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Caisse noire et dopage organisé à la Real Sociedad

Au lendemain des accusations de l'ancien président de la Real Sociedad concernant un dopage organisé mis en place par ses successeurs, El Pais dévoile plusieurs documents lui donnant raison. Au coeur de ce dossier, le Dr Fuentes, actuellement à la barre des accusés dans le procès de l'affaire Puerto.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3 min
 

Les matches truqués dévoilés par Europol, la désignation du Qatar pour le Mondial-2022 mise en cause par France Football, les alertes lancées par l'UEFA concernant les nouveaux contrats de sponsoring maillot des clubs bientôt contraints par le fair-play financier, le football mondial vit une crise. Les affaires se succèdent, et celle mettant en cause la Real Sociedad pourrait ouvrir de nouvelles brèches. Pour la deuxième fois, un système organisé de dopage au sein d'un club pourrait conduire des dirigeants devant la justice. Au début des années 2000, la Juventus Turin avait fait l'objet d'une enquête, et un procès avait révélé les pratiques dopantes généralisées, avec des transfusions sanguines et la prise de créatine, dans les années 90. L'Espagne sera-t-elle le deuxième pays marqué par un tel scandale ?

Une comptabilité B pour acheter des produits dopants

En plein coeur du procès Puerto concernant les pratiques dopantes dans le cyclisme, l'Espagne va-t-elle vivre un cataclysme ? La justice a restreint ce procès au seul cyclisme, refusant d'instruire dans les autres sports alors que le Dr Fuentes, pourvoyeur en produits dopants, a reconnu que d'autres sports étaient concernés. Mais les révélations de Iñaki Badiola, président de la Real Sociedad en 2008, pourrait la contraindre à regarder de près le football. Dans une interview au journal As, Badiola accuse ses prédécesseurs d'avoir créé, de 2001 à 2007, une double comptabilité pour permettre l'achat de produits dopants par les médecins du club.

"Au cours des six saisons antérieures à notre présidence, les autorités du  club ont géré une comptabilité B pour acheter des médicaments et des produits  qui étaient à ce moment-là catalogués comme dopants", accuse Badiola, mettant en cause les docteurs Eduardo Escobar et Antxon Gorrotxategi, acheteurs de ces produits pour l'équipe. Dans son déballage, Badiola évoque également un possible lien entre ces  supposées commandes de produits illicites et l'affaire de dopage Puerto, dont  le procès se tient depuis le 28 janvier à Madrid, avec le docteur Eufemiano Fuentes comme principal accusé. "Il se peut parfaitement que Fuentes ait été le pourvoyeur (d'Escobar et  Gorrotxategi)", affirme Badiola. "Nous voulons vérifier que les documents en  notre possession coïncident avec ceux de Fuentes, pour plusieurs raisons:  premièrement, parce que c'est une question morale, et ensuite, parce que nous  l'avions déjà signalé par une plainte en 2008. De cette manière, ce que nous  disions à l'époque serait recoupé".

Un mail explicite, des notes à déchiffrer

Au lendemain de ces accusations, le quotidien El Pais a dévoilé les preuves. Le mail envoyé par le Dr Gorrotxategi à Badiola, alors président du club, pour lui préciser le coût des achats des produits dopants grâce à "l'argent B"., les notes du Dr Fuentes saisies dans le cadre de l'affaire Puerto listant les produits et leurs coûts à destination de RSOC, pouvant évoquer le nom de Real Sociedad. Interrogé sur la signification de ce sigle lors du procès Puerto, Fuentes a répondu: "Il s'agit peut-être d'un bon vin". La direction actuelle du club a tenu à réagir à ces accusations en affirmant dans un communiqué: "Depuis que l'actuel conseil d'administration a la responsabilité de gérer  le club, soit depuis le 20 décembre 2008, nous pouvons garantir qu'il n'y a eu  aucune pratique irrégulière".

Au-delà du dopage, cette affaire pourrait avoir une énorme résonance en Espagne, puisqu'elle concerne José Luis Astiazaran, président de la Sociedad de 2001 à 2005, et qui se trouve actuellement à la présidence de la Ligue espagnole de football professionnel. "Durant mon mandat comme président de la Real  Sociedad  (2001 à 2005), je  n'ai jamais eu aucune connaissance ni aucun soupçon de la réalisation de  pratiques illégales. (...) Si je les avais eus, j'aurais immédiatement agi", a réagi Astiarzaran. "La Real  Sociedad  a toujours, a fortiori pendant ma présidence, collaboré avec les autorités en charge de la lutte contre le dopage et il n'y a jamais eu aucun problème".

Si la justice espagnole a beaucoup traîné des pieds dans l'affaire Puerto, refermant à deux reprises le dossier et refusant de divulguer aux fédérations nationales étrangères des informations, des révélations pourraient naître indirectement du procès. 

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