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Bordeaux Leaks : Le club des Girondins dans la tourmente après des publications de ses supporters Ultras

Depuis le début de la semaine, les Ultramarines, principal groupe de supporters des Girondins de Bordeaux, publient quotidiennement des enregistrements qui mettent dans l'embarras le club. Ces bandes audio, que les Ultramarines ont publiées afin de dévoiler ce qu'ils considèrent être comme une mauvaise gestion du club, proviennent de réunions qui se sont déroulées entre décembre et mars, auxquelles participaient Frédéric Longuépée, président délégué du club, et Antony Thiodet, responsable de la billetterie. Si l'impact de ces leaks est encore à déterminer, la fracture entre le club et ses supporters est acquise.
Article rédigé par Denis Ménétrier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 9min
 

La période est bien trouble pour les Girondins de Bordeaux. En grande difficulté financière en raison de l'arrêt des compétitions suite à l'épidémie de Covid-19, le club au scapulaire vit des moments difficiles. Son sponsor maillot Bistro Régent a par exemple suspendu son engagement pendant la période du coronavirus, et vient de recevoir une lettre d'un avocat le sommant de payer ce qu'il doit aux Girondins. Une manière quelque peu insolite de traiter ses partenaires, que les supporters bordelais dénoncent depuis plusieurs jours. En conflit ouvert avec la direction du club depuis de longs mois, les Ultramarines, principal groupe de fans des Girondins, ont accentué la pression. Depuis le début de la semaine, le groupe ultras publient une série de leaks qui met tout le club dans l'embarras. Sur leur site, les Ultramarines, qui précisent posséder plus de deux heures d'enregistrement, justifient leur démarche par un besoin "d'informer les supporters des Girondins du vrai visage de ceux qui les dirigent", à savoir King Street, fonds d'investissement américain qui détient l'ensemble des parts du club depuis décembre dernier.

• D'où proviennent ces leaks et pourquoi ont-ils été publiés ?

Depuis plusieurs mois, un "Conseil des membres", auquel les Ultramarines précisent ne pas avoir été conviés, se réunit régulièrement afin de discuter de la stratégie mise en place par le club. Des supporters participent à ces réunions, ainsi que des dirigeants des Girondins de Bordeaux, dont Frédéric Longuépée, président délégué du club et Antony Thiodet, responsable de la billetterie. Tous deux sont visés par les leaks publiés depuis le début de la semaine par le groupe ultras, qui souhaite dénoncer la vision du club portée en interne.

Pour rappel, Longuépée et Thiodet sont dans le viseur des supporters depuis de longs mois, car ils considèrent que le club ne "place pas le terrain comme la priorité", et dénoncent la stratégie marketing mise en place pour remplir le Matmut Atlantique. En octobre dernier, des dizaines de supporters s'étaient ainsi plaints de ne pas avoir pu réserver des places en virage sud pour plusieurs matches à domicile, alors que la tribune était loin d'être remplie. Les supporters y ont ainsi vu une stratégie les poussant à acheter des places plus chères ailleurs dans le stade, alors que le club a évoqué des "dysfonctionnements" pour se justifier. Depuis, et avant la crise liée à l'épidémie de Covid-19, des "Longuépée démission" descendaient régulièrement des tribunes du Matmut Atlantique.

• Que contiennent-ils ?

Depuis le début de la semaine, ce sont quatre enregistrements audio d'environ deux minutes chacun qui ont été publiés sur les réseaux sociaux des Ultramarines. Un dernier doit être également révélé ce vendredi. Chaque leak est accompagné d'un débrief réalisé par le groupe ultras sur son site et cherche à démontrer la mauvaise gestion du club par ses dirigeants. Dans le premier enregistrement publié en début de semaine, Antony Thiodet explique que les supporters mécontents "sont une infime minorité", "15 ou 20 personnes qui aujourd'hui font le bruit qu'ils font, à force de harcèlement", tout en précisant que le club parvenait à "obtenir des adresses IP". Les Ultramarines dénoncent également le lien que construisent les nouveaux dirigeants avec les clubs amateurs locaux.

Dans un deuxième enregistrement, Antony Thiodet détaille ainsi la stratégie mise en place par la nouvelle direction : "Pour restaurer la relation avec les clubs, on a là aussi voulu faire quelque chose de structurant. On pouvait faire ce qui est fait depuis des années : faire œuvre de charité. On leur balance des invitations, des ballons de temps en temps et on croit qu'on est en relation avec eux. (...) Pour renforcer la vitalité économique du football néo-aquitain, il faut qu'on déclenche des réflexes dans la tête des dirigeants du football. (...) On doit leur dire : nous on est en situation, si vous nous faites un chèque de 3 000, de vous apporter en valeur 10 ou 15 000."

