Marc Conrad et le président du Stade Malherbe de Caen -aujourd'hui en Ligue 1- Jean-François Fortin, un salarié du SM Caen et deux intermédiaires potentiels, dont l'homme d'affaires Michel Moulin, qui a été mis en examen à la mi-journée pour "corruption passive" selon son avocat. Les enquêteurs cherchent à savoir si les dirigeants nîmois ont exercé des pressions et proposé des arrangements à d'autres clubs à la fin de la saison passée dans le but d'éviter la relégation de leur club. Les enquêteurs disposent d'écoutes téléphoniques, notamment de Serge Kasparian. Ce dernier a reconnu la teneur des conversations écoutées et avoir tenté d'influer sur le résultat de matches, selon une source policière.
Parmi les matches suspects figure notamment un Caen-Nîmes le 13 mai. Le résultat (1-1) avait fait les affaires des deux clubs, Caen montant ensuite en Ligue 1 tandis que Nîmes assurait son maintien. Autre rencontre suspecte, un match entre Dijon et Nîmes remporté 5-1 par Dijon le 24 avril. Proche de Jean-Marc Conrad et de l'entraîneur de Dijon Olivier Dall'Oglio, dont la garde à vue a été levée mercredi, Michel Moulin est soupçonné d'avoir joué un rôle d'intermédiaire entre les deux hommes avant cette rencontre. "Ce n'est pas le cas, mon client n'a pas pris la moindre somme d'argent et ce match n'a pas été truqué puisque Dijon a battu Nîmes 5-1", a déclaré Me Patrick Maisonneuve. Michel Moulin a été conseiller sportif du Paris SG d'avril à mai 2008 puis manager sportif du club du Mans en 2010. C'est également un homme de presse: il avait fondé puis revendu le journal gratuit ParuVendu et participé à la création de l'éphémère journal "Le 10 Sport", lancé fin 2008 pour concurrencer L'Equipe.
"On a massacré des hommes"
Face à cet épisode qui fait ressurgir le souvenir du match truqué Marseille-Valenciennes en 1993, les plus hautes instances du foot français, la Ligue de football professionnel (LFP) et la Fédération française de football (FFF), se sont constituées parties civiles. En attendant, les dirigeants des clubs de foot français ont paru faire bloc derrière leurs confrères. "90% des gardes à vue se terminent sans rien, mais en attendant on a massacré des hommes et un sport que nous aimons, et qui est important pour la jeunesse, et ça nous est insupportable", a déclaré à Paris Jean-Pierre Louvel, président du syndicat des clubs professionnels français (UCPF).
C'est à la faveur d'une toute autre enquête - celle sur le cercle de jeux Cadet pour laquelle Serge Kasparian qui le dirigeait a été placé en détention provisoire en octobre - que ces soupçons de trucages sont apparus. Les écoutes téléphoniques réalisées dans le cadre de cette enquête, confirmées à l'AFP de source policière et dont le Canard Enchaîné publie des retranscriptions, nourrissent les soupçons des enquêteurs. Le jour du fameux match entre Caen et Nîmes, les deux présidents se sont téléphonés, selon le Canard enchaîné. Question de Fortin: "Toi c'est un point aussi (qu'il te faut?)." Réponse de Conrad: "Ouais, il nous faut un point, voilà." Et Fortin de poursuivre: "Ben, si on n'est pas trop cons, hein?". Selon le Canard, après le match, le président de Nîmes avait "fait déposer à la porte du vestiaire 24 cartons de 12 bouteilles de vin".
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