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Euro 2016 : pourquoi la victoire du Portugal n'est pas volée

Face au jeu proposé par les Portugais, un sentiment d'injustice a envahi les supporters français, défaits en finale. Pourtant, la Seleçao a crânement joué son coup et mérité sa victoire. Explications.

Article rédigé par Christophe Rauzy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Les joueurs du Portugal célébrant leur victoire en finale de l'Euro 2016, le 10 juillet 2016 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). (FEDERICO GAMBARINI / DPA / AFp)

Gagner moche, c'est gagner quand même. Cette expression, qui conclut l'analyse de francetv info sur le jeu du Portugal juste avant la finale de l'Euro 2016, deviendra peut-être la devise de la Seleçao, sacrée championne d'Europe aux dépens de la France, dimanche 10 juillet. Après leur défaite, les supporters tricolores ont fustigé le jeu des Lusitaniens, jugé pauvre et défensif. Mais c'est cette stratégie assumée, adossée à une parfaite science tactique, qui a vaincu les Bleus, qui ont, eux, laissé passer leur chance. Voici pourquoi leur victoire n'est pas imméritée.

Parce que le Portugal a très bien défendu

Le 19 juin, au lendemain du désespérant Portugal-Autriche conclu par un triste 0-0, Fernando Santos, le sélectionneur portugais, avait donné rendez-vous à la presse le 11 juillet, lendemain de la finale, affirmant que ce jour-là, il sera "accueilli en héros" à son retour au Portugal. A l'époque, l'affirmation avait fait sourire, mais trois semaines plus tard, elle s'avère prophétique.

En fait, le technicien avait un plan en tête. Dix-huit mois plus tôt, en octobre 2014, lors de la défaite portugaise contre la France à Saint-Denis, 2-1 en match amical, lui et ses hommes s'étaient promis de revenir au Stade de France pour la finale de l'Euro. Il a alors façonné un groupe dont le seul objectif était de bien défendre, pour mieux contre-attaquer, une philosophie éloignée des habituelles prétentions de domination portugaise.

Avec ce jeu moins flamboyant, mais très efficace, le Portugal s'est qualifié pour l'Euro sans jamais gagner avec plus d'un but d'écart. Puis en France, il a réussi à passer chaque tour de la phase finale, dans la difficulté mais avec succès : après trois matchs nuls en poule, il a fini troisième de son groupe avant d'éliminer la Croatie en 8e de finale (1-0 après prolongation), puis la Pologne aux tirs au but en quart, avant de vaincre le pays de Galles 2-0 en demi-finale. Un parcours dans la douleur mais somme toute, très régulier.

Parce que le coaching de Santos a été décisif

Le tournant du match aurait pu être la sortie prématurée de la star portugaise, Cristiano Ronaldo, à la 25e minute de la finale. Sa blessure au genou aurait dû offrir aux Bleus une chance de plus de l'emporter, les Lusitaniens étant privé de leur principale arme offensive. Mais l'absence de "CR7" n'a pas beaucoup pesé dans le scénario du match. C'est en fait à la 79e minute qu'un élément est venu changer la donne : le milieu de terrain Renato Sanches a été remplacé par Eder, un pur avant-centre.

Dès lors, les Portugais ont joué avec un point d'appui supplémentaire, permettant d'ouvrir plus d'espaces en attaque, déstabilisant une défense française assez peu sollicitée jusque-là. Mais surtout, ce joueur très costaud a bousculé des défenseurs tricolores émoussés. Et sans surprise, c'est de lui qu'est venu le seul but du match. Dans la deuxième prolongation, une demi-heure après son entrée en jeu, Eder a réussi à contourner Laurent Koscielny et à placer une frappe sèche à 20 mètres du but, au raz du poteau droit d'Hugo Lloris.

Le coaching de Fernando Santos s'est donc avéré payant. Le sélectionneur portugais a choisi de faire déjouer les Français et de les fatiguer pendant les trois quarts du match, pour changer de stratégie offensive et mieux leur porter l'estocade à la fin. Cette stratégie avait déjà été utilisée par le technicien lusitanien contre la Croatie en huitième de finale, lorsqu'il avait fait entrer Quaresma à 3 minutes de la fin du temps additionnel. C'est ce même joueur qui avait offert la victoire aux Portugais dans les prolongations, en concluant une contre-attaque foudroyante. Une botte secrète fatale.

Parce que les Bleus n'ont pas été assez efficaces

"C'est cruel, mais c'est le haut niveau." L'analyse de Didier Deschamps est implacable. Le coach tricolore ne crie pas à l'injustice, estimant que les Français ont été victimes de l'efficacité de leurs adversaires. Ils payent aussi leur manque d'adresse devant le but. La France a eu l'occasion de s'imposer, notamment sur les deux têtes de Griezmann, le tir croisé de Giroud ou le poteau de Gignac, mais n'a simplement pas bénéficié de la même réussite que lors des tours précédents. En finale, les Bleus ont tiré 18 fois et ont cadré 7 frappes, des chiffres comparables à leurs statistiques contre l'Allemagne (16 tirs, 6 cadrés) contre qui ils ont marqué deux fois.

A l'inverse, les Portugais n'ont cadré que trois tirs, mais l'un d'entre eux, la frappe d'Eder, a fait mouche. Contre l'Allemagne, outre un Lloris étincelant, un brin de chance avait permis à la France de garder sa cage inviolée. Il serait toutefois injuste de considérer que le sort s'est acharné sur l'équipe de France contre le Portugal. Avant le but d'Eder, un coup franc brossé de Guerreiro avait heurté la barre transversale française, avant de ressortir. Le destin a finalement choisi de récompenser les Portugais pour leur abnégation.

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