Les relations avec la presse locale et un journaliste du quotidien Sud-Ouest sont également évoquées tout comme le business plan mis en place par la direction du club. Dans l'enregistrement publié ce jeudi, Frédéric Longuépée détaille les difficultés rencontrées auprès de la DNCG : "Vous recrutez des joueurs internationaux à qui vous donnez des primes à la signature plus importantes et à qui vous donnez des salaires plus importants (comme Laurent Koscielny l'été dernier, ndlr) (...) Vous ne réussissez pas forcément à vendre tous les joueurs et vous vous retrouvez avec une économie qui n'est pas équilibrée. Et au rendez-vous que nous avons eu avec la DNCG l'été dernier, on leur avait dit : "On n'y est pas arrivés, mais faites nous confiance parce que le business plan c'est celui-là". (...) Et quand je vais y retourner au mois de mai, je vais leur faire un numéro de claquettes."

• Quelles réactions ces leaks provoquent-ils ?

Dans un des enregistrements, Antony Thiodet cite plusieurs noms qu'il juge sous l'influence de personnes semant la zizanie dans l'environnement du club. Parmi eux, d'anciens joueurs des Girondins qui ont par le passé critiqué la direction du club et qui ont réagi à ces leaks. Ludovic Obraniak, joueur de Bordeaux entre 2012 et 2014, qui a dénoncé sur RMC Sport un "climat délétère" au sein du club. Dans un message publié sur Twitter, il s'adresse aux deux dirigeants entendus dans les enregistrements : "Pardonnez mon propos mais vous apparaissez, aux yeux de tous, comme de bien pâles héritiers (par rapport aux anciens dirigeants, ndlr)." Benoît Trémoulinas, formé à Bordeaux et champion de France avec les Girondins en 2009, s'est également exprimé : "Discréditer mon discours en sous-entendant que je suis influencé par qui que ce soit me fait doucement sourire, cela me conforte dans mes idées sur la manière dont vous gérez les Girondins".

Le latéral gauche, à la retraite depuis l'année dernière, est aussi revenu sur l'un des enregistrements publiés : "Parrainer les clubs amateurs en leur demandant de l'argent est tout simplement indécent de la part des Girondins de Bordeaux." Alors que Thiodet a indiqué dans l'un des leaks qu'un journaliste de Sud-Ouest se montrait trop proche des Ultramarines, le Club de la presse de Bordeaux a également réagi en prenant "connaissance avec étonnement des allégations à l'encontre d'un journaliste, d'un média et de la presse de la part d'un dirigeant des Girondins. La remise en cause de la probité et des méthodes de travail de nos consœurs ou confrères, via des accusations non étayées, nous paraît indigne d'une institution aussi historique."

Enfin, Pierre Hurmic, candidat à la mairie de Bordeaux arrivé deuxième derrière le maire sortant Nicolas Florian lors du premier tour des élections municipales, a publié une lettre envoyée à Frédéric Longuépée dans le courant du mois d'avril. Le conseiller municipal fait part de ses inquiétudes au président délégué des Girondins, qui lui répondra dix jours plus tard. Une réponse "creuse et dépourvue d'intérêt", selon Pierre Hurmic, qui précise qu'il restera "très vigilant" à l'évolution de la situation suite à la publication des leaks.

• Quel impact pour les Girondins de Bordeaux ?

Si "le club pointe du doigt l'absence de contextualisation et la manière dont les sons ont été coupés", comme le précise L'Équipe dans son édition de jeudi, les Girondins ne devraient pas sortir indemnes de cette crise. L'image du club tout entière est écornée par le contexte actuel, et la voix de certains anciens joueurs comme Obraniak et Trémoulinas pourrait la dégrader davantage. Les relations entre la direction et les supporters, déjà au plus mal, risquent d'être explosives dans les prochains mois. Le club bordelais pourrait passer plusieurs semaines compliquées, d'autant que des querelles internes existent et que le club pourrait être impliqué, selon les informations de RMC Sport, dans une affaire de transfert relais. Une pratique interdite par la FIFA qui pourrait coûter au club deux ans d'interdiction de recrutement. Une sanction dont les Girondins se passeraient bien au vu du contexte actuel.

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