Cet article date de plus de deux ans.

"Mon Petit Gazon" : 10 choses à savoir sur le jeu préféré des fans de football

En prĂšs d'une dĂ©cennie, ce fantasy game portĂ© et dĂ©veloppĂ© par trois amis a dĂ©jĂ  sĂ©duit 1,8 million d'utilisateurs. Ă€ tel point qu'aujourd'hui, l'application est devenue un acteur incontournable du paysage footballistique français.

Article rédigé par franceinfo Culture - Gaël Simon
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 12 min
90% des utilisateurs du jeu sont des hommes. (CAPTURE D'ECRAN)

La France compte 67 millions de sĂ©lectionneurs. Cette vieille rengaine n’a jamais Ă©tĂ© aussi vraie que depuis l'existence de Mon Petit Gazon (MPG). Le but de ce jeu lancĂ© en 2011 : crĂ©er une compĂ©tition et son propre club de football fictif en Ligue des champions ou dans un championnat au choix (Ligue 1, en Ligue 2, Liga espagnole, Premier League anglaise ou Serie A italienne), recruter les vrais joueurs professionnels du ballon rond avec un bugdet de 500 millions d'euros, et remporter ses matchs face aux autres membres de la ligue, les rĂ©sultats dans MPG Ă©tant basĂ©s sur les performances rĂ©elles des joueurs membres de son effectif. Ainsi, si vous comptez Neymar dans vos rangs, chaque but marquĂ© par l'attaquant brĂ©silien avec le PSG vous permettra d'inscrire un but dans votre match fictif sur l'application.

Un concept simple qui a su conquĂ©rir les fans en moins de 10 ans. Chaque saison, ce sont prĂšs de 950 000 entraĂźneurs en herbe qui s'affrontent et se chambrent sur MPG. À tel point qu'aujourd'hui, l'application est un acteur incontournable du paysage footballistique français qui travaille en partenariat avec la Ligue de Football Professionnel (LFP) et des mĂ©dias comme L'Équipe et Canal +. Mon Petit Gazon, c'est l'histoire d'une aventure lancĂ©e par trois camarades devenue un succĂšs digital fĂ©dĂ©rant autour de lui une forte communautĂ© d'utilisateurs. Retour sur un phĂ©nomĂšne qui dure depuis une dĂ©cennie en dix faits marquants.

Un phénomÚne né dans un bar

Cette success story qui trouve son origine
 dans un bar de Paris : "On Ă©tait en train de boire une biĂšre, peut-ĂȘtre la biĂšre de trop, et on s’est dit ‘allez on y va, on a les compĂ©tences en digitale, on va faire notre jeu de foot auquel on aimerait bien jouer !’", s’amuse Ă  raconter Martin Jaglin, co-fondateur de l’application avec Benjamin Fouquet et GrĂ©gory Rota. Les trois complices, managers d'une agence de marketing digital et fans de football, dĂ©cident de reprendre la structure du jeu de fantasy auquel ils jouent depuis des annĂ©es : Fanta league.

Mon Petit Gazon, "le jeu qui va vous faire aimer le lundi" est alors lancĂ© Ă  l’étĂ© 2011. En 2014, il compte dĂ©jĂ  45 000 utilisateurs, essentiellement grĂące au bouche-Ă -oreille. Le succĂšs grandissant, et le dĂ©veloppement de l'application leur prenant de plus en plus de temps, les trois fondateurs dĂ©cident de se consacrer Ă  plein-temps au projet entre 2016 et 2018. Une dĂ©cennie aprĂšs la lancement de MPG, la promesse semble en tout cas tenue. Robin, joueur aguerri l’affirme : "On a hĂąte d’avoir les rĂ©sultats le lundi matin. Qu’ils soient bons ou mauvais !".  

950 000 joueurs chaque saison  

Comme cet ingĂ©nieur de test de 26 ans, ils sont plus d’1,8 million d’utilisateurs Ă  avoir jouĂ© au moins une fois Ă  MPG en 10 ans. Et depuis deux ans, ce sont 950 000 entraĂźneurs passionnĂ©s qui s'affrontent grĂące Ă  l’application. "On a un jeu qui rassemble les gens. DĂšs qu’on aime le foot et qu’on a un smartphone, on peut jouer. On est au croisement de quatre univers : le jeu, le pronostic quand on mise sur un joueur, les rĂ©seaux sociaux, quand on joue, on crĂ©e un groupe avec ses potes, et le foot", analyse Martin Jaglin.

Mais le monde de MPG, comme celui du football, reste majoritairement masculin. 90% des utilisateurs sont en effet des hommes, qui se regroupent en deux catĂ©gories. Les Ă©tudiants de 15 Ă  25 ans et les 25-45 ans. "Je joue depuis ma pĂ©riode lycĂ©e. C’est mon frĂšre qui m’a initiĂ©. Je joue avec lui et des amis", raconte Robin. Benjamin, 27 ans affronte lui aussi sa bande d’amis sur l’application. "Mais ça m’est arrivĂ© d’ĂȘtre sur un groupe Facebook et de jouer avec des inconnus". MPG n’est pour autant pas rĂ©servĂ© qu’aux hommes dans la force de l’ñge ! "On a un enfant de 10 ans qui nous a Ă©crit qu’il jouait avec son pĂšre. Les deux se lancent des dĂ©fis. On a aussi le cas d’une mamie de 72 ans qui nous a envoyĂ© un message pour nous demander d’écrire les caractĂšres en plus gros dans le jeu", rapporte Martin Jaglin. Un vrai jeu pour les 7 Ă  77 ans.  

Comme une série Netflix avec des épisodes  

Par son concept simple et ludique, MPG arrive Ă  attirer l’adhĂ©sion d’une bonne partie des fans de football. L’un des moments favoris des utilisateurs : le mercato. Chaque membre d’une ligue mise une somme sur le joueur qu’il souhaite obtenir. Si son enchĂšre est la plus importante, le joueur rejoint alors son Ă©quipe. Une manche en cinq tours souvent intense et disputĂ©e. "Ce qui me plaĂźt le plus, c’est le suspense des tours de mercato. C’est ce qui fait le plus marcher le jeu je pense", estime Benjamin. Robin partage aussi cette passion pour les enchĂšres cachĂ©es en dĂ©but de partie : "Il faut ĂȘtre malin. Une pĂ©pite peut vous sauver une saison. D’ailleurs, grĂące Ă  ce jeu, je me suis intĂ©ressĂ© aux matchs du dimanche habituellement rĂ©servĂ©s Ă  la sieste. C’est amusant de voir certains paris porter leurs fruits ou de constater que ses adversaires ont recrutĂ© des cireurs de bancs. Ça rajoute du piment aux matches".

On prĂ©sente ça comme une sĂ©rie avec des Ă©pisodes. CrĂ©er la ligue. Le mercato. Les matches. C’est une sĂ©rie Netflix !

Martin Jaglin,

cofondateur de MPG

Le jeune homme, supporter de l’OM en vient mĂȘme Ă  encourager parfois des joueurs d’équipe rivales. "J’ai achetĂ© des joueurs lyonnais et j’étais derriĂšre eux. En fait dans l’idĂ©al, toujours avec l’exemple de l’OL, le scĂ©nario parfait serait que Lyon perde son match 5-4 avec 4 buts des joueurs lyonnais que j’ai recrutĂ©s". Martin Jaglin confirme les effets que peut avoir MPG sur la maniĂšre de vivre un match de football : "Avant, on regardait passivement. Aujourd’hui, on devient actif, n’importe quel fan devient coach. Tu participes au match que tu es en train de voir". Et certains vont mĂȘme plus loin en se donnant des gages en marge de leurs parties. "On nous a mentionnĂ© le cas d’un joueur qui s’était jetĂ© dans le Vieux-Port de Marseille. Il avait pariĂ© de le faire s’il terminait dernier de sa ligue". MĂȘme sur MPG, il faut savoir mouiller le maillot.  

La Ligue 1, championnat préférée des joueurs  

MPG offre la possibilité à ses utilisateurs de s'affronter sur les championnats de quatre pays, mais aussi en Europe avec un mode réservé à la Ligue des Champions. Mais 55% des joueurs préfÚrent créer leurs propres compétitions en Ligue 1. Benjamin fait partie des utilisateurs qui apprécient jouer à travers tous les championnats disponibles, mais avoue opter "en général pour la Ligue 1, ou la Premier League parce que ce sont les championnats les plus suivis par les autres". 

Mais il y a ceux qui jouent leurs propres championnats, avec des rĂšgles singuliĂšres. "On a vu des MPG Ă  l’envers. C’est-Ă -dire que le but est de perdre tous ses matchs, mais qu’avec des joueurs recrutĂ©s pour plus de 10 millions d’euros", s’amuse Martin Jaglin. Autre crĂ©ation originale : des amis qui engagent exclusivement des joueurs dont le nom commence par la lettre de l’alphabet qu’ils ont tirĂ© au sort.  

Neymar, Mbappé et Memphis, joueurs stars

D’autres s'imposent de ne pas prendre de joueurs du PSG pour ne pas dĂ©sĂ©quilibrer les dĂ©bats entre joueurs. "Avec mes amis, on avait mis en place une rĂšgle interdisant de recruter des joueurs du PSG", explique Robin. Pourtant, les stars Kylian MbappĂ© et Neymar restent les joueurs les plus choisis par les utilisateurs de l’application, devant une autre figure majeure de la Ligue 1, le Lyonnais Memphis Depay.  

Pour autant, existe-t-il une stratĂ©gie pour gagner son championnat sur MPG ? "Il n’y en a pas, affirme Martin Jaglin. Heureusement, sinon on mettrait la clĂ© sous la porte ! Il ne suffit pas d’acheter des Parisiens pour gagner. Les petits joueurs sont autant achetĂ©s que les gros. Par exemple, un joueur comme Ecuele Manga qui est titulaire chaque semaine Ă  Dijon est plus intĂ©ressant qu’un joueur du PSG souvent blessĂ©. Il y a une part d’expertise, et d’alĂ©as". D’ailleurs, aussi bien Benjamin que Robin font le choix de cibler des joueurs moins connus. "Avant, je mettais le paquet sur les gros noms. Maintenant, j’essaie de flairer les bons coups, et de prendre moins de stars", explique le jeune homme de 27 ans qui vit Ă  Aix-en-Provence.  

Une communication atypique

PrĂ©sent sur les rĂ©seaux sociaux, MPG se fait remarquer par une communication percutante, prĂŽnant le second degrĂ© et les post humoristiques. Une ligne dans l’esprit du jeu. Mon Petit Gazon, c’est du football, mais aussi beaucoup de chambrage et des vannes entre amis. "On ne cherche pas Ă  avoir un positionnement. C’est spontanĂ©, on ne se prend pas au sĂ©rieux, dĂ©taille le co-fondateur du jeu. On a commencĂ© l’aventure entre amis. Et on parle Ă  nos utilisateurs comme Ă  des amis. On est entiers et les gens aiment ça". La petite structure rĂ©pond ainsi Ă  la main aux milliers de messages qu'elle reçoit chaque semaine.

Une communication authentique et dĂ©calĂ©e qui se veut en Ă©cho de certaines valeurs vĂ©hiculĂ©es par le football. "Quand on parle de football, ce n’est pas formel ou ‘prout-prout’. On retranscrit ce ton-lĂ . Quand on regarde un match, on se lĂšve, on crie, on fait des vannes. Ce n'est pas aseptisĂ©e. On essaie d'ĂȘtre comme ça. Et ça marche, les gens en ont marre des communications trop lisses", affirme Martin Jaglin.

Le jeu taclĂ© par la LFP et L'Équipe Ă  ses dĂ©buts

Mais l'ascension de MPG ne s'est pas faite sans accrocs. En 2016, la Ligue de football professionnelle, alors dirigĂ©e par FrĂ©dĂ©ric Thiriez veut faire barrage Ă  l'application et lancer une procĂ©dure judiciaire. La raison : l'utilisation irrĂ©guliĂšre de l'image de la Ligue 1. "Ça avait pĂ©tĂ© Ă  l'Ă©poque, se souvient Martin Jaglin. Thirriez. Il est de l'ancienne Ă©cole, il n'est pas trop sur l'innovation et les start-up !". Mais l'arrivĂ©e de Didier Quillot a la tĂȘte de l'entitĂ© change la donne. La LFP et MPG sont alors partenaires depuis 2017. "On a convenu que notre jeu est une machine Ă  suivre la Ligue 1. On a trouvĂ© un accord de partenariat, on s'Ă©change de la visibilitĂ©".

Le journal L'Équipe aussi s'est opposĂ© Ă  l'application, en 2014 cette fois. "On avait fait les pirates, avoue le cofondateur de MPG. On avait pris un systĂšme pour rĂ©cupĂ©rer les notes des joueurs qu'ils donnaient. Ils n'ont pas trop aimĂ©. On a arrĂȘtĂ© et dĂ©veloppĂ© notre propre algorithme de notation". Mais trois ans plus tard, les deux structures trouvent Ă©galement un accord. Depuis des Ă©missions sont produites par les deux structures et les notes de L'Équipe sont proposĂ©es aux utilisateurs de MPG. En outre, la structure qui compte 14 employĂ©s a signĂ© plusieurs autres partenariats avec des sociĂ©tĂ©s comme Uber, Puma ou Allianz, dont les logos apparaissent dans le jeu. De quoi permettre Ă  MPG de rester gratuit. "On vit Ă  70% de la publicitĂ© et grĂące Ă  ces marques, et Ă  30% des options que les gens peuvent acheter dans le jeu", prĂ©cise Martin Jaglin.

Des matches jouĂ©s sur FIFA pour combler l'arrĂȘt des championnats

La saison 2019-2020 a Ă©tĂ© particuliĂšre pour tout fan de football et utilisateur de MPG. En raison de l'Ă©pidĂ©mie de coronavirus, le conseil administratif de la LFP avait en effet dĂ©cidĂ© d'interrompre le dĂ©roulement des championnats professionnels, Ligue 1 et Ligue 2 Ă  partir du 30 avril 2020. En Angleterre, la Premier League a Ă©tĂ© suspendue entre le 13 mars et le 17 juin. La Serie A et la Liga ont Ă©galement Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e, respectivement du 9 mars au 20 juin et du 11 mars au 11 juin.

"On a pris cher. MPG s'est arrĂȘtĂ© avec le foot", se souvient Martin Jaglin. Alors pour essayer de contenter les utilisateurs, les propriĂ©taires de l'application dĂ©cident de jouer les matches qui auraient dĂ» avoir lieu sur FIFA 2020. "La communautĂ© a bien aimĂ©. C'Ă©tait une maniĂšre de ne pas baisser les bras, d'adresser un doigt d'honneur Ă  la situation". L'iniative a durĂ© un mois. Si les pertes sur le moment ont Ă©tĂ© inĂ©vitables pour MPG, les responsables de l'application assurent aujourd'hui avait retrouvĂ© l'essentiel de leurs utilisateurs : "On a une communautĂ© de fidĂšles".

Un lieu de refuge pour les supporters privés de stades

Le football retrouvant finalement son rythme habituel malgré la pandémie, Mon Petit Gazon a donc pu reprendre du service cette saison. Et pour les supporters qui n'ont pas la possibilité de se rendre dans les tribunes pour encourager leur équipe, le jeu représente une autre maniÚre de vivre leur passion. "MPG est un sorte de catalyseur des émotions que l'on peut vivre lors d'un match. Cela permet de vivre des matchs un peu plus intensément en attendant de pouvoir à nouveau crier et chanter dans les stades", avance Robin.

Pour Martin Jaglin, affronter ses camarades sur l'application reprĂ©sente Ă©galement l'occasion de maintenir une forme de lien social. "Le jeu crĂ©e un Ă©pisode hebdomadaire en famille ou entre potes. Ça donne quelque chose Ă  raconter au bureau". MĂȘme si pour certains fans comme Benjamin, rien ne remplace le plaisir de suivre le match depuis des gradins. "Ça ne compensera jamais l'ambiance et tout ce qui se passe dans un stade pour moi. Je vois vraiment ça comme un jeu sur lequel on peut se vanner".

Le retour de Mon Petit Prono pour l'Euro 2021

Les dĂ©veloppeurs fourmillent d'idĂ©es pour continuer Ă  faire Ă©voluer MPG. Une nouvelle version de l'application sera ainsi lancĂ©e Ă  la fin de cette saison. "L'application datait de 2016 et n'Ă©tait plus compatible avec Apple Store. On a tout refait, c'est tout beau tout neuf, vante Martin Jaglin. L'application est prĂȘte depuis avril 2020 mais on dĂ» reporter la sortie". Un lancement qui coĂŻncidera avec la fermeture du site internet, qui n'Ă©tait utilisĂ© que par 4% des utilisateurs. 

On a 10 000 idées et un groupe Facebook sur lequel les gens nous donnent des pistes mais on choisit nos batailles.

Martin Jaglin

cofondateur de MPG

D'autre part, la start-up propriétaire de MPG lancera en marge de l'Euro 2021 l'application gratuite Mon Petit Prono, comme elle l'avait fait pour la Coupe du Monde 2018. "C'est un jeu simple auquel tout le monde peut jouer. Il faut pronostiquer les résultats des matchs. C'est quelque chose qui avait connecté beaucoup de monde", mentionne Martin Jaglin. 800 000 personnes avaient en effet tenté de prévoir les résultats du Mondial gagné par la France. Mon Petit Prono fera donc son retour en avril.

De quoi permettre de prolonger la belle ascension de Mon Petit Gazon qui s'est déjà exporté en Espagne et en Angleterre. Voilà une application qui joue sur tous les terrains.

Prolongez votre lecture autour de ce sujet

Ligue 1

Commentaires

Connectez-vous Ă  votre compte franceinfo pour participer Ă  la conversation